Autrefois
spécialisés dans le traitement (ou plutôt la gestion) des aliénés,
les psys se targuent aujourd'hui de "soigner" tout un
chacun, car comme le dit le Dr Knock, "tout homme bien portant
est un malade qui s'ignore."J'ai un problème...Après tout, c'est vrai, si l'on se
met à décortiquer chaque aspect de notre vie, on est sûr de
trouver au moins un point déconnant, que ce soit dans le rapport à
l'argent, à la nourriture, à la famille, à l'engagement,
concernant l'acceptation de l'échec, du temps qui passe, d'un
travail qu'on aime pas toujours, d'une reconnaissance que l'on estime
insuffisante... Dans ces conditions, les médecins de l'âme jouent
sur du velours. Leur porte est ouverte à tous et l'art qu'ils
maîtrisent le mieux reste celui de fidéliser la clientèle
patientèle.Personne
ne me croit !Il
y a ceux qui souffrent d'un mal sans qu'on puisse mettre un nom
dessus, dont les symptômes sont parfois difficiles à objectiver.
J'ai ainsi connu une jeune femme qui avait une peur panique de ne pas
pouvoir retenir son urine, alors qu'elle ne s'était jamais "oubliée"
et qu'après investigation, aucun problème organique ou fonctionnel
n'a pu être mis en évidence. A ce genre de personnes, les
thérapeutes proposent un "accompagnement". Il s'agit
souvent, comme pour de nombreux autres cas, de laisser le client
patient s'exprimer sur le problème qui le mine, en suggérant de
temps à autres que la vie est faite de risques et qu'il pourrait
être bon d'oser progressivement braver la peur. Faut vraiment avoir
fait de longues études pour pouvoir accoucher d'une analyse aussi
fine !Je
suis triste tout le temps :o(Autre
cause fréquente d'affalement sur un divan, la dépression. En
quelques années, elle est passée du statut de "sujet tabou"
à celui de "maladie du siècle" (aux côtés de beaucoup
d'autres, douleurs lombaires et obésité pour n'en citer que deux).
Personne ne le nie, certains moments de la vie sont difficiles, au
point d'éroder parfois toute volonté, toute capacité de rebond.
Malheureusement, au lieu de s'attaquer à la cause du problème, à
savoir une société qui marche souvent sur la tête (et comme une
caboche, ça ne porte pas de chaussure et bien ça lui fait mal.
C'est pourtant évident !), on se contente le plus souvent de
copier les mauvaises méthodes appliquées dans d'autres spécialités
médicales, on fait du traitement symptomatique : "Allez,
Madame Truc-Chose, deux petites pilules tous les soirs et adieu les
idées noires !"Je
n'ai envie de rien.La
France est dans le peloton de tête de la consommation des
anxiolytiques et psychotropes. Ce qui signifie que les rues de nos
villes et de nos campagnes sont peuplées de zombies anesthésiés au
Pro$ac, au DerØxat ou à
l'Eff∑xor. Ni heureux ni
tristes, ces êtres tiennent sur leurs jambes parce que c'est la
mode, avancent sans réel désir, pour ne pas faire moins que les
autres.J'ai
peur des autres !!Ah
les autres, c'est devenu un vrai problème. On n'ose plus parler à
son voisin de pallier. Si celui-ci frappe à notre porte pour
emprunter un œuf, on se demande s'il n'est pas venu faire le
repérage d'un futur cambriolage. On évite de parler aux gens à
côté desquels on transpire à la salle de sport... Tout ça pour
finalement déplorer, à la trentaine bien entamée, les rapports
humains qui se détériorent et finir à contre-coeur, sur un site de
rencontres. La phobie sociale, elle aussi de plus en plus fréquente,
n'est pas tant la faute des gens qui en sont atteints, que celle d'un
milieu de plus en plus anonyme et donc hostile. La mentalité des
villages peut être pesante, car chacun connait ses voisins et ne se
gêne pas pour commérer dessus. Mais quand on connait les gens, on
craint moins de leur dire bonjour et on ose plus facilement se lier à
eux. Et pas que sur des réseaux sociaux virtuels.Je
suis hyperactif !D'ailleurs,
les nouveaux moyens de communication devraient faire l'objets
d'études quant à leur impact sur l'équilibre mental de leurs
utilisateurs. Lors de sa démocratisation, le téléphone portable
était présenté comme une liberté, celle de pouvoir joindre les
gens sans avoir besoin d'être chez soi ou de trouver une cabine
téléphonique. En pratique, c'est devenu l'obligation d'être
joignable... même au petit coin.Puis
vint l'avènement de l'immédiateté absolue, l' ère du mail
sur smartphone et des "messages push". Et on montre du
doigt ceux qui s'éparpillent ? On les étiquette "bipolaires",
on leur inflige des tonnes d'entretiens dits "thérapeutiques"
et on les bourre de cachetons ?N'avez-vous
pas l'impression que les spécialistes créent la demande de soin qui
les fait vivre ?Et
si au lieu de donner aux gens des moyens artificiels de suivre la
musique, on les aidait à réduire un peu ce rythme endiablé pour
revenir à ce qui est compatible avec l'esprit humain ? Et si,
au lieu d'infantiliser les gens en les diagnostiquant tous névrosés
d'un truc, on les rassurait ? Si on leur rappelait que personne
n'est parfait, que la douleur fait partie de la vie et qu'après le
creux de la vague, les choses finissent par s'arranger, ne les
rendrait-on pas enfin adultes et plus forts ? Nos anciens ne
connaissaient pas les cellules psychologiques, ils ne consultaient
pas un couinothérapeute pour un oui pour un non et pourtant, lorsque
je parle à un papi ou une mamie, j'ai l'impression qu'ils s'en sont
plutôt bien sortis. De deux choses l'une :- soit
des gens comme eux, on n'en fait plus et dans ce cas, dégénérés
que nous sommes, nous ne pouvons rien contre le délitement sociétal
que nous vivons ;- soit
nous pourrions être forts et fiers comme nos grands-parents mais
pour nous rendre manipulables, on s'emploie à nous faire croire le
contraire, parce qu'un bon consommateur est avant tout un
consommateur frustré...Image issue du site Espace renaissance