[À vous de voir !] L’Écume des jours ou Upside Down ?

Surprise ! 

Non, mon disque dur n'est toujours pas opérationnel mais oui, je ne vous oublie pas. Pour vous le prouver, une petite chronique rédigée à l'ancienne (sur papier !) ce qui, d'ailleurs, m'a rappelé ô combien le support pouvait altérer le processus d'écriture... Ce n'est pas le sujet du jour mais ça pourrait faire l'objet d'un billet à l'occasion. J'y médite du moins ! 

Cette semaine donc, pas de thématique mais un choix on ne peut plus stratégique : en effet, je voulais absolument voir l’Écume des jours mais – mes lecteurs assidus ont pu s'en rendre compte – mes tentatives se sont jusque là toutes soldées par des échecs (le plus cuisant étant celui du maudit 1er mai). Je savais de source sûre – moi-même – que j'en sortirais complètement vide, avec sans doute l'envie de me jeter sous le métro (à Chatelet tant qu'à faire, histoire de bien emmerder tout Paris), j'ai donc ensuite très logiquement opté pour un film qui semblait pouvoir redonner quelques couleurs à mon cœur (ne serait-ce que parce qu'il me rappelait le tube de Diana Ross), j'ai nommé, Upside Down (boy, you turn me !). 
J'attendais beaucoup de l'adaptation du roman de Boris Vian, dont je vous disais le plus grand bien ici, un peu moins d'Upside Down, dont la bande-annonce laissait supposer un tsunami de niaiseries. Et le moins qu'on puisse dire, c'est que mon intuition ne m'a pas trompée.

- L’Écume des jours (Michel Gondry)Une adaptation aboutie dans laquelle Gondry conjugue à merveille son imaginaire avec celui de Vian. Si certains critiquent l'image excessivement saturée par ses trouvailles – au passage, je conseille à ces personnes de relire l’Écume des jours : il y a dix fantaisies par page –, pour ma part, je salue sa généreuse inventivité et les quelques libertés prises qui, combinées à un formidable travail sur la couleur et le son (la bande originale est un délice !) illustrent parfaitement l'univers de Vian. Les effets spéciaux en carton-pâte et stop motion rendent par exemple brillamment compte de la poésie et de l'humour du roman. Le réalisateur insiste également sur l'aspect éphémère du bonheur (thème phare de Vian), la folie (Chick), l'artificialité et le gâchis (les plats de Nicolas), l'absurde et la déshumanisation (la scène de la patinoire) et révèle ainsi, progressivement, l'essence même de l’Écume des jours : le néant. Le but ici n'est pas en effetde faire pleurer dans les chaumières mais d'éprouver ce vide intersidéral, d'appréhender l'être et le néant, comme le confirme d'ailleurs l'omniprésence sartrienne. Seul ombre au tableau, le casting quelque peu inégal : Elmaleh, Maïssa et Le Bon font de pâles Chick/Alise/Isis et Tautou fait du Tautou. Seuls Sy (Nicolas) et Duris (Colin) tirent leur épingle du jeu, à ma grande surprise. En résumé, un bijou volontairement amer, d'une ingéniosité visuelle et narrative folle. Un hommage assurément réussi au chef d'œuvre éponyme.
En deux mots : inventif et mélancolique.Le petit plus : les personnages secondaires de l’Écume des jours auraient pu, à quelques jours près, être interprétés par Léa Seydoux et Jamel Debbouze. Fort heureusement – pardonnez cette prise de position abrupte –, leur emploi du temps respectif les a tous deux contraints à ne pas participer au long-métrage. N'hésitez pas si :

• vous aimez les adaptations cinématographiques fidèles (n'en déplaisent à tous ceux qui clament l'inverse) ;
• le stop motion et le carton-pâte ne vous rebutent pas ;
• vous vénérez Romain Duris (je ne suis pas sa plus grande fan mais je dois reconnaître qu'il m'a bluffée !)

Fuyez si :

• vous n'avez pas aimé La science des rêves ou encore n'aimez pas les fantaisies de Gondry (vous risquez l'overdose !) ;
• vous avez ressenti quelque chose à la fin de l’Écume des jours (auquel cas, vous risquez d'être déçu car Gondry, lui, a je pense fait l'expérience du néant avec ce livre et ne cherche donc en aucun cas l'émotion) ;
• les castings dits "bankables" vous agacent (c'est dommage cela dit de ne pas donner une chance aux acteurs !)

- Upside Down (Juan Solanas)L'impossible histoire d'amour entre Adam, jeune idéaliste qui tente de joindre les deux bouts dans un monde profondément atrophié et Eden, qui profite elle de l'abondance du sien. La particularité d'Upside Down réside dans ce qui lie ces deux macrocosmes antinomiques : un sens de gravité inversé. Si en soi ce Roméo et Juliette à la sauce SF (science-fiction) jouit d'un concept original et pour le moins intéressant, ce dernier est malheureusement, à l'image du maladroit prologue, extrêmement mal exploité. La question sociale, qui pouvait ici revêtir moult intérêts, est par exemple réduite au topos habituel : les riches exploitent les pauvres. En outre, les quelques bonnes trouvailles sont malheureusement noyées dans un scénario sans intérêt, qui accumule les invraisemblances et ne délivre finalement qu'une romance éminemment creuse. D'ailleurs, ni Kirsten Dunst ni Jim Sturgess (pas dans sa meilleure forme !) ne parviennent à sauver cette relation de sa propre platitude. Le spectateur pourra néanmoins trouver quelques onces de bonheur dans le visuel : les plans sont effectivement saisissants et les décors numériques plutôt impressionnants. En résumé, une romance futuriste cul cul la praline qui aurait pu être intéressante si elle s'était davantage axée sur son postulat que sur sa love-story. En deux mots : incohérent et niais.Le petit plus : en matière d'histoire d'amour défiant les lois de la gravité, Kirsten Dunst n'en est pas à son coup d'essai. Souvenez-vous, elle expérimentait déjà le baiser à l'envers dans Spider-Man !N'hésitez pas si :

• vous aimez les histoires à l'eau de rose ; 
• vous ne recherchez pas la cohérence dans un scénario mais plutôt l'émotion ; 

Fuyez si :

• vous attendez un bon film de science-fiction (le postulat est excellent mais malheureusement mal exploité) ; 
• vous n'aimez pas Jim Sturgess (ça ne risque pas de changer, il est affreusement mauvais dans ce film !) ;

Verdict ?Nul doute possible cette semaine, victoire par KO de l’Écume des jours !À vous de voir !