Le secrétaire exécutif de la Convention des Nations unies sur la lutte contre la désertification(CNUCD), Luc Gnacadja et le ministre burkinabè de l’Environnement et du développement durable, Salif Ouédraogo, ont échangé le lundi 13 mai 2013 à Ouagadougou avec les journalistes et les experts de l’environnement sur la situation de la lutte contre la désertification en Afrique. De la régénération naturelle assistée, en passant par le reboisement et l’augmentation du prix de gaz, les participants n’ont pas hésité à aborder tous les thèmes qui ont trait aux problèmes environnementaux de l’heure.
Dans le monde, 25% des terres sont très dégradées et en Afrique, cela représente 50%. Et si la tendance se poursuit, l’Afrique aura 2/3 de ces terres dégradées à l’horizon 2025. Ces chiffres donnés par le secrétaire exécutif de la Convention des Nations unies sur la lutte contre la désertification (CNUCD), Luc Gnacadja le lundi 13 mai 2013, lors d’une rencontre avec la presse à Ouagadougou dénotent de la gravité de la situation des terres dégradées en Afrique. Pour lui, il est temps que le continent trouve des solutions adaptées à ces défis qui se posent actuellement au continent. « On ne peut pas s’autoriser à dégrader des terres sans que cela n’affecte les populations qui dépendent des forêts, de la biodiversité, de l’eau,… Donc dégradation des terres rime avec famine, extrême pauvreté, vulnérabilité à la sécheresse, migration environnementale forcée... », a-t-il déclaré. Il a, en outre, rappelé que d’après la FAO huit (8) des dix crises les plus violentes dans le monde se déroulent dans les zones sèches et pour M.Gnacadja, cela n’est pas une coïncidence. Il se dit convaincu que si l’on analyse ces conflits, dans le fonds, l’on se rend compte que la compétition accrue pour l’accès à l’eau et à la terre fait le lit de ces guerres et d’insécurité alimentaire. En 2030, la demande en alimentation va croître de plus de 50%, la demande d’énergie va accroître de plus de 45% et celle de l’eau de plus de 30%. Ce qui suppose qu’il faudra y faire face en préservant, restaurant et mieux utiliser les terres que l’Afrique possède. C’est pourquoi, le secrétaire exécutif de la CNUCD, Luc Gnacadja a apprécié les bonnes pratiques tel que le Zaï vulgarisé par le Burkina et qui permet aux paysans d’améliorer leurs rendements, de lutter contre l’insécurité alimentaire et la pauvreté. Il a précisé que si les gouvernements africains veulent assurer l’accès à l’eau pour tous, à la sécurité alimentaire, la réduction de la pauvreté et la sécurité énergétique, il faudra investir pour améliorer durablement les conditions de productivité du capital des pauvres. Par ailleurs il a fait savoir que le prochain rendez-vous de la CNUCD va se dérouler à Windhoek, en Namibie du 16 au 25 septembre 2013. « Le Burkina préside depuis 2011, la présidence du groupe africain dans le cadre du processus de la convention et le Burkina aura la charge d’animer le groupe en terme de consensus lors des discussions de la COP11 », a-t-il révélé.
Adopter les énergies renouvelables à la place du gaz au Burkina
Au cours des échanges, les journalistes ont profité de l’occasion pour aborder certains problèmes environnementaux qui ont un effet négatif sur la gestion des terres au Burkina. C’est ainsi que des sujets comme l’augmentation récente du prix du gaz, les effets de l’exploitation minière ainsi que le manque de suivi-évaluation des grandes campagnes de reboisement ont été évoquées. Pour le ministre de l’Environnement et du développement durable, Salif Ouédraogo, l’augmentation du prix du gaz s’est imposée au gouvernement avec les difficultés rencontrées par la société qui en assure la distribution. Un dilemme selon lui s’est donc posé, faut-il maintenir le prix au risque que la société ferme avec son corollaire de licenciés, ou bien fallait-il augmenter le prix pour maintenir la société et garantir l’approvisionnement en gaz ? En tout les cas, il se dit persuadé qu’avec la non-maîtrise des cours du pétrole, le Burkina gagnerait mieux à sérieusement opté sur les énergies renouvelables comme l’énergie solaire ou le biogaz avec le biodigesteur afin de sortir du diktat des lobbies des hydrocarbures. « Un jour ou l’autre, on va y aller, autant le faire donc tout suite », a-t-il souhaité. Il est revenu sur l’exploitation du bois où il estime que comparé à des pays comme le Sénégal où le permis coûte au minimum 30 000 FCFA, le permis de coupe au Burkina coûte environ 3 000FCFA . Ce qui est dérisoire pour l’exploitation d’un produit aussi précieux que le bois. En ce qui concerne les mines, Salif Ouédraogo reconnaît que l’exploitation artisanale est un vrai fléau qui détruit les terres et déstructure les systèmes sociaux. Pour lutter contre ce fléau, il préconise à l’Etat de trouver les moyens nécessaires pour mieux organiser ce secteur. Quant aux mines industrielles, il a reconnu qu’il faut que son ministère renforce les capacités humaines et matérielles du Bureau national des évaluations environnementales afin qu’il puisse mieux suivre et apprécier les études d’impacts environnementaux et sociaux des entreprises minières. Autre sujet qui a alimenté les discussions, c’est le manque de suivi-évaluation dans les grandes campagnes de reboisement. Pour le ministre de l’Environnement, il faut arrêter les slogans tapageurs et adopter des stratégies qui puissent avoir des résultats. C’est pourquoi le ministère va travailler à adopter une nouvelle approche en matière de reboisement. Le ministre Ouédraogo a promis également que son département va se pencher davantage sur les techniques de Régénération naturelles assistée(RNA) et promouvoir beaucoup plus les bonnes pratiques qui ont déjà fait et continuent de faire leur preuve au Burkina.
Raphaël KAFANDO