Une collaboration (alors possible) entre l'armée cubaine et l'armée des États-Unis font prendre le contrôle de la stratégique baie de Guantanamo qu'ils prennent aux Espagnols, une baie profonde de la côte sud de Cuba, dans la mer des Caraïbes. Dès le départ, les États-Unis y installent leur base navale dans la Baie. En 1903, les États-Unis y rédigent un contrat qu'ils forcent les Cubains à signer (peut-être même pas), un bail perpétuel, contre 4 085 $ par an, sur l'entrée et la partie sud de la baie, cette zone ne pouvant être rétrocédée à Cuba qu'avec le consentement des deux parties (et vous croyez que les É-U céderaient vraiment quelque chose?).
Cet endroit est un village complètement Étatsunien dans un paysage cubain qui n'a absolument rien d'Étatsunien. Encore plus depuis 1959, où le régime castriste considère la présence américaine comme illégale et dont le pays tombe sous embargo de la part des États-Unis depuis.
Depuis toujours, Guantanamo était une base militaire, ce n'est que tout récemment que l'endroit a été converti en prison.
Dans les années 90, la base fait ses premières activités non-militaires en accueillant des réfugiés, des fugitifs, des boats people, principalement Haïtiens, pour les "stationner" ailleurs que là où il semblait se destiner: aux États-Unis.
Suite aux évènements du 11 septembre 2001 et dans la foulée de la folle chasse au terrorisme qui a suivi, en Afghanistan et au Pakistan, on arrête des gens jugés louches, malsains ou dangereux et on demande aux États-Unis ce qu'on doit faire d'eux. Guantanamo est choisi dès 2002. Ce territoire pour y placer les "terroristes" que l'on trouvera est juridiquement pratique pour les États-Unis. On n'y applique aucune loi américaine. L'endroit n'est ni totalement cubain, ni entièrement étatsunien, c'est une zone d'ombre parfaite face au droit pénal international. La cour suprême des États-Unis a elle-même jugée que la prison de Guantanamo est illégale.
Le no man's land qu'est Guantanamo devient le trou des gens dont les États-Unis se sont convaincus qu'il ne peuvent pas obtenir le statut officiel de soldat. Les prisonniers de Guantanamo ne sont donc pas considérés comme des combattants "légaux". Un soldat ou même un rebelle d'une guérilla pourrait obtenir le traitement du "prisonnier soldat" et ainsi avoir des droits tel que promis par la convention de Genève de 1949. Le combattant de Guantanamo est considéré comme un "pigiste" du combat. La zone grise est importante. Tout doit être à l'ombre à Guantanamo.
Donc dans un premier temps on ne veut pas leur accorder le statut de prisonnier soldat, mais surtout, on ne veut vraiment pas les amener en sol d'Amérique où les regroupements humanitaires prendraient la défense de certains prisonniers et feraient dérailler le laboratoire de torture qu'y s'y trame.
Car dès le départ, les aveux sous la torture sont légions.
Le risque pour les prisonniers de Guantanamo est de sombrer dans l'oubli. L'Étatsunien moyen regarde ailleurs et si les prisonniers ne font pas une grève de la faim de temps à autre, comme récemment, personne n'osera même penser à eux.
En tant que "combattants illégaux", certains d'entre eux ne savent même pas de quoi ils sont accusés. En théorie, le combattant illégal n'a pas le droit de se défendre, alors la plupart sont gardé là-bas pour avoir attaqué ou avoir répondu à une attaque même si dans les faits, pratiquement aucun prisonnier n'a une accusation claire à son dossier.
Entre 20 ou 25 sont des suspects certains, preuves à l'appui et ne sortiront jamais de l'île. Les autres ont été accusés sur la base de témoignages et d'aveux recueillis sous la torture, ce qui est irrecevable partout dans le monde. Sauf à Guantanamo. Comme le cas d'Omar Khadr l'a aussi prouvé.
Guantanamo est le cul-de-sac certain de 166 condamnés.
Et le terrain de jeu de tout un lot de fêlés.
Même si ça se trouve sur l'île de Cuba, ce n'est pas tout à fait l'endroit pour y passer ses vacances.