Les victoires économiques de François Hollande

Publié le 10 mai 2013 par Letombe

Après notre billet d’hier sur le Hollande Bashing et les moutons suiveurs - http://www.lekiosqueauxcanards.com/hollande-bashing-les-moutons-suivent et leur propension à suivre les joueurs de pipeau médiatique, insinuant dans l’esprit une campagne aussi nauséabonde que mensongère sur la gestion des finances publiques ; l’un des principaux enjeux de tout gouvernement européen ces prochaines années.

Pourtant, le bilan de la première année de la présidence Hollande est loin d'être totalement négatif en matière de finances publiques. on peut même le créditer de pas mal de victoires...

Des oppositions qui font du vent

Ainsi, pendant que l’UMP couche avec les anti mariage pour tous, tenant ainsi de faire oublier ses dix dernières années de bilan exécrable, pendant que “la gauche de la gauche” se gargarise de grandes envolées lyriques et louchent vers des pays dont elle rêve d’obtenir les mêmes résultats, qu’elle rêve aussi d’ailleurs, puisqu’ils n’existent pas, pendant que le FN sort sa nouvelle campagne sur la démolition des cités “à risque”, oubliant au passage que la loi dite “ANRU” existe à présent depuis de nombreuses années ; la gauche de gouvernement bosse !

Par contre, une constante semble rapprocher toutes les oppositions ; aucune ne s’étend sur son propre bilan. Le Fn oublie la catastrophes des villes gérées, l’UMP se garde bien de revenir sur son bilan nationale et, le FdG, qui n’en a aucun, est partagé en deux ; les communistes gèrent des collectivités locales en bonne intelligence avec le PS, le PRG, EELV ; à telle point qu’à certain endroit, on trouve même une opposition FdG à ces coalitions !

Les FdG non PCF n’ont aucune responsabilité locale ou nationale, dont ils se tournent non sans ridicule vers des pays ayant, selon eux, une gestion en phase avec la leur. Nous avons déjà développé ce qu’il en était dans notre billet : http://www.lekiosqueauxcanards.com/les-joyeux-exemples-de-m%C3%A9lenchon -

Alors ? Nous en sommes où ?

Déjà, reconnaissons que...


...La rigueur française a peu à voir avec les austérités grecque, espagnole, ou britannique


Certes le pouvoir d'achat des ménages a baissé l'an dernier, en grande partie à cause du relèvement fiscal décidé par Nicolas Sarkozy l'année précédente. Qu'aurait-on dit si l'augmentation générale de la TVA pour 11 milliards d'euros décidée par Sarkozy avait bien pris effet le 1er octobre dernier ? A la place, le gouvernement Hollande a préféré une augmentation plus modeste (7 milliards), plus étalée (2014) et circonscrite à des secteurs dont on n'est même pas sûr qu'ils répercuterons cette hausse en inflation de prix sur les consommateurs.

La rigueur française n'est pas austère, mais le redressement des comptes publics reste un objectif central de l'équipe Hollande.

Ce dernier a habilement négocié un report des objectifs de réduction des déficits. La situation économique l'imposait. Son prédécesseur n'avait pas la même excuse. En juin 2007, Nicolas Sarkozy s'était affranchi du retour en-deçà de 3% du PIB pourtant promis trois mois plus tôt. Et la Grande Crise n'avait pas commencé. L'ancien monarque voulait financer son paquet fiscal de l'été.

Six ans plus tard, les caisses sont vides. L'exemple même de Florange - dont la fermeture des hauts fourneaux qui durera deux mois a débuté hier - est symptomatique. L'Etat pouvait - financièrement - envisager une nationalisation temporaire avant un retour à meilleur fortune. Mais aurait-il fallu alors généralisé la démarche à toutes les usines en difficulté ?

Où sont les marges de manœuvre ? Est-on condamné à régurgiter du TINA ?
Or la précarité se généralise. Le pouvoir d'achat est en baisse, modeste en général, dramatique pour les plus pauvres. Un indicateur parmi d'autres, chipé à l'excellent ouvrage de Michel Rocard et Pierre Larroutourou, "La gauche n'a plus le droit à l'erreur", les flux mensuels d'entrées au chômage sont massifs - 400.000 par mois, une secousse que masque le solde net des sorties d'inscription régulièrement publié par Pôle Emploi (quelques dizaines de milliers).

L’ajustement budgétaire est une obligation


Pourquoi ? Parce qu’un défaut de rigueur dans la politique de finances publiques peut conduire à l’inflation, à un effet d’éviction, à l’incertitude et à la volatilité qui ont tous pour effet d’entraver la croissance (cf Gupta, Clements, and Inchauste, 2004). Développons...

Inflation. Une politique de finances publiques aux orientations imprécises, notamment lorsqu’elle est financée par le recours à la «planche à billets», peut provoquer une inflation très forte et volatile. Outre les coûts engendrés, elle a pour effet de saper l’efficacité du régime des prix en poussant les entreprises et les ménages à des décisions malavisées, car ils interprètent les fluctuations de prix comme un changement des prix relatifs. Il en résulte une baisse de la productivité globale (cf Fischer, 1993).

Effet d’éviction. Quand un gouvernement emprunte pour financer une politique de finances publiques mal définie, la hausse de la demande de fonds prêtables peut freiner l’investissement privé (et les autres composantes des dépenses privées sensibles aux taux d’intérêt) en poussant les taux d’intérêt à la hausse. Dans un régime de taux de change flottant, l’augmentation des taux d’intérêt a également tendance à attirer les capitaux étrangers, d’où une appréciation du taux de change qui peut aussi conduire à l’éviction des exportations.


L'endettement génère de plus en plus de pauvreté


Les politiques budgétaires peu rigoureuses ne sont guère viables. Elles impliquent, par exemple, une hausse permanente du niveau d’endettement qui suscite des incertitudes quant à la manière et au moment où la situation sera corrigée (notamment par une poussée inflationniste, une dépréciation mal maîtrisée, des restrictions sur les prix et le commerce extérieur, ou une forte augmentation de la fiscalité).

Ces circonstances freinent l’investissement privé, en incitant les investisseurs à marquer le pas pour voir comment l’incertitude sera résolue, et favorisent parallèlement la fuite des capitaux. L’indétermination des politiques budgétaires peut aussi rendre le climat économique plus volatil (en raison, par exemple, d’à-coups répétés et inopportuns de contraction et d’expansion budgétaire), ce qui peut entraver l’investissement en aggravant les risques et en le focalisant sur le court terme (cf Bernanke, 1983).


Quand faut il mettre en œuvre une politique de rigueur ?

De fait, dans les cas de fort endettement et de déficit élevé, le rééquilibrage des finances publiques peut engendrer une poussée immédiate de la production.

L’assainissement des finances publiques peut alors réduire la prime de risque sur les taux d’intérêt, catalyser l’investissement privé et relever la valeur des actifs. Ceci stimule la consommation privée et atténue les contraintes pesant sur l’offre.

La perspective d’une réduction des dépenses publiques peut par ailleurs inciter le secteur privé à abaisser son estimation des obligations fiscales actuelles et futures, ce qui relance encore la consommation et l’investissement. Outre la taille du déficit budgétaire et la baisse de l’endettement initial, ce qui importe est la composition de l’effort d’ajustement et la manière dont est perçue sa viabilité à long terme.

Ainsi, c’est maintenant qu’il faut mettre en œuvre cette politique et en cela, le traité européen va dans le bon sens.


Mobiliser toutes les ressources ; pour tous et tout de suite


La croissance économique et le développement humain nécessitent la constitution d’un capital humain et matériel qui exige lui-même un niveau suffisant d’épargne nationale. L’épargne du secteur privé étant souvent très limitée dans les pays en développement (notamment dans les pays à faible revenu), les politiques budgétaires peuvent favoriser considérablement la mobilisation des ressources en augmentant les recettes et en réduisant les dépenses les moins productives. Les ressources mobilisées doivent toutefois être investies de manière productive, l’histoire abondant d’exemples d’investissements publics malavisés.

En effet, l’une des principales conséquences de l’assainissement des dépenses publiques dans les pays en développement est l’augmentation de la productivité des facteurs dès lors que les ressources publiques sont dégagées au profit d’un secteur privé plus efficace. L’incidence des dépenses publiques sur l’amélioration de la croissance et du développement humain est fonction de leur efficacité et de leur adaptation aux besoins des pauvres, et pas seulement de leur ampleur.


Adapter les dépenses publiques à la réalité et non plus aux fantasmes


Selon le principe d’efficacité, les dépenses publiques devraient être axées sur les domaines présentant le rendement social le plus élevé et compléter plutôt que concurrencer celles du secteur privé. Ceci signifie qu’il faut financer ou fournir directement les biens publics nécessaires que le secteur privé ne peut offrir dans des conditions satisfaisantes en raison de la défaillance du marché.

Plusieurs catégories de dépenses publiques peuvent influencer la croissance à long terme — en particulier les dépenses d’éducation, de santé et d’équipement — même si les choix les plus judicieux dépendent de la situation particulière des pays. L’accélération de la croissance contribue à son tour à une augmentation des ressources budgétaires qui permet de financer des dépenses productives, ce qui renforce encore le dynamisme de l’économie.

Cependant, les gouvernements essaient souvent de doper la croissance par des subventions à la production et par la fiscalité, par exemple en relevant les tarifs douaniers ou en offrant de généreux abattements fiscaux (plutôt que de réduire les taxes génératrices de distorsions, ce qui serait plus efficace.). Ces mesures ont généralement abouti à des in-efficiences et à des complications administratives et creusé les déficits budgétaires sans pour autant produire les effets escomptés sur la croissance.


La France a apprivoisé les marchés


Au bout d’un an de présidence Hollande, où en est-on ?

La première, c'est que Paris a desserré la contrainte des marchés.

La France a eu beau perdre son fameux triple A auprès de deux agences de notation, elle emprunte aujourd'hui à des taux historiquement bas: 1,8% pour les obligations à 10 ans, 1% en moyenne toutes maturités confondues depuis le début de l'année.

Ce qui pourrait permettre de réduire la charge de la dette de quelques milliards d'euros, comme en 2012. Un situation paradoxale qui ne reflète évidemment pas l'importance de la panne d'activité de la France. D'ailleurs, d'autres pays de la zone euro - dont l'Italie et l'Espagne - bénéficient aussi de la mansuétude des marchés.

Il n'en reste pas moins que les investisseurs considèrent que la signature de Paris garantit un des meilleurs compromis actuel entre sécurité et rendement. D'où son succès, notamment au Japon.


Elle a donné des gages à la rigueur...


Car malgré tout, la France tire les dividendes d'un sérieux budgétaire martelé depuis des mois.

Le gouvernement de François Hollande a en effet opté dès le début pour la voie de la rigueur, avec un premier collectif budgétaire en juin, comprenant 7 milliards d'euros de hausse d'impôts sur 2012. Puis il a accentué l'effort avec le budget 2013 à l'automne, avec un effort de plus de 30 milliards d'euros, dont deux tiers par des hausses d'impôts sur les ménages et les entreprises. Parallèlement, et malgré les doutes qui se multipliaient chez les observateurs, il a affiché sa détermination à respecter quoi qu'il arrive, les engagements pris devant ses partenaires européens.

De fait, il faudra attendre février et les mauvaises performances de l'économie tricolore (croissance zéro en 2012) pour voir l'exécutif abandonner l'objectif d'une croissance de 0,8%, et avec lui la cible d'un déficit à 3% du PIB. Mais le gouvernement n'est pas resté sans réaction: mi-avril, il a adopté un nouveau programme de redressement des finances publiques d'ici à la fin du quinquennat.

Plus réaliste que les précédents, l'exécutif reconnaît que la reprise et le redressement des finances publiques seront plus lents que prévu, puisqu'il prend acte d'un dérapage du déficit à 3,7% du PIB cette année. Et il officialise au passage que le retour à l'équilibre des finances publiques à la fin du quinquennat est abandonné. En revanche il maintient les objectifs de réduction des déficits structurels, dont il aimerait faire la nouvelle pierre de touche pour évaluer le sérieux de sa politique budgétaire.

Moyennant quoi, l'engagement d'un déficit de 2,9% du PIB en 2014 est toujours aussi irréaliste. Car pour y parvenir, "il faudrait au moins 2,5% de croissance l'an prochain", estime Jean-Christophe Caffet, économiste chez Natixis. Or non seulement la France devrait tomber en récession cette année, selon le FMI et la Commission européenne, mais la reprise sera modeste: 1,1% au mieux selon Bruxelles.


... Et obtenu le répit qu'elle demandait à Bruxelles


L'exécutif européen a donc mis fin ce vendredi à ce concours d'affichage officiel de rigueur. Olli Rehn, le commissaire chargé des affaires économiques, a certes qualifié les prévisions du gouvernement français d'"excessivement optimistes" et déclaré que le déficit de la France déraperait à 3,9% du PIB cette année avant d'augmenter à 4,2% l'an prochain.

Mais il s'est aussi montré étonnamment compréhensif. "Etant donnée la situation économique, il serait raisonnable de prolonger de deux ans le délai" pour ramener le déficit à 3% du PIB, a-t-il indiqué. Soit 2015 au lieu de 2013.

Paris n'en espérait pas tant. Le gouvernement œuvrait depuis plusieurs mois en coulisses pour obtenir un sursis d'un an, soit jusqu'en 2014.

Ce qui montre bien que Bruxelles à évolué. La France n'est d'ailleurs pas le premier pays à obtenir un tel sursis de deux ans. L'Espagne aussi a décroché deux ans de plus. "Ce sont des thèses françaises qui ont été entendues. Dans l'équilibre entre la réduction des déficits et le soutien à la croissance, c'est désormais le soutien à la croissance qui l'emporte et c'est fondamental", s'est félicité le ministre français de l'Economie, Pierre Moscovici. Mais l'assouplissement de la position de Bruxelles est-il vraiment à mettre au crédit de la France ?

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