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De la réparation

Publié le 21 mai 2013 par Pimprenelle2

Supporter, encaisser, feindre de ne rien voir, rien entendre, rien comprendre, rien percevoir, de ne pas être blessée.

Et puis prendre la fuite, dès que l’opportunité se présente, s’en saisir avant que le masque ne se craquèle, que la colère qui voile la peine ne surgisse avec ses flots de je ne sais quoi, de n’importe quoi.

Et marcher comme un automate, enfermée dans sa bulle de grisaille, marcher marcher luttant contre la nausée contre l’envie de courir de semer sa dérisoire peine, que l’on sait ne pas en valoir la peine, que cela ne change rien de fondamental à votre vie, seulement votre décor. Oublier l’autre, les autres, s’oublier soi-même, laisser son corps prendre les commandes, ses pas prendre le pouvoir sur sa volonté, une volonté qui m’a abandonnée.

Et marcher, marcher encore dans une quête inconsciente de réparation, laisser parler ses instincts, retrouver et laisser libre court à sa nature, son besoin de se retrouver, son besoin de se sentir vivante, de se ré approprier ce que vous vous êtes laissé voler.

Entrer dans un magasin dont les rayons n’ont aucun secret, dont le rangement par couleur, par style, par thème, ne peut que rassurer. Et les arpenter la tête vide, un goût métallique dans la bouche, toucher les tissus, caresser les étoffes, se laisser caresser par les velours et les soies, s’emparer de quelques articles, se précipiter en cabine, se déshabiller vite en détournant les yeux du miroir, vouloir être seule avec lui le pantalon, elle la robe. Vite, vite, désaltérer cette soif de posséder, vite vite combler le vide qui s’est creusé.

Rien, rien ne va, tout tout est imparfait, rien rien ne convient, non ce n’est pas ça, toujours pas, tout est de guingois, de traviole, vrillé, mal taillé, de mauvaise facture, moche, nul. La rage émerge contre ce corps qui se rebelle contre ce désir auquel il se refuse, ce désir qu’il ne veut vous laisser assouvir. Il se refuse à l’élégance, à la facilité, aux évidences. Et pourtant, pourtant, il vous faut acheter, dépenser, posséder, de l’inutile de l’irraisonnable du superflu, de la beauté faire vôtre, et retrouver la votre.

La soirée s’annonce, les poubelles se remplissent, les rideaux se baissent. Il est trop tard.

Vous poussez votre porte, la refermez à double tour, vous déshabillez, prenez une douche, précipitez sous la couette, vous y enroulez serré. La plume redessine redéfinit les contours de votre corps, lui transmet son moelleux.Et de nouveau vous avez chaud, vous en avez conscience. Vous buvez du thé, vos boyaux reprennent vie.

Vous vous levez, allez à la recherche de la tablette de chocolat, celle que vous gardez pour les situations graves. Le chat qui vous avez fuie à votre arrivée, se frotte à vos jambes, réclame votre attention, vos caresses, vous souhaite bienvenue chez vous.

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