Tahar Bekri, à la rencontre poétique Tiasci - Paalam, en mai 2013
Publié le 19 mai 2013 par Onarretetout
Tahar Bekri, né en Tunisie, y a connu la prison et vit en France depuis de nombreuses années. Il dit d’abord que les poètes français (Baudelaire, Rimbaud, et d’autres) ont tourné leurs yeux vers l’Orient, et qu’il appartient aux poètes arabes de n’être plus les regardés mais ceux qui regardent. Pourquoi un poète arabe devrait-il se cantonner aux images des déserts ? Pourquoi s’interdirait-il de parler de la neige ? Et, parfaitement bilingue, Tahar Bekri connaît aussi bien la poésie arabe que la poésie française ; il essaie de les unir, de travailler la langue française au rythme de la poésie arabe et réciproquement. Enfin, il estime que le poète a un devoir de beauté, contre la laideur des « identités meurtrières » - pour reprendre les termes d’Amin Maalouf -, contre la violence des tyrans.
Chaque livre de Tahar Bekri explore une question, un sujet. Ce soir-là, il a lu des poèmes de trois recueils : Si la musique doit mourir (et, fait exceptionnel dans les rencontres chez Tiasci – Paalam, cette première lecture a suscité des applaudissements – qui, d’habitude, n’arrivent qu’à la toute fin –), Je te nomme Tunisie (dont l’écriture en Bretagne a coïncidé avec le moment où le jeune Mohamed Bouazizi s’est immolé par le feu), et Au souvenir de Yunus Emre.
Ce dernier recueil vient de paraître chez elyzad, une maison d’édition tunisienne dirigée et animée par des femmes, car, nous a-t-il dit, il est important de faire savoir le rôle des femmes dans la vie sociale, économique et artistique du pays. Yunus Emre est un poète philosophe, soufi, de langue turque (1238 – 1320). Sur les traces de ce poète de l’amour, Tahar Bekri cherche à instaurer un dialogue entre religion et laïcité, entre « le coquelicot fragile / loin des bottes des conquérants » et « le bouleau qui attend le printemps », car « la pluie naît des ciels obscurs / non des ciels purs ».