Si vous ne le savez pas encore ou si vous refusez de le comprendre, sachez-le : c’est le Front de gauche et, singulièrement, Jean-Luc Mélenchon, son candidat à l’élection présidentielle de 2012, qui est responsable du niveau très haut du Front national. Mais non, ami lecteur, amie lectrice, ce ne sont pas les ravages de la crise accentués par la politique libérale menée par le gouvernement. Non, non plus, ce ne sont pas les rapprochements idéologiques avec une partie de la droite qui font sauter les digues en légitimant le discours de haine et d’exclusion. La priorité politique donnée, au sein du Front de Gauche, à la lutte contre l’extrême-droite ne servirait de rien. Non, ami lecteur, amie lectrice, mets-toi bien une chose dans le crâne : le FN c’est la faute à Méluche et au Front de Gauche. A moins que…
Premier point de l’argumentaire, les thèses anticapitalistes défendues par le Front de gauche et singulièrement le Parti de Gauche, renforceraient le FN, dont le libéralisme économique est pourtant bien connu. C’est la thèse défendue par le Bobo libéral qui explique doctement comment le PG « renforcerait son ennemi de toujours, le FN » : « Examinons simplement un point de sémantique de son discours. Désormais la gauche de pouvoir est accusée de social-libéral, terme qui me rappelle d’ailleurs celui de sociaux-traîtres que les communistes d’antan jetaient à la face des sociaux-démocrates. N’oublions pas que Marine Le Pen accuse les socialistes d’ultra-libéraux et d’agents de la finance internationale. Mieux encore, elle ne les dissocie plus de l’UMP, qui formeraient, eux et le PS, la clique au quolibet d’UMPS. »
L’argument de la sémantique est à courte vue mais bien logique sous le clavier d’un libéral. Il lui aurait fallu admettre que l’héritière de Montretout, en tant que membre de l’oligarchie, en est une des serviteurs zélés. Il lui aurait fallu pousser plus loin et admettre qu’il n’y a pas plus libéral que le Front national, parti qui, ès qualité, a rendu hommage à Margaret Thatcher, une socialiste bien connue n’est-ce pas. Il oublie encore que la directrice de campagne de Jean-Marie Le Pen lors de la présidentielle de 2007 avait exhumé une photo présentant le chef en compagnie d’un communiste bien connu Ronald Reagan. Enfin, notre détracteur a bien pris soin de revenir à la vérité des mots, notamment ceux du programme économique du FN en 2012. Un seul exemple. Le FN a affirmé ne pas vouloir augmenter le Smic et propose aux salariés 200 euros de prise en charge de cotisations par l’État. Ces pistes sont alléchantes pour un certain patronat. Le FN ne conteste pas le système, elle en est la béquille.
Deuxième attaque, en se focalisant sur Marine Le Pen, Mélenchon lui donne une audience et une aura qu’elle n’aurait pas eu autrement. C’est le propos défendu par Philippe Szykulla, sur le plus du Nouvel Obs. « Tout d’abord, en attirant la poursuite, il a braqué les projecteurs sur une Marine Le Pen qui n’en demandait pas tant. Elle peut maintenant se targuer d’être une autochtone, au contraire de Mélenchon, elle a voté sur place », glose notre enseignant. Bon an mal an, en creux, se lit la thèse des deux extrêmes qui se conforteraient l’un l’autre, sur fond de collusions objectives d’intérêts.
Qu’il me soit permis de rappeler que la candidature de Jean-Luc Mélenchon à Hénin-Beaumont, pour discutable qu’elle soit, a eu un effet à tout le moins. Elle a mobilisé une partie notable de l’électorat, qui ne s’est donc pas abstenu. Or, face à cet électorat extrêmement mobilisé qui est celui de l’extrême-droite, réveiller le camp républicain, le camp de la gauche, constitue en soi un enjeu premier à qui veut faire barrage à l’héritière de Montretout. C’est ce qu’a contribué à faire Jean-Luc Mélenchon. La Le Pen n’a pas besoin de lui pour attirer les caméras, encore moins pour obtenir une légitimité médiatique que le peuple lui refuse avec obstination. L’héritière et ses amis ont table ouverte dans la plupart des majors de l’infotainment.
Enfin, il y a l’attaque subtile de Julien Dray. Notre ancien camarade de la Gauche socialiste accuse Mélenchon de faire le jeu du Front national : « En général, quand il y a défaite et chaos, ça ne profite pas à la gauche, ça profite à d’autres extrêmes, l’histoire l’a montré », a déclaré Dray sur Radio J. Mélenchon, lui, estime que c’est du chaos que doit naître un renouveau politique et, en tous cas, nous lui donnons une perspective d’ordre avec la bataille contre l’austérité et pour une 6e République.
A ce stade, ami lecteur, ami lectrice, tu es bien convaincu-e : ce sont les membres du Front de Gauche qui font monter le F-Haine. Mes arguments en défense de nos positions sont bien faibles, n’est-ce pas, par rapport aux thèses véhiculées par les médias et les ténors de l’idéologie dominante. Ils le sont surtout parce que je ne suis pas un média et pas un ténor convoqué sur tous les plateaux télés. Donc, tu as compris. Et là, patatrac. Tout s’écroule.
Dans le Vaucluse, c’est réussi….
Dans l’Express, on apprend que, sciemment, certains dirigeants du Parti solférinien ont fait élire Marion Maréchal Le Pen, laquelle brille par ses positions anti-ouvrières à l’Assemblée, dans le Vaucluse. Des révélations d’anciens membres du parti désormais au pouvoir font état d’un « deal entre le PS et le FN ». Il y aurait eu échange de bons procédés : le maintien de la socialiste dans la circonscription de Marion Le Pen contre le maintien de la candidate FN dans la circonscription voisine, la 5e du Vaucluse, où le socialiste Jean-François Lovisolo avait besoin de la présence du FN au second tour pour l’emporter face à l’UMP. Lisez l’article pour avoir le détail croustillant des échanges possibles entre les uns et les autres.
Je ne parlerai pas, pour rester poli, des étonnants transferts de voix observés dans l’Oise à l’occasion d’une élection législative partielle. Mis à part ça, c’est encore le Front de Gauche qui fait monter le Front national jusqu’à permettre l’entrée d’une héritière dans l’hémicycle.
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Bonus vidéo : Eminem « Love The Way You Lie (feat. Rihanna) »