Le CGEDD a publié un rapport sur le protocole technique d'intervention sur les spécimens de loups, le rapport "Lefebvre-Monnier".
Le Conseil général de l'environnement et du développement durable (CGEDD) a publié, le 10 mai, un rapport rédigé par Etienne LEFEBVRE et Alain MONNIER relatif au plan d'action national sur le loup 2008-2012. Ce rapport, rendu en décembre 2012, ne porte que sur une partie du plan d'action national, précise le conseil général, à savoir le "protocole technique d'intervention sur les spécimens de loups". Celui-ci "vise à encadrer les dérogations de destruction de spécimens de loups, espèce strictement protégée notamment au titre de la directive habitats faune flore (DHFF)", rappelle le conseil général.
Au travers de ce rapport, les auteurs de la mission rappellent le statut de l'espèce du loup et dressent un bilan du plan national loup des années 2008 à 2012. Ils répertorient également le point de vue des acteurs rencontrés dans les Alpes et les Vosges.
Par ailleurs, ils émettent des propositions pour le prochain plan loup, notamment concernant l'application de la DHFF. La mission conseille ainsi "d'engager sans plus tarder avec les autres pays membres une discussion avec la Commission européenne". Elle propose également trois orientations à combiner selon les territoires :
- un zonage excluant le loup de certains territoires,
- le classement de l'espèce à l'annexe V de la DHFF, et
- la définition de "situations différenciées" permettant d'adapter au cas par cas sa gestion.
Extraits choisis
A propos du braconnage
" La mission met en garde contre le risque de banalisation de ce prélèvement illégal s’il n’était pas dûment réprimé et si le nouveau plan loup n’atteignait pas son objectif de réduction des dommages aux troupeaux, ce qui est sans doute une condition préalable. La lutte contre le braconnage est le corollaire des options retenues dans le plan loup et assure sa crédibilité, notamment auprès de la Commission européenne.
Aujourd’hui le constat des dégâts aux troupeaux faits tant par les agents de l’ONCFS que par ceux des parcs nationaux tend à les détourner de cette mission première
4. Pour affiner les estimations de braconnage, l’ONCFS doit accélérer ses travaux portant sur la modélisation de la population prévue par le Plan Loup : capture marquage recapture grâce aux signatures génétiques permettant d’estimer sa distribution, sa fécondité, et les taux de survie.
5. La mission recommande d’intensifier la lutte contre le braconnage et pour cela de libérer les agents assermentés chargés du constat des infractions d’une partie au moins de leur charge actuelle de constats des dégâts faits aux troupeaux par le loup, ou de renforcer les équipes les plus concernées. " (page 30)
L'avis de l'ONF à propos du rôle du loup dans l’écosystème forestier
" S’agissant du rôle du loup sur l’écosystème forestier et plus précisément concernant son impact sur les ongulés à l’origine d’importants dégâts aux peuplements, l’Office National des Forêts pour la forêt publique a souhaité formaliser sa réponse :
« L’arrivée du loup correspond au retour dans l’écosystème forestier d’un super prédateur naturel, avec son rôle de régulateur des populations des espèces-proies, mais aussi – via le contrôle des herbivores –, son rôle indirect plus général sur les caractéristiques de l’écosystème, y compris sur le paysage végétal.
Sa présence en forêt peut donc constituer, en complément de plans de chasse adaptés et bien exécutés, un atout pour atteindre l’objectif de retour à l’équilibre sylvocynégétique, affiché dans le contrat d’objectif et de performance de l’ONF 2012-2016 comme une priorité de la gestion dans de nombreux massifs.
L’augmentation des populations d’ongulés (cerf, chevreuil et sangliers) depuis une dizaine d’années, est en effet source de dégâts aux peuplements et notamment aux régénérations. Outre ses incidences économiques (surcoût liés à la mise en place de clôtures ou de protections / retards ou échec du renouvellement), elle constitue un facteur d’appauvrissement des mélanges d’essences, alors que les mélanges sont reconnus comme bénéfiques sur le plan de l’adaptation des forêts au changement climatique.
C’est la raison pour laquelle l’ONF considère que dans un grand nombre de vastes massifs forestiers, la reconquête du territoire métropolitain par le loup s’intègre dans la gestion durable et multifonctionnelle des forêts publiques ». (page 39)
"La nécessité d'une vision prospective"
" La mission réaffirme, comme d’autres avant elle, la nécessité de cette vision prospective et constate qu’elle ne figure pas à l’actuel plan de gestion. Les caractéristiques du loup le rendent pourtant apte à coloniser de vastes territoires où les biotopes lui sont a priori favorables : tous les massifs montagneux et les zones de plaines boisées notamment où les populations d’ongulés sauvages sont nombreuses.
Cependant l’ONCFS dans une de ses analyses reprenant aussi des études du Cemagref a précisé les limites d’un tel exercice de prédiction. Par exemple des modèles intégrant des facteurs tels que la densité relative d’ongulés sauvages, d’animaux domestiques, l’altitude ou la densité humaine s’avèrent trop simplistes eu égard à la plasticité comportementale du loup et à la multiplicité des autres facteurs dont le déterminisme toujours mal expliqué mais pourtant capital de la dynamique de dispersion de l’espèce. La note conclut sur l’intérêt des notions de sensibilité, à commencer par les zones de présence de cheptel domestique en pâturage libre, et d’amélioration des systèmes d’exploitation dès l’apparition des premiers signes de présence de l’espèce. (page 46 : 3.2.1. La prospective est indispensable)