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Comment aider EDF à respecter les engagements de François Hollande sur le nucléaire?

Publié le 18 mai 2013 par Rcoutouly

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François Hollande  avait fixé le cap : la fermeture de la centrale de Fessenheim pendant son mandat et la réduction de 75% à 50% de la part de l'électricité d'origine nucléaire d'ici 2025. Au bout d'un an, l'objectif demeure mais le gouvernement n'arrive pas à avancer dans cette direction. Les résistances sont fortes,  les outils sont inopérants, le débat de la transition énergétique brouille le message. Les renouvelables n'arrivent pas à progresser. Comment redémarrer et lancer efficacement la transition?

Dans le nucléaire, EDF fait, de plus en plus clairement de la résistance en utilisant différentes tactiques. En laissant la CGT-énergie, son allié, occuper le terrain et refuser de rencontrer le délégué interministériel à la fermeture, M Rol-Tanguy, qui a bien du mal à pénétrer sur le site alsacien. En faisant, ensuite traîner en longueur le dossier Fessenheim. Le dossier technique va mettre au moins deux ans à sortir, son instruction par l'Autorité de Sûreté Nucléaire (ASN) en mettre trois de plus. En utilisant des contraintes "techniques", EDF va réussir à ruiner la promesse de campagne de Hollande! Un comble, quand on sait que l'Etat français possède 84% de l'actionnariat de l'entreprise publique!

Pourtant, son PDG, Henri Proglio montre de plus en plus publiquement son opposition: en demandant près d'un milliard par année perdue d'exploitation de la centrale alors que les électriciens allemands en exigent dix fois moins!

Cette exigence d'une indemnisation interroge: EDF exige de l'Etat qu'il compense une perte future d'exploitation pour une entreprise publique auquel la puissance publique a confié des missions d'intérêt général. Elle n'a donc pas, en principe, à chercher à faire du profit.

De plus, l'entreprise publique bénéficie depuis toujours du soutien de l'Etat qui garantit financièrement son activité nucléaire:

-en assurant son activité en cas d'incident ou d'accident nucléaire. EDF n'étant pas assuré en cas de problème, c'est l'Etat et le contribuable qui devront payer. L'Institut de Radioprotection et de Sûreté Nucléaire (IRSN) estime que le coût d'un accident de type Fukushima pourrait nous coûter jusqu'à 430 milliards d'euros (soit le quart du PIB national).

-en garantissant le coût futur du démantèlement des centrales nucléaires: il est inconnu. Corinne Lepage l'estime à 150 milliards. Certains experts allemands parlent de 300 milliards pour un parc quatre fois moins important que le nôtre! Ce qui est certain, c'est que ces chantiers seront longs et très coûteux. Nous n'arrivons pas à démanteler la minuscule centrale de Brennilis en Bretagne (arrêtée en 1992) ou de Lubmin en ex-Allemagne de l'est (arrêtée en 1995).

-en finançant le stockage des déchets radioactifs. L'Agence Nationale pour la Gestion des Déchets Radioactifs (ANDRA) considère que le coût du seul centre industriel de stockage géologique de Bure  sera compris entre 14 et 36 milliards. Il faudra bien que l'Etat, le contribuable ou le consommateur en paient le prix!

Comment l'Etat peut retrouver son autorité sur ce dossier et engager le long et douloureux chemin qui doit mener vers la transition énergétique? Comment démarrer l'inévitable sortie du nucléaire pour les plus anciens réacteurs en service qui ont maintenant plus de trente ans d'exploitation? 

La France doit assumer les choix énergétiques des années Mitterrand (pendant lesquelles la majorité des centrales ont été construites). Nous allons donc en payer le prix dans les décennies à venir alors qu'il faut, dans le même temps, financer la transition vers les énergies renouvelables. EDF réclame une augmentation des tarifs réglementés car, devant les exigences de sûreté, le coût du kilowatt nucléaire ne peut qu'augmenter.

Mais cette augmentation des tarifs pour le consommateur ne garantit pas que l'entreprise publique fasse les efforts nécessaires. Pour permettre à EDF d'avancer vers les objectifs que lui fixe le gouvernement, nous proposons plutôt d'utiliser  la méthode des contributions incitatives.

De quoi s'agit-il? De créer une contribution sur la consommation d'électricité qui pourrait être, dans un premier temps, de 2 millièmes d'euros par kilowatt faisant passer le prix du kilowatt de 0,090 à 0,092 euro (avant impôts). Rappelons que le prix du kilowatt français est un des moins élevés d'Europe. Les Allemands paient plutôt leur kilowatt autour de 0,13 euros, ce qui leur permet de financer leur transition. Cela représente une augmentation moyenne de 10 centimes d'euros par an sur les factures des consommateurs.

A quoi servirait cette contribution? Elle viendrait s'ajouter à la coûteuse CSPE qui finance l'EDF depuis 2003 car elle avait l'obligation de racheter l'électricité du renouvelable à des tarifs réglementés. 

Mais son usage sera très différent: 

-la moitié (O,001 euros/kilowatt) viendra alimenter un fonds dédié au démantèlement des centrales et au stockage des déchets.

-l'autre moitié viendra alimenter un fonds personnel pour le consommateur. Celui-ci verra apparaître sur sa facture le total cumulé de son fonds.  Cet argent servira à financer les investissements dans le renouvelable. Il sera certes symbolique au début mais le sera de moins en moins au fur et à mesure des années et de l'accumulation de l'argent globalement récolté.

Le consommateur pourra l'utiliser pour acheter un équipement personnel (panneaux solaires, mini-éolienne, ...) pour sa maison ou au profit de la copropriété où il habite. Il pourra aussi décider d'acheter des parts d'une entreprise investissant dans les ENR. Il pourra aussi anticiper ses achats en fonction de l'évolution prévisible de son fond personnel, moyennant le paiement d'intérêts.

Cette contribution représente un investissement annuel total de prés de 400 millions d'euros, dont la moitié va être directement orienté vers le financement des ENR. C'est suffisant pour enclencher un cercle vertueux de relance des équipements ENR. La méthode sera beaucoup plus saine que celle du CSPE coûteuse et difficilement prévisible. Le fonds dédié au démantèlement permettra d'amorcer un processus irréversible. Elle mettra EDF devant ses responsabilités. L'entreprise publique  pourra utiliser cet argent uniquement pour le démantèlement des centrales et le stockage des déchets. Sa marge de manoeuvre sera donc contrainte par l'Etat sans la laisser augmenter ses tarifs et utiliser l'argent comme elle l'entend. Cette stratégie aura aussi l'avantage de préserver le principe des tarifs réglementés, laissant la possibilité à l'Etat de limiter la facture pour les citoyens consommateurs.

Cette contribution pourra augmenter dans les années à venir, en fonction des besoins, elle va permettre d'accroître progressivement les prix de l'énergie tout en donnant les moyens à la puissance publique de réaliser les investissements nécessaires à cette transition et de financer les coûts jusqu'à présents cachés ou ignorés de l'industrie nucléaire.

Avec la méthode des contributions incitatives, nous allons enfin disposer d'un outil fiscal et financier adapté à la transition énergétique. Car s'il y a un sujet insuffisamment abordé dans le débat sur cette transition, c'est bien celui de son financement.

Pour aller plus loin:   Comment financer et réussir la transition énergétique?


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