De plus en plus d'initiatives émergent autour du partage de valeur. Reste que leur viabilité passera par le business model qu'elles adopteront. Des modèles qui sont pour le moment encore en train d'émerger.
Entretien avec Louis-David Benyayer co-fondateur du Think Tank Without Model, à l'occasion du Web2Day, qui se passait les 16 et 17 mai derniers à Nantes. Il participait notamment à la conférence sur l'Economie Innovante.
L'Atelier : Without Model s'interroge sur les modèles économiques permettant de généraliser les initiatives basées sur l'innovation collaborative et responsable. Selon vous, ces modèles ne sont pas encore trouvés ?
Louis-David Benyayer : C'est vrai qu'il y a de plus en plus d'initiatives liées à l'open source, l'open data, le collaboratif (FabLabs, consommation collaborative...) ainsi que des modèles économiques que nous baptisons de responsables. Ceux ci sont basés sur le principe de "shared value", et veulent répondre à des défis sociétaux comme l'accès à l'eau, l'électrisation, etc., tout en poursuivant des objectifs économiques plus classiques (chiffre d'affaires, actionnaires...).
Ces modèles sont une partie de la réponse aux problèmes généraux auxquels nous sommes confrontés et les modèles économiques de ces thématiques sont encore émergents. De nombreuses réflexions seront encore nécessaires pour les pérenniser. Ce qui est sûr, c'est que nous sommes à un moment charnière, et pour nous la viabilité passe par la question du modèle économique.
Difficile donc de se prononcer dès aujourd'hui sur la pertinence d'un modèle plutôt qu'un autre ?
En fait, l'un des constats importants est que nous avons vécu pendant longtemps dans une vision de modèle dominant sur un secteur. Or aujourd'hui la situation change : sur un même territoire concurrentiel il commence à y avoir plusieurs modèles qui existent. Il faut se prémunir d'un modèle mental qui est la prévalence d'un modèle par rapport à un autre. Il faut se dire que l'on va avoir de plus en plus des modèles différents qui se juxtaposent et qui coexistent.
Un bon exemple est l'automobile. Il existe désormais des gens qui fabriquent, qui louent, qui co-partagent, d'autres qui font du co-voiturage. Du côté des fabricants, il existe aussi désormais la voiture hybride. Nous sommes passés d'une situation de modèle dominant (une industrie qui fabrique et qui vend) à une autre où, pour un même besoin il existe désormais des modèles différents. Le premier continue d'exister, mais avec d'autres à ses côtés. Je pense donc qu'il faut fournir des outils pour comprendre, ne pas édicter.
Les grands groupes commencent à s'intéresser à ces modes d'innovation. A votre avis, qu'est-ce qui les motive ?
Là non plus, je ne pense pas qu'il faille établir de pronostic. Plusieurs motivations expliquent cet intérêt : la première est un tropisme certain, un véritable intérêt. Danone en est un bon exemple.
Il y a aussi des raisons liées à la communication, d'autres plus défensives. Certaines entreprises se sentent attaquées par d'autres sociétés, ou par d'autres modèles, et voient là un bon moyen d'innover et de se différencier. On peut aussi citer des raisons d'actions positives, l'envie de faire de ces évolutions une opportunité. Je pense que General Electric, avec son approche de reverse innovation, illustre cela. Ce qui est sûr, c'est que ces acteurs sont loin d'être dans l'inertie !