L'Europe de l'austérité persiste et signe, et ne craint jamais de tomber encore plus bas. Le chef de l'État français, lui, a choisi le camp de la trahison.
La France est en récession, l'Allemagne n'en est pas loin
Les dernières estimations des résultats économiques de l'Union européenne au premier trimestre ont été communiqués aujourd'hui par Eurostat, et sont en-dessous des prévisions. En résumé : -0,1 % pour l'UE27 (-0,7 % sur l'année écoulée), -0,2 % pour la zone euro (-1 % sur l'année).
Avec deux trimestres consécutifs de contraction (-0,3 % au dernier trimestre 2012 et -0,2 % au premier trimestre 2013) la France entre donc officiellement en récession, sort qu'elle partage avec au moins huit pays de l'Union (sur vingt pays pour lesquelles les données sont disponibles). Des résultats terribles mais aussi tristement prévisibles.
Ce qu'il est également important de noter, c'est que l'Allemagne est elle-même au bord de la récession. Après une contraction de -0,7 % au dernier trimestre 2012, la croissance surnage tout juste à +0,1 % au premier trimestre 2012 (au lieu de +0,3 % prévus). Des résultats prévisibles si l'on se fie à un raisonnement économique rigoureux, les politiques d'austérité condamnant à court terme le potentiel de croissance allemand. La réponse de l'office de statistiques allemand laisse pantois, attribuant ces mauvais résultats à la mauvaise météo du début d'année.
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François Hollande, le Mario Monti français
La rencontre qui a eu lieu à Bruxelles, ce même jour, entre le président François Hollande et le président de la Commission européenne José Manuel Barroso, et les conclusions qui y ont été tirées, paraissent dans ce contexte totalement déconnectées de l'urgence sociale et économique de l'Union. La Commission laisse ainsi deux ans à la France pour revenir sous les 3 % de déficit public, jusqu'à la fin 2015, mais doit en contrepartie « accélérer les réformes structurelles dont dépend la croissance de demain » afin « d'enrayer sa perte de compétitivité pour créer croissance et emplois ». En clair, mener la politique de dévaluation interne déjà mise en œuvre, avec les dégâts que l'on sait, en Espagne, en Italie ou encore au Portugal. Soit, en France, la prolongation des durées de cotisation pour la retraite, la réduction des transferts, la poursuite des coupes budgétaires tous azimuts et des suppressions de postes dans la fonction public.
Le chef d'État français vient de confirmer cette orientation en affirmant que « le temps qui est donné doit être mis au service de réformes de compétitivité ». Une capitulation inédite, au mépris des intérêts du peuple français, et à la hauteur de celles subies dans les pays méditerranéens ces dernières années.
Le gouvernement français, en accord avec Bruxelles et Berlin, entend donc accentuer les politiques à la fois socialement destructrices et économiquement inefficaces et procycliques, qui n'ont d'autre résultat que d'aggraver la crise et ses conséquences sociales. François Hollande a choisi son modèle : il sera pour la France ce que Mario Monti a été pour l'Italie, l'applicateur zélé d'une politique dictée à l'étranger contre les intérêts nationaux.
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Crédits iconographiques : 1. © Daniel Hertzberg | 2. François Hollande et José Manuel Barroso à Paris, le 12 janvier 2013 © AFP/Lionel Bonaventure.