Après vous avoir proposé ici notre chronique de L’affrontement qui se joue actuellement au Théâtre Rive Gauche, place aujourd’hui à l’interview des 2 comédiens.
J’ai eu le plaisir de m’entretenir avec Francis Huster et Davy Sardou quelques jours avant la première. J’espère que cela vous plaira.
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Bonjour tous les 2,
Vous allez être très bientôt à l’affiche de L’affrontement, pouvez-vous nous dire comment vous êtes arrivé sur cette pièce ?
Davy Sardou : Alors moi j’avais vu la pièce il y a 17 ans avec Francis Lalanne et Jean Piat, c’était au festival de Ramatuelle. J’avais adoré. Récemment j’ai tourné un film avec Steve Suissa (metteur en scène de la pièce NDLR) et pendant le tournage j’ai lu une interview de Francis Huster qui parlait de ses projets futurs et qui citait L’affrontement. Et là j’ai fait tilt, car il y a quelque temps je rêvais de remonter ce spectacle, j’avais même rencontré l’auteur aux Etats-Unis. J’en ai parlé à Steve, puis j’ai envoyé un SMS à Francis que je connaissais peu en lui disant, « je suis fan de cette pièce, si jamais vous fêtent des auditions pour Mark Dolson, pensez à moi… Francis m’a répondu gentiment que ce n’est pas lui qui décidait et qu’il fallait me rapprocher du metteur en scène. Nous avons ensuite fait une lecture ensemble qui, je pense, c’est bien passée puisque je suis là aujourd’hui. Voilà comment je suis arrivé sur le projet.
Francis Huster : Moi aussi j’ai vu la pièce il y a 17 ans, et j’avais trouvé les deux comédiens fabuleux. 17 ans se passe, et Jean Piat est venu voir Anne Frank et à la fin de la représentation il a parlé avec Steve Suisse de L’affrontement. Steve s’est vu confier la responsabilité de remonter la pièce et m’a proposé le rôle.
C’est effectivement une nouvelle « version » de la pièce, pouvez-vous nous en parler un peu ?
Davy Sardou : Ce n’est pas qu’une simple reprise, c’est presque une recréation à tous points de vue, que ce soit scéniquement ou dans notre manière d’approcher le texte ou le jeu. Cela reste les mêmes fondations, puisque la pièce est la même, mais la manière dont Steve nous fait projeter le texte est bien différente de ce qui avait été fait à l’époque.
Francis Huster : Cette pièce fait partie comme Trahisons de Pinter des pièces qui ne sont pas seulement à acteurs, mais aussi à public. Cela veut dire que suivant le public tu ne peux pas monter la pièce de la même façon. Cette pièce parle du sacerdoce des femmes, accepté par l’église anglicane et refusé par l’église de Rome, elle parle du mariage des prêtres, elle parle de sujets qui, il y a 17 ans, étaient des sujets dont on avait du mal à croire que ça allait vraiment arriver. Aujourd’hui, il y a déjà un pied dedans, ce qui veut dire que le public va suivre une pièce ou ce qui va l’émotionner beaucoup plus que le texte ce sont les sentiments.
En parlant de sentiment, vous ne vous connaissiez pas avant cette pièce, est-ce important de bien s’entendre dans la vie pour s’affronter sur scène ?
Davy Sardou : Moi, personnellement, j’ai toujours besoin de bien m’entendre avec mon partenaire, que ce soit pour jouer l’amour, la haine ou la tragédie, c’est toujours plus agréable, et surtout en répétition, d’avoir une bonne relation même s’il faut se foutre sur la gueule pendant la pièce. Moi je partais déjà avec un immense respect pour Francis que je ne connaissais pas, mais que je découvre humainement au fur et à mesure des répétitions, et j’ai la chance car ça se passe très bien. Après j’ai déjà malheureusement joué avec des comédiens très difficiles, renfermés sur eux, et je ne sais pas si la pièce peut y gagner.
Francis Huster : Imagine-toi que, après tant d’années dans le métier, je me suis rendu compte d’un truc, ce n’est pas avec ton, ou ta, partenaire que tu joues, c’est avec toi-même. C’est-à-dire que tu commences à répéter un rôle, et tout à coup il te débecte et tu te forces à le jouer, à apprendre le texte, ou a côté, certains comédiens commencent à jouer un rôle et à dire « c’est formidable, c’est magnifique, j’adore », et celui qui se pète la gueule n’est pas forcément celui qu’on croit. Le problème dans un spectacle à 2, c’est qu’il ne te restes qu’une solution pour t’en sortir, celle d’admirer le mec qui joue avec toi. Chaque soir tu le regardes et tu t’oublies toi-même, tu à appris ton texte, tu connais la technique, et tu es heureux de le retrouver devant toi. Dans cette pièce, ce qui est intéressant c’est d’avoir un couple qui, et le public ne se trompe pas, un couple qui ou bien ne peut pas se piffrer, ou bien s’adore, mais avec lequel il se passe quelque chose.
Francis reste un peu dans le même style en sortant d’Anne Franck, vous Davy, vous avez très souvent alterné comédies et rôles plus fort, c’est ce que vous aimez ?
Davy Sardou : Oui c’est l’essence même de ce que j’ai envie de faire et de ce qu’il faut faire, je pense, pour un acteur. Ce n’est pas de s’enfermer dans un style ou dans un registre car c’est un piège trop facile. Je trouve que le métier vous pousse là-dedans d’ailleurs, car si vous avez un succès de comédie, on vous en propose 10 derrière avec le même rôle. La facilité c’est de recommencer et moi j’ai la chance de pouvoir passer d’une comédie d’Éric Assous à un texte de Jean Anouilh, à une pièce de Shakespeare à Tchekhov est une pièce de Bill Davis. C’est vraiment ce que j’aimerais continuer à faire toute ma carrière et je ferai tout pour le faire.
Pour terminer, nous sommes à quelques jours de la première, dans quel état d’esprit êtes-vous ?
Davy Sardou : j’ai très hâte, on arrive là dans les finitions avec le décor, on attend les lumières mais ça frétille et je suis comme un cheval fougueux dans les starting-blocks. J’ai envie d’y aller.
Francis Huster : Moi l’état d’esprit dans lequel je suis c’est que je voudrais que le rêve de Steve Suissa se réalise, c’est-à-dire que le spectacle qu’on va jouer soit celui qu’il imaginait. Je ne veux pas dévier de ce qu’il voulait.
Merci encore à Francis Huster et Davy Sardou pour leur temps et leur grande simplicité.
L’affrontement, Théâtre Rive Gauche, du mardi au samedi à 19h, et le dimanche à 17h30, jusqu’au 30 mai.