Benjamin Biolay
ART ROCK 2013 # 5 – Vendredi 17 mai
Indécises ces premières heures à St Brieuc. Où aller, par quoi commencer ? Indécis aussi le temps (un crachin m’accueille au sortir de la gare) comme le ciel (entre bleu clair et gris foncé), comme le prix de la bière (qui a hoqueté de 30 centimes cette année, ça fait cher le rot).
Heureusement, les Bumpkin Island eux n’hésitent pas longtemps à nous mettre dans l’ambiance d’un festival généreux, choral et harmonieux. Première belle surprise que ce collectif du cru programmé chez Dandy Rock le Shop pour deux sessions acoustiques. Il fallait entendre le silence recueilli du public pour prendre conscience que la beauté d’un concert se joue parfois sur le fil avant de choisir le côté lumineux.
Arrivé sur la Grande Scène vers 18h00, je me fais la réflexion que le festival lui non plus n’a pas hésité à rassembler ce vendredi quatre artistes conspués par les haters, quatre victimes de la polémique organisée ces derniers mois dans les milieux autorisés. Y aurait-il du vice chez les programmateurs ? Plus cruelle que le supplice de Tantale (et les bretons en connaissent un rayon) l’affiche de ce vendredi soir s’apparentait à un best-of des cloués au pilori du web. L’occasion idéale de vérifier sur place et de distinguer le bon grain de l’ivraie.
C’est Lescop qui a la lourde tâche d’entamer les hostilités. Lui qui distille un univers sombre et inquiétant est programmé paradoxalement en plein jour, alors que les derniers rayons du soleil donnent des espoirs estivaux aux festivaliers. Sa prestation ne fera pas bouger les lignes : ceux qui trouvent sa musique monotone ou surestimée camperont sur leurs positions. Le set fut carré, compact, efficace, soutenu par une section rythmique sèche et tranchante, au détriment parfois de la voix légèrement sous mixée. Intéressant, peut-être encore un peu modeste pour une grande scène.
Que dire si vous n’y étiez pas ?
« Le guitariste se la joue Strokes des alpages. Et il en fait des caisses. »
Lou Doillon enchaîne et doit elle aussi faire ses preuves, suspecte d’être fille de. L’artiste est sympathique et spontanée, le set un peu scolaire ou décevant, dû à une voix parfois trop nasillarde ou éraillée. L’ensemble peut séduire mais semble encore trop timide pour une Grande Scène.
Que dire si vous n’y étiez pas ?
« Elle avait un drôle de pull Tomboy mais il paraît qu’on a perdu ses affaires dans l’avion »
Alors que le soleil se couche entre en scène un Benjamin Biolay classieux qui va mettre tout le monde d’accord. Premier gros coup de cœur du festival, le chanteur revenu en odeur de sainteté depuis La Superbe propose un set puissant et maîtrisé qui surprend par le travail de relecture des morceaux. Mis en selle par Qu’est-ce que ça peut faire ? le dandy déroule ensuite une sélection des plus beaux morceaux de son répertoire avec élégance et force, épaulé par des musiciens impressionnants d’inventivité. Le climax sera atteint avec un A l’origine apocalyptique qui flirte avec l’artillerie lourde d’un groupe métal sans verser dans la caricature. Soufflant, brillant. Padam pour cerise sur le gâteau et une belle complicité avec le public. L’affaire est dans le sac, hier soir Biolay fut grand.
Que dire si vous n’y étiez pas ?
« Après le concert, on a su que Guingamp passait en ligue 1 »
Si les morceaux épiques et grandiloquents de Woodkid méritent d’être joués sur la Grande Scène, lui non plus ne fera pas bouger les lignes. Si vous avez aimé l’album, vous avez sûrement aimé la prestation. Si vous aviez des réserves, pas de raison que ça change. Hyperbolique, parfois pompier, Yoann Lemoine a délivré un set maîtrisé et efficace. Ni plus, ni moins, l’émotion en option.
Que dire si vous n’y étiez pas ? : Réécoutez le cd et brodez un peu.
Enfin Kavinsky. Trois quatre morceaux histoire de vérifier que le dj drivé connaît bien son Soulwax et son Daft Punk (quoi opportuniste ?) Set club qui fait remuer les teenagers. Je file enfin au Forum mais je rate La Femme.
Que dire si vous n’y étiez pas ? : J’en sais rien je n’y étais pas non plus.
Cette belle première journée se termine en beauté avec ST Lô qui propose une deuxième partie de set électrique et habité. Une belle découverte déjà programmée aux Transmusicales l’année dernière. 3h00, temps d’aller se coucher. Sans hésiter.
Que dire si vous n’y étiez pas ?
a) « J’étais crevé »
b) « J’étais saoul »
c) « Je pouvais pas j’étais à Cannes ».
A demain !