Editions : LE MOT ET LE RESTE, Janvier 2013
Bonjour,
On nous a toujours dit, à nous les braves, les éternels théoriciens de l’absurde et du cri de guerre sans résonnance, que la sagesse de l’âme pointe le bout de son nez arrivée à la trentaine… Et même si je me rapproche de la quarantaine plus vite que je ne m’éloigne de mes trente piges, j’avoue enfin ressentir cette douce réaction naturelle au traitement qu’on nous inflige à nous mes néo adultes.
Bon, je ne suis pas sorti d’affaire, je resterai un éternel innocent dans l’âme ou un Benoît Pedretti des plaines mais il est vrai que certaines scènes de la vie quotidienne (bonnes si possible), deviennent de plus en plus exquises. On se satisfait de petites choses, d’instants savoureux qui par le passé, laissaient un goût de plaisir légitime et naturel. A l’époque c’était normal et non imposable. Tandis qu’aujourd’hui, cuisiner un plat découvert le matin même, partir en excursion sans trop savoir où on met les pieds ou terminer un excellent ouvrage deviennent des moments comparables à des petits trésors d’enfance, à des découvertes futiles certes, mais qui nous donnaient l’occasion de se prendre pour un nouveau Christophe COLOMB…
Au diable la fiction, on veut de la passion !
Hier, j’ai terminé le génialissime bouquin de Peter HOOK « Unknown Pleasures, Joy Division vu de l’intérieur » que je ne saurai assez conseiller pour toutes les personnes ayant un penchant pour l’indie rock, le punk, le DIY, la culture rock au sens large, l’Angleterre (la vraie, celle des prolos du nord), et des lendemains de tournée où tu dois te lever pour aller faire le guignol au boulot (du vécu).
Non seulement ce livre est un trésor de vérité sur la vie de groupe indépendant (pas n’importe lequel s’il vous plaît), sur la difficulté de faire vivre un groupe puis lui donner une réelle identité et surtout survivre, oui SURTOUT SURVIVRE. Car comme aime le rappeler Peter HOOK, dans les années 70/80, monter son propre groupe n’était en rien comparable à ce que les « kids » d’aujourd’hui peuvent subir et traverser avant de recevoir les fruits du « succès »*.
Pour les incertains, les neutres ou les sceptiques, petit rappel des faits :
« À la fin des années 1970, inspirés par l’énergie du punk, et notamment des Sex Pistols, Peter Hook et son vieil ami d’école Bernard Sumner, à qui se sont joints Ian Curtis, chanteur-compositeur et Stephen Morris à la batterie, ont démarré un groupe qui, 35 ans plus tard, continue d’influencer la musique pop. Avec quelques instruments rassemblés à la va-vite et un vieux van, voilà les quatre jeunes gars de Manchester et de Salford partis écumer les pubs et les clubs d’Angleterre. Le premier concert sous le nom de Joy Division est catastrophique : la nouvelle basse de Peter Hook est en rade, plus de la moitié du petit public de trente péquins est constituée d’amis de Peter, et une bagarre éclate. Ce n’est pas grave, ils continuent et en 1980, ils sortent deux albums et sont sur le point de tourner en Amérique. Tout s’enchaîne.
Joy Division a métamorphosé le visage de la musique. Parrains de la scène alternative actuelle, les membres du groupe ont revitalisé le rock à l’ère du post-punk, élaborant un son nouveau, sombre, hypnotique et intense, qui influencera The Cure, Morrissey, Radiohead et de nombreux autres.
Peter Hook fut au cœur de ce son nouveau qui définit et inspira une génération, marquée par la mélodieuse ligne de basse de « Love Will Tear Us Apart ».
Dans le même style brut et enlevé de son précédent ouvrage, L’Haçienda, la meilleure façon de couler un club, Peter Hook témoigne de l’histoire intérieure de Joy Division. On plonge littéralement dans l’histoire de ce groupe de légende ! ». (http://lemotetlereste.com/)
Si vous avez peur de revivre ce que vous avez déjà vu dans « 24 HOUR PARTY PEOPLE » et « CONTROL », deux excellents films de l’aveu même du bassiste de JOY DIVISION et NEW ORDER, je vous rassure de suite, ce livre donne une version authentique de la vie du groupe de Manchester et Maccesfield. Une version sans maquillage, sans montage ni mise en scène, une histoire au plus proche de la réalité, rempli d’anecdotes, de situations ubuesques qui rappelleront à tous musiciens des souvenirs de soir de concert, de journées d’enregistrement ou de la vie diaboliquement compliquée d’un groupe indé. Un ouvrage truffé d’anecdotes donc, comme celle d’un soir où JOY DIVISION jouait à Paris avec un Ian CURTIS plus bourré que jamais en train de chercher des putes rue St Denis à Paris, l’apparition d’un petit groupe Irlandais fan de JD au nom inconnu à l’époque… U2. Ou encore la naissance des querelles internes entre Peter HOOK et Bernard SUMNER, d’une vengeance sur les membres des BUZZCOKS, des petites rivalités avec les autres groupes de Manchester…
Oui, ce livre est une pépite, un ouvrage d’histoire qui aurait sa place dans le meilleur des programmes scolaires.
On y découvre le vrai Ian CURTIS, loin de l’image romantique et intellectuelle laissée dans CONTROL, l’apparition de sa maladie ainsi que son évolution inéluctable, mais aussi le rapport que les autres membres du groupe avaient vis à vis de l’attitude du chanteur de JOY DIVISION. On y rencontre un Peter HOOK en pleine thérapie à force d’avancer dans son histoire, nous relatant ses rapports avec Ian, mais surtout se posant cette question: L’insouciance et la naïveté les ont-ils empêchés d’assimiler la réalité sur ce que ressentait et subissait CURTIS, le vrai, l’homme marié, le père de famille, rongé par sa double relation et son épilepsie ?
Ce sera à vous seul de répondre à cette question, une fois le livre refermé.
Mêlé de souvenirs émouvants, drôles, pathétiques, intimes, où il vous arrivera de retenir des larmes, quelles qu’elles soient, entrecoupé de chronologies intercalées et de détails sur chaque chanson de « UNKNOWN PLEASURES » et « CLOSER », ce livre prendra sans aucun doute possible, une place primordiale dans ma bibliothèque.
*succès : Résultat heureux obtenu dans une entreprise, un travail, une épreuve sportive, etc. : Ses efforts ont été couronnés de succès. Faveur, audience accordée par le public : Un chanteur qui a du succès.