Un concept novateur de long-courrier ŕ grand allongement.
Mises ŕ part quelques études de faisabilité d’avions commerciaux novateurs issues de temps ŕ autre de l’imagination du bureau d’études d’Airbus, la part du ręve n’est plus au rendez-vous. Elle s’est évaporée en męme temps, notamment, que l’espoir de donner un jour un successeur ŕ Concorde. Aussi les rares travaux qui sortent du rang, ces temps-ci, retiennent-ils tout particuličrement l’attention. Comme, par exemple, cet AGA-33 dű aux travaux discrets de François de Watteville, qui se dit tout simplement designer.
Il n’était pas né quand Hurel-Dubois s’efforçait de faire valoir les mérites de l’aile ŕ grand allongement. Ses démonstrateurs bénéficičrent tout au plus d’un succčs d’estime, dans les années cinquante, d’autant que la Caravelle de la SNCASE fut préférée ŕ la proposition ŤHDť. Laquelle intéressa cependant l’Institut géographique national et justifia une courte production en série de l‘excellent HD-34.
Voici le męme principe sorti de l’oubli avec un concept de biréacteur long-courrier d’une masse maximale au décollage de 122,5 tonnes, capable de franchir 6.000 kilomčtres avec 250 passagers. La silhouette est remarquablement épurée, caractérisée par un empennage papillon. Ce dernier permet d’éloigner les dérives du jet des moteurs, permet un intéressant gain de masse …et est plus élégant. Cette derničre précision fait sourire tant elle est inhabituelle dans le monde sévčre des ingénieurs.
Le type de propulsion déroute. En effet, tous les calculs propres ŕ l’AGA-33 sont établis en fonction des caractéristiques du CFM56 alors qu’on attendait plutôt le Leap de nouvelle génération, lui aussi dű ŕ Snecma et General Electric, ou encore le Pratt & Whitney PW1000G. Mais, bien sűr, il s’agit ici d’un concept, sans plus. En revanche, le choix du double pont est intéressant, sur une partie de la longueur du fuselage. L’aménagement de la cabine prévoit des rangées d’un maximum de 7 sičges, moins ŕ l’arričre.
La voilure ŕ grand allongement est droite. Et elle ne permet pas d’atteindre les vitesses de croisičre habituelles des appareils actuels ou en développement d’Airbus et Boeing, priorité étant donnée ŕ l’économie. De ce fait, la traversée de l’Atlantique, note François de Watteville dans sa présentation, exigera une heure de vol supplémentaire. Est-ce pour autant un handicap ? Pas nécessairement, compte tenu de la maničre de traiter les passagers dans les grands aéroports, notamment en matičre de contrôles de sűreté.
La cellule fait principalement appel aux matériaux composites et ŕ l’acier. La masse ŕ vide calculée est de 70 tonnes, ŕ comparer ŕ 110 tonnes pour le 787, ce qui induit une réduction notable de la consommation de carburant. Il est vrai que la masse maximale de 122,5 tonnes constitue un atout solide par rapport aux 199 tonnes du 787. Ce qui revient ŕ dire, jusqu’ŕ plus ample informé, que sur base de l’état de l’art actuel, il serait possible de faire mieux, moyennant quelques concessions dont, on l’a dit, en matičre de vitesse de croisičre.
Bien sűr, l’AGA-33 n’est qu’une étude papier, le résultat de travaux purement théoriques et aucun partenariat industriel n’est engagé pour l’instant par son créateur. Reste le fait que l‘existence-męme de ce concept a quelque chose de rassurant : au-delŕ de la grande actualité du duopole Airbus-Boeing, et sans préjuger des efforts russes et chinois, l’esprit d’innovation demeure une réalité. D’oů le souhait que ces travaux soulčvent l’intéręt, aient une suite.
Pierre Sparaco - AeroMorning