La question vaudrait bien plus qu'un petit article mais les émeutes de la faim qui ont lieu en ce moment et principalement en Afrique posent un défi inédit aux pays industrialisés...
"La fabrication de biocarburants est aujourd'hui un crime contre l'humanité." C'est Jean Ziegler, le rapporteur spécial des Nations unies pour le droit à l'alimentation, qui accuse les pays développés d'être responsables de l'importante inflation qui touche les denrées alimentaires.
Biocarburants ou Agrocarburants ?
On confond souvent Biocarburants et Agrocarburants. les biocarburants sont issus des ressources naturelles ou encore, de la bio-masse. C'est à dire, le pétrole, le charbon, les plantes... En fait, pratiquement tous les carburants sont des "biocarburants".
Les agrocarburants sont fabriqués eux grâce à des ressources agricoles, notamment, les céréales.
Par convenance, malgré tout, je retiens le terme de "biocarburant", plus parlant.
Pourquoi les agrocarburants sont-ils accusés ?
Les agrocarburants, présentés comme une alternative au pétrole, ont des conséquences très négatives. Ils posent en fait un grave problème : ils entrent en concurrence avec les cultures alimentaires. Plus rentables parce que subventionnées, les cultures destinées à la fabrication de agrocarburants tendent à remplacer les cultures alimentaires, provoquant une raréfaction de produits de base comme le maïs, et donc une augmentation des prix.
"Si l'on veut couvrir 20% du besoin croissant en produits pétroliers avec des biocarburants, comme cela est prévu, il n'y aura plus rien à manger", déclarait récemment le PDG de Nestlé, premier groupe alimentaire mondial, dans une interview au journal dominical NZZ am Sonntag.
"Accorder d'énormes subventions pour les produire est inacceptable moralement et irresponsable", ajoute-t-il, estimant que les millions de tonnes de maïs consacrées aux biocarburants sont autant en moins pour le secteur alimentaire.
Un rapport de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) révèle que les biocarburants auraient en fait des impacts plus importants sur l'environnement que le problème auquel il tente de répondre. Les biocarburants, souvent perçus comme la solution ultime aux problèmes de dépendance énergétique, une nouvelle source de revenus pour les agriculteurs et une aide précieuse dans le combat contre les gaz à effet de serre, pourraient en fait être extrêmement nocifs pour l'environnement et créer une augmentation significative des prix des aliments.
Le Président brésilien défend les "biocarburants"
Luis Inacio Lula da Silva, a récusé, mercredi 16 avril, la thèse selon laquelle le développement des biocarburants contribue à l'augmentation des prix des matières premières alimentaires et à la dégradation de l'environnement. "Ne me dites pas, pour l'amour de Dieu, que la nourriture est chère à cause du biodiesel. La nourriture est chère parce que le monde n'était pas préparé à voir des millions de Chinois, d'Indiens, d'Africains, de Brésiliens et de Latino-Américains manger", a-t-il déclaré lors d'une conférence de presse, à l'occasion de la 30e Conférence régionale de l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO), qui réunit à Brasilia jusqu'à vendredi trente-trois pays d'Amérique latine et des Caraïbes.
A noter que si le Brésil voit avec inquiétude la montée des critiques contre les biocarburants, c'est qu' il est le deuxième producteur mondial après les Etats-Unis. Le géant sud-américain devrait produire en 2008, à partir de la canne à sucre, quelque 20 milliards de litres de biocarburants essentiellement destinés à son marché intérieur.
Pour Jacques Chirac, les solutions existent.
"L'offre de produits alimentaires au niveau mondial est insuffisante.
Je n'ai jamais cessé de me battre contre le gel de la production en Europe et de promouvoir le développement agricole des pays pauvres.
Il nous faudra, demain, nourrir 9 milliards d'hommes. Tout le monde se rend compte, enfin, que l'humanité a besoin de la production de toutes ses terres agricoles. L'autosuffisance alimentaire est le premier des défis à relever pour les pays en développement. Des outils existent. Nous savons tous ce qu'il faut faire : infrastructures rurales, stockage, irrigation, transport, financement des récoltes, organisation des marchés, microcrédit, etc.
L'agriculture vivrière doit être réhabilitée. Elle doit être encouragée. Elle doit être protégée, n'ayons pas peur des mots, contre une concurrence débridée des produits d'importation qui déstabilisent l'économie de ces pays et découragent les producteurs locaux."
Alors, Nourrir les hommes ou les machines ?
Source : le Monde.fr
GC.