Après Cristina accourue dès le 18 mars saluer le tout nouveau Souverain Pontife (voir mon article du 19 mars 2013), les dirigeants du Club Atlético San Lorenzo de Almagro qui ont offert aux pèlerins la première intervention du Pape en espagnol pendant ses Audiences générales -et ce n'est pas n'importe quel exploit sportif qu'ils ont réalisé là (voir mon article du 10 avril 2013), Estela de Carlotto accompagnée par quelques militants de la cause des enfants disparus (voir mon article du 25 avril 2013), et les journalistes argentins en poste à Rome reçus à la messe de la Maison Sainte-Marthe il y a dix jours (voir mon article du 12 mai 2013), c'était hier au tour de deux hommes que tout sépare dans le paysage politique argentin. Ils ont assisté à l'Audience Générale et le Pape François les a salués sur le chemin du retour. Il s'agit du socialiste Hermes Binner, venu en Europe pour fêter les 150 ans du parti social-démocrate allemand (aujourd'hui) et qui a fait escale à Rome pour l'occasion, et le très kirchneriste Jorge Capitanich, le Gouverneur de la Province de Chaco, venu exprimer au Saint-Père la fierté du peuple chaquègne à l'idée qu'un Argentin soit désormais le Successeur de saint Pierre.
Binner à gauche, Capitanich à droite
Les deux ont ensuite raconté l'entretien à la première personne du pluriel aux journalistes et sur les réseaux sociaux, ce qui semblerait suggérer qu'ils ont ressenti sur place une certaine fraternité peu commune entre les politiciens argentins de différents bords et c'est ainsi que Página/12 en fait le récit dans un article court mais touchant.Si Capitanich est un homme politique d'un modèle assez classique en Argentine, Binner est quant à lui un démocrate conciliant et tolérant. A la tête du Frente Amplio Progresista (FAP), il appartient à l'opposition nationale. Son comportement très digne et très sobre dans la défaite m'a beaucoup impressionnée lors de la dernière soirée électorale à laquelle j'ai pu assister il y a deux ans (les primaires des élections législatives et présidentielles où Cristina de Kirchner a battu tous les records de l'Argentine démocratique). D'ailleurs, ses propos montrent une bien meilleure connaissance de la personnalité du Pape que pour tous les autres visiteurs (hormis les footeux du San Lorenzo, bien entendu) et son choix de cadeau le prouve aussi : un livre d'un jésuite allemand du XVIIIème siècle qui a exercé son ministère dans la Province de Santa Fe et qu'il a fait publier lorsqu'il était, jusqu'à il y a peu, Gouverneur (excellent) de cette Province, située au nord de celle de Buenos Aires.
Nouvel indice que le sens du dialogue avance en Argentine et que la conscience nationale prend peu à peu le pas sur l'esprit partisan, ouvrant la possibilité de construire un désaccord pacifique dans ce pays, comme le montre aussi la manifestation d'hier à Mercedes (voir mon autre article de ce jour).
Pour aller plus loin : lire l'article de Página/12