En regardant attentivement sur la carte le trace du jour, j avais le pressentiment que cette etape ne serait pas des plus agreable. Une longue traversee de plaine, des bords de route, voila ce que la carte semblait me promettre. De plus, en me reveillant avant six heures ce matin, depuis mon refuge solitaire, le soleil, tapant deja fort au carreau, me promettait lui une journee tres chaude. Si le printemps semble avoir du mal a s imposer en France, l ete est deja la a Shikoku. Pour la lumiere c est tres bien, pour marcher, c est moins agreable. Mais bon, j entame tout de mme la journee avec entrain.
Apres un semblant de petit dejeuner que j aurai hate de completer ensuite au bord du chemin, je m elance, si je peux dire, en direction du 63e trmple. Il est lui auss coince entre la route et le chemin de fer et pas bien marquant.
J aurai plus de chance avec le 64e, cinq kilometres plus loin. Ses constructions sont modernes, pas toujours tres belles mais l ensemble s etend sur un grand parc agreable. Dans le calme du matin, je peux l apprecier pour moi seul. Je m y promene doucement. Je prends des photos, ce qui me rappelle une rencontre de la veille que j ai omis de relater. En repartant de mon temple refuge, j ai croise un homme d age mur qui montait lui vers le sanctuaire. En discutant un peu, il a l air tout content de rencontrer un francais qui marche sur le chemin et m enjoint de gagner un endroit ou la lumiere esr bonne pour me photographier. A safacon deprendre les cliches, a son vieux nikon argentique, je pense que c est un professionnel. Il semble egalement tout content lorsque, apres m avoir demande si je veux qu il me photographoe avec mon appareil, je lui tends mon reflex. Son good sonne comme une approbation de connaisseur.
24 heures plus tard je prends donc quelques photos en tentant aussi de m impregner de la quietude des lieux car je sais que la journee sera sans autres temples. Le suvant est trp loin, je ne le verrai que demain.
Et le reste de la matinee s etire sur des outes heureusement tres tranquilles, car j prends l itineraire qui evite la grande route, mais dans un decor de plaine agricole pas vraiment enthousiasmant. De plus, la fatigue est tout de meme bien la et ce jour de marche sera long.
Mes points de reperes sont les superettes indiquees sur la carte. Outre qu elles m apportent un peh de fraicheur, j y achete de quoi fournir de l energie a mes muscles affames. Je commence d ailleurs a y avoir mes habitudes. Les chocolats meiji, le cafe au lait froid que j aime curieusement boire ici, intitule cafe au lait en francais, les quelques sushis tout prets.
J en deguste quelques uns dans un parc agreable et tres bien place sur mon parcours sur le coup de midi.
D ailleurs il marque un changement agreable sur mon chemin aujurd hui. A partir de la, meme si le trace pelerin jouae a cache cache avec la voie express dont j entends les grondements jamais bien loin, il travrse une campafne plus verte, des villages plus coquets. Mais c est aussi davantage vallone.
Un petit temple de inventairel supplementaire comme on dirait chez nous m indique qu il m reste une quinzaine de kilometres. Il fait tres chaud et le vent ne souffle pas. Les beaux drapeaux figurants des carpes que je croise souvent restent desesperemment verticaux. Je peine jusqu au bout, seulement distrait par quelques rencontres animales. Un beau heron. J en ai vu des dizaines ici ainsi que grues et cormorans. Un groupe de macaques que je surprends au bord de la route. Ce sont les premiers singes que je rencntre ici. Ils semblent un peu surpris a ma vue, sans doute la barbe!
Les derniers kms en ville sont penibles. Entre les pietons, c est la srte des ecoles et certains ecoliers me disent meme bonjour en francais, les voitures et les tranquilles cyclistes (j ai certes croise des cyclos affutes sur les routes notamment sur le litoral pacific mais la plupart des japonais semblent considerer le velo non comme un sport mais comme un simple moyen dd deplacement. Heureusemnt pour l esperance de vie du pelerin de bord de route il en va de meme pour l automobile) j ai parfois du mal a me frayer un chemin sur la route etroite.
Je suis heureux de trouver le petit hotel ou apres cette journee tout de meme tres solitaire je discute un peu avec la patronne et les deux pelerins presents. Meme si la barriere de la langue limite notre echange c est sympathique. J ai ainsi du mal a comprendre pourquoi la dame me parle dela Hollande qund elle evoque le mot francais, avant de saisir qu elle evoque tout simplement le president de la republique. Il ressemble d ailleurs pamals aux portraits, sourires cravates etrassurants que je vois sur les affiches electorales ici. Sur qu il doit davantge inspirer les japonais par son calme placide que l agite Sarkozy, pas du tout dans le style du pays.
Ils sont bien aurpris de me voir accomplir de pareil distances et me disent ue demain il va pleuvoir et que du coup il marcheront peu. La pluie, un temps pls frais et un parcours a nouveau dans la montagne m apporteront je l espere un regain d energie.
Car c est vrai qu aujourhui, en traversant notamment cette morne plaine, j ai un peu souffert. C est dans ces moments que l etymologie du terme endurance me revient a l esprit.
Mes pensees n etaient pas non plus tohjors tres bonnes. Tournent en boucle mes echecs et mes deceptions. Affectives, comme mes trois grosses deceptions de l an passe et meme amicales quand je me vois par exemple trahi comme recement par des organisateurs d une course dans le sud de la France que je pensais fiables et qui font fie de l honneur et de l amitie.
Mais je devrai plutot penser a ceux qui m ont apporte leur soutient pour cette aventure et a l avenir.
Un ami m a recemment demande ce que je pensais que serait le Sylvain Bazin de dans cinq ans. Je ne le sais pas avec certitudes. Peut etre un peu plus a l abris professionnellement, je l espere plus ou moins meme si le risque est stimulant, un peu moins seul affectivement, c est mal parti, sans doute toujours arpentant les chemins du monde a la recherche d un sens. Sans doute toujors a tenter de vivre pour accomplir mes projets. C est un vrai pari, un defi risque parfois. Je croise beaucoup qui en revent seulement. Il ne faut sans doute pas non plus s y jeter sans reflechir. Quand on me demande "comment fais tu pour te faire payer tes voyages;j ai tendance a repondre que c est tout de meme bien complique et que cela ne releve pas des vacances gratuites mais d un vrai projet.
Aujourhuid etait un jour de doute, comme il en faut sans doute sur ces chemins pas toujours rectilignes que sont les defis et les pelerinages. Mais c est de la aussi que vient la force d avancer, sur le chemin comme dans la vie.