Nous sommes donc à la belle époque de l’apparition de nombreux mouvements de la libération de la femme, et l’industrie des comics-nous l’avons déjà vu à maintes reprises ici- n’est pas exempte de ce phénomène, et tente d’introduire d’une façon plus ou moins réussie des personnages ou de métamorphoser celles qui étaient déjà sur la piste. Mais là où l’industrie des comics arrive à développer et à faire ressortir des héroïnes dans l’air du temps, la télévision penne encore à s’adapter à cette révolution idéologique.
Et pourtant, on se souvient (ou peut-être mieux vaut-il l’oublier) de cette première tentative de transposer Wonder Woman en série télé en 1974 par la chaine ABC, et qui ne fut pas concluante, on se demande encore pourquoi…
Mais ce n’était sans compter sur l’imagination des Studios Filmation (créés par Lou Scheimer et Norm Precott) qui cherchaient une série pour compléter la deuxième saison d’un programme où s’envolait déjà le personnage de Captain Marvel, et intitulé Shazam ! dès 1974. Diffusée sur CBS, l’émission allait s’appeler The Shazam!/Isis Hour et réunir bon nombre de téléspectateurs.
C’est ainsi que le scénariste Marc Richards (qui était un grand amateur d’égyptologie)fut sollicité, c’est lui qui créa le concept de la série The Secrets of Isis, où une enseignante et archéologue découvre lors d’une excursion en Egypte un ancien bijou qui va lui octroyer de nombreux pouvoirs. L’amulette appartient en effet à Hatchepsout, ancienne reine d’Egypte et donne à la personne qui la possède les pouvoirs de la déesse Isis comme ceux de commander les éléments naturels et de s’approprier les capacités des animaux. Lorsque que le besoin se faisait ressentir, Andrea devait dévoiler l’amulette et réciter une incantation (O Mighty Isis!) pour pouvoir se transformer.
Le pitch du pilote fut au départ modifié car il ne correspondait pas selon les responsables de CBS à une audience de jeunes spectateurs, le concept originel impliquait en effet beaucoup plus de violence où les protagonistes principaux étaient criminologues, ils furent transformés en enseignants.
L’été 1975 approchant à grand pas, le casting des comédiens démarre et c’est Brian Cutler (qui incarne Rick Mason, le love interest de l’héroïne) qui est le premier à être engagé, suivi de JoAnna Cameron dans le rôle titre ainsi que Joanna Pang qui incarne l’étudiante Cindy Lee.
C’est l’artiste Bob Kline, qui va travailler pour Filmation de 1973 à 1980, qui est pris pour s’occuper du design de l’héroïne, des storybords et des décors.
Il est également responsable de la fameuse couronne d’Isis, symbole de la divinité Egyptienne, ainsi que son costume.
Avec un budget très restreint, le tournage de chaque épisode est tourné en 2 jours et demi à Los Angeles ainsi qu’à San Fernando Valley.
Le pilote est diffusé le 6 septembre 1975 et marque le début d’une saison de 15 épisodes. La série est un véritable succès ce qui fait d’Isis la toute première super héroïne de l’histoire de la télévision, et ce qui incite également les producteurs à préparer une seconde saison, mais sans le personnage de Cindy Lee. C’est la comédienne Ronalda Douglas qui incarne Rennie Carol qui va la remplacer dans son rôle d’étudiante.
Bien que diffusées l’une derrière l’autre, les séries Shazam ! et The secrets of Isis ont vu aussi leurs personnages se rencontrer à plusieurs reprises lors de crossovers, Captain Marvel prêtant main forte à Isis et vice-versa lorsque la situation était désespérée.
L’un des moments récurrents et très apprécié par le téléspectateur était quand l’héroïne brisait le quatrième mur et s’adressait directement à celui-ci, le temps d’un clin d’oeil complice ou à la fin de l’épisode lorsqu’elle donnait une petite leçon de morale liée aux aventures du jour.
C’est le mois suivant que les véritables aventures en solo d’Isis commencent, avec une couverture de toute beauté dessinées par Kurt Schaffenberger, l’intérieur sera illustré par Ric Estrada. Dans ce numéro notre héroïne devra affronter Scarab le "plus grand des magiciens" enfermé dans une pyramide depuis 3000 ans, on peut comprendre son mécontentement (moi une fois j’ai failli rester coincée dans une pyramide, c’est vrai je déconne pas, alors ce Scarab il me fait un peu de la peine quand même).
Dans le second opus qui parait en décembre 1976, apparaît un autre vilain garçon, "The Creature from Dimension X" sorti tout droit d’une expérimentation laborantine ayant mal tournée. Ici le grand Mike Vosburg (Tales From the Crypt) fait des merveilles sous la plume de Steve Skeates, l’une des super stars du Silver Age (Spectre, Aquaman, Namor). Les numéros suivant toujours dessinés par Vosburg (et encrés par Vince Coletta) seront écrits par Jack C. Harris, ("Political Rally Panic", le troisième numéro sera le tout premier scénario de sa carrière).
D’abord aidé par Skeates et Vosburg, le scénariste va peu à peu prendre de l’assurance et insérer des détails réalistes et personnels dans la série, transposant l’histoire du #4 au lac de Winnipesaukee dans le New Hampshire où il a l’habitude de passer ses vacances (j’espère pour lui qu’il n’y avait pas de grosse bestiole à tentacules à l’époque), prénomme la mère de l’héroïne Viola, comme la sienne, celle-ci habitant Fairfax, comme le nom du quartier où il habitait lorsqu’il était étudiant, etc.
Elle réapparaîtra ensuite dans plusieurs event de chez DC comme One Year Later et Brightest Day mais sans toute fois marquer les esprits comme se fut le cas à ses débuts, des fouilles archéologiques sont sans doute actuellement en cours pour la faire revenir du côté des New 52, je ne serais pas étonnée de la revoir à nouveau en compagnie de Shazam, car c’est en effet dans les plus vieux sarcophages que l’on fait les meilleures amulettes.