©Franck Boileau
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La 8e édition du festival Europavox avait lieu en fin de semaine dernière, du 23 au 25 mai. Et on était là pour tout voir. Avec une programmation éclectique (de Benjamin Biolay à Vitalic en passant par Disiz ou FAUVE), il y en avait pour tous les goûts et Clermont-Ferrand s’assurait d’ores et déjà sur le papier un succès de recettes. Mais c’était sans compter sur un temps absolument pourri pendant tout l’événement, entre pluie et froid de novembre. Si certains irréductibles sont quand même venus braver le vent, il faut avouer que le village sonnait bien vide par rapport aux années précédentes.
Et c’est bien dommage pour les scènes gratuites, le Palais des Glaces et Fact’ory, qui n’ont, de fait, pas pu connaître un engouement que certains groupes méritaient pourtant.
Restaient donc ces fameux concerts dans la Coopé ou le Forum avec les grosses têtes d’affiche. Et le public a bien répondu présent au rendez-vous.
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JOUR 1: FAUVE, LESCOP, MILES KANE
Et notamment les jeunes pour le groupe hype du moment sur les Internet, Fauve. La Coopé affiche complet dès 19h pour entendre ce drôle de band qui mélange un peu tout les genres, voire trop. Musicalement c’est pas trop mal, même s’il n’y a rien d’exceptionnel, mais le chanteur, faut juste arrêter. Quelque part entre Noir Désir et Grand Corps Malade, le gars parait possédé mais ne dégage rien d’autre qu’une impression de malaise pour nous. Non, ce n’est pas du génie ce qu’ils font, on arrête la masse populaire tout de suite. Ca fait bouger les foules, certes, et c’est le plus important, il y a une rechercher de visuel pas dégueulasse non plus, mais ça ne donne surtout pas envie d’écouter le futur EP qui doit sortir en juin.
C’est Lescop qui prend le relai une heure plus tard pour « liver » son album aux critiques pleines de louanges, La Forêt. Alors qu’il fait tout sur disque, il est ici accompagné de musiciens. De bons musiciens. Et heureusement parce que Lescop n’est pas du genre très expansif sur scène et ne maitrise pas du tout l’interaction et les moments de creux. En commençant par ses titres d’album avant ses singles il a pris un petit risque devant un public qui ne le connaissait pas forcément. Il a fallu attendre donc La Nuit Américaine, La Forêt ou Un Rêve pour que ça devienne un peu plus chaud dans la foule. C’est maitrisé, cette pop très 80′s Indochine marchera toujours mais il manque de la folie pour draguer un public de festival. Là, on a eu le droit à un show pour fans et il fallait certainement avoir une approche différente. Reste que c’est très pro et carré et qu’on ne s’est pas non plus ennuyé.
Puis vint pour clôturer cette première soirée, la grosse tête d’affiche européenne des trois jours: le rockeur anglais Miles Kane. Et le gars a tenu son rang à la perfection.
Avec un premier disque solo quasi parfait, il avait de quoi enflammer la salle avec des tubes comme Inhaler, Come Closer, Rearrange ou Kingcrawler. Une gouaille monumentale, un guitariste très très bon et physiquement à fond, il a joué le jeu et le public lui a bien rendu. Peut être même que dans les deux cas, on ne s’attendait pas à ça.
Accompagné d’un second guitariste excellent et d’un batteur balèze, il a déroulé son show pendant plus d’une heure. En bonus, on a aussi eu le droit à pas mal de nouveaux titres du prochain album qui paraîtra le 6 juin. Et ça a l’air de défoncer tout autant que le précédent, voire plus. Give Up, Don’t Forget Who You Are et Get Right, autant de scuds qui risquent de tourner un sacré moment une fois qu’on aura l’opus entre les mains. Du pop-rock à l’anglaise comme on l’aime de l’ancien Rascals et un concert de très très haute facture qui restera sans doute dans les annales du festival.
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JOUR 2: L’ELECTRO NIGHT
Après une bonne première journée, il faut remettre le couvert pour l’événement de l’édition cette année: l’Electro Night. Sur le modèle des Nuits Divines en octobre, Clermont invite une pléiade d’artistes baignant dans le milieu de l’électro. A la différence qu’ici il s’agit uniquement d’artistes européen (EUROpavox hein) et de mettre en lumière des mecs pas encore connus au côté de poids lourds.
C’était le cas par exemple du danois Rangleklods qui avait la dure tâche d’ouvrir le bal dans la très grande salle du Forum. Et devant un parterre parsemé, difficile de créer une ambiance. Il a néanmoins réussi à captiver notre attention malgré une mise en scène sommaire. Son matos + un micro à la main pour chanter, comme le bon vieux DJ de mariage. Mais niveau musique, il y avait indéniablement quelque chose. De la minimal qui fait un peu penser à James Blake mais avec une voix d’homme. Ca mérite sûrement d’être plus écouté sur support studio qu’en découverte live, comme ça. Une bonne mise en bouche néanmoins avant un tout autre style et une toute autre ambiance avec Skip&Die. Le groupe hollandais était l’OVNI de la soirée. Avec leurs dégaines de punk à chiens, on a d’abord eu peur d’être à un concert de Sinsemilia ou tous ces trucs dont on a plus envie d’entendre parler dès qu’on est passé en 4e. Mais non. Pour synthétiser grossièrement, disons qu’il s’agirait d’un mélange bordélique entre Diplo et No Doubt. Pas forcément attendus, ils ont foutu un faya d’enfer sur des titres qui s’étalaient sur 5,6 minutes minimum. Entre électro, dubstep, reggae ou rock, leur cocktail détonnant a fait des étincelles et attiser la curiosité d’une salle qui se remplissait à vu d’oeil pour voir ça de plus près. Ils savent se donner, et notamment la chanteuse qui n’a pas hésité à venir chanter dans le public pendant plusieurs minutes et fini en soutien-gorge sur scène. Une belle surprise et on prend les paris qu’ils vont être une des révélations des festivals européeens cette saison.
Pour se remettre de ces émotions, une petite pause s’impose avant l’arrivée de Mr Nô & JCDC pour leur projet FANTOME et un show inédit. On est très content pour Benoit, le régional de l’étape adoubé par le couturier légendaire. Il s’agissait de l’attraction de la soirée et on a pas été déçu. Avec un set très techno des années 80 parfaitement maitrisé, Nô a régalé les spectateurs. Un son hypnotique qui collait parfaitement avec l’ambiance visuelle. Mi défilé de mode (les danseuses étaient évidemment habillées en Castelbajac) mi atelier dessin pour Jean-Charles, on ne savait plus trop où donner de la tête, qui bougeait pourtant dans tous les sens sous les coups de buttoir de Mr Nô. Une ambiance particulière, mais surtout particulièrement bonne où les deux artistes ont réussi à trouver un équilibre sur scène qui laisse penser que ce ne sera pas leur dernier passage ensemble.
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©Remi Le Pogam_
Pour la suite, l’ambiance devait continuer à monter d’un cran avec la légende Amon Tobin qui présentait Two Fingers. Vous le savez, on est honnête donc on va vous le dire sans vergogne: c’était de l’escroquerie. On connait le génie du mec, on s’attendait alors à quelque chose de bordélique, certes, mais de costaud. On a rien eu d’autres qu’un mec qui s’en branlait d’être là et donnait l’impression de jouer dans sa chambre. Un son beaucoup trop fort, des transitions à la Virtual DJ ratées, et on se croyait à la fête de la musique sur le stand où se rassemblent tous les clodos. Il a voulu joué dans la violence mais très sincèrement, c’était juste inaudible. Pas étonnant alors que les gens qui ont semblé être dans le truc avaient 4 gr dans chaque poche, et pas que d’alcool. Sûrement des mecs et des nanas qui faisaient du diabolo ou du jonglage au lycée. Bref, on a bien aimé le remix de Flying Lotus version hardcore, mais c’est tout.
La soirée devait se terminer en apothéose avec le très attendu Vitalic et son VITLZR. Le dijonnais avait pour mission d’exterminer la condition physique de la foule et de ses trop nombreux titous qui la composaient. Des gamins de 16 à 18 ans qui n’hésitaient pas à te demander de la drogue. Va passer ton bac pouilleux et laisse nous tranquille.
Bref, Vitalic c’est la certitude de voir un dancefloor géant en mode ultra-violence. Et même si son dernier album, Rave Age, sent des pieds, on avait quand même la curiosité de voir ce que donnait son nouveau live visuellement, avec des musiciens désormais.
Et on a pas été déçu. Le mec est au-dessus du lot malgré sa dégaine d’ingénieur du son. Pendant une heure, il a fait basculé le Forum dans une hystérie collective semblable à celle qu’on avait connu au Printemps de Bourges il y a trois ans. Malin, le mec pioche dans ses trois albums pour créer une ambiance électro punk de premier ordre. Et on se rend compte alors qu’il a un nombre de tueries impressionnant pour trois disques justement. Pas un seul moment de répit, il a enchainé les nouveaux No More Sleep, La Mort Sur le Dancefloor, Stamina avec les légendaires Second Lives, My friends Dario, La Rock One, Poney pt.1, Sabali remix, Poison Lips, etc etc. Plus le live avançait et plus le show montait en pression. A la fin, même les invités et les plus vieux se sont mêlés à la foule pour jouer le jeu. C’est dire le pouvoir du type. Deux rappels plus tard, le Forum fermait ses portes pour la soirée et on repartait sous la pluie avec de beaux acouphènes.
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JOUR 3
La journée pépère, avec du Jacques Higelain, Benjamin Biolay, Puggy puis la scène hiphop avec Disiz en sauveur de la patrie qui remplaçait Keny Arkana. Le public a dû y gagner au change, sans aucun doute. Une journée où il fallait se promener dans le village pour découvrir la spéciale Irlande de cette année. Des conférences et même du cinéma en allant jusqu’aux Rio pour les plus solides. Il y avait aussi la retransmission de la demie finale de top 14 de l’ASM, de quoi te refroidir pour le reste de la soirée.
Et puis après, y’avait Champion’s League.
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En tout cas, bravo à l’organisation et à tous les gens qui ont bossé pour réussir cette nouvelle édition d’Europavox. On attend déjà l’an prochain.
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