Prenant et surprenant, le séduisant théâtre de Carole Fréchette...

Publié le 16 mai 2013 par Fousdetheatre.com @FousdeTheatre

C'est toujours un grand bonheur que de découvrir une oeuvre de Carole Fréchette, auteure québécoise dont les écrits sensibles, aux formes singulières, emplis d'humanité, transportent le spectateur dans des mondes parallèles, un brin fantasques et pourtant familiers, le conduisant à s'interroger en douceur sur sa condition. Un bonheur que l'on retrouve une fois encore avec "Je Pense à Yu", présenté aux Athévains, qui fait cohabiter évènements historiques et héros de fiction pure. Fort beau moment porté, entre autres, par l'émouvante Marianne Basler.

Fin des années 2000. La vie de Madeleine, traductrice célibataire un peu paumée, se voit chamboulée par la découverte dans la presse de la tragique aventure d'un journaliste chinois, Yu Dongyue, arrêté et condamné à 20 ans de prison lors des manifestations étudiantes de la place Tienanmen en 1989 pour avoir projeté de la peinture sur le portrait de Mao, puis libéré à l'état de légume 17 ans plus tard. Un oppressant besoin d'en savoir plus sur Yu et les incidents de l'époque la pousse à cesser toutes ses activités. Son voisin, dont elle va faire la connaissance, ainsi que la jeune chinoise à qui elle donne des cours de français, plongeront malgré eux avec elle dans l'Histoire qui éclairera la leur...

"Je Pense à Yu" raconte un destin, un engagement, un geste, un sacrifice. Questionne sa pertinence. La pièce  évoque nos peurs existentielles, les doutes, les blessures qui nous empêchent d'agir, d'avancer dans une vie sans mode d'emploi et souvent chaotique. Elle nous exhorte à trouver la force d'être, une raison d'être, à ne pas faire semblant de vivre.  "Je Pense à Yu" bouleverse.

Dirigée avec une précision chirurgicale par Jean-Claude Berutti, Marianne Basler est une Madeleine intense, profondément imprégnée et perturbée par le cheminement psychologique de son personnage. admirable prestation à laquelle on ne peut qu'adhérer. Antoine Caubet campe avec délicatesse Jérémie, quinqua dans un état similaire à celui de Madeleine, père d'un enfant malade dont il s'occupe seul. Le duo gauche, fragile et complice qu'il forme avec la belle Marianne nous touche. A leurs côtés, Yilin Yang transmet toute son énergie d'actrice à la jeune chinoise immigrée qu'elle incarne, offrant une tirade superbement habitée en fin de représentation.

Allez-y.

Jusqu'au 30 juin.

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Photo : Jean-Louis Fernandez