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Des hassids et des ailes

Par Mickabenda @judaicine
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On peut être juive ultra-orthodoxe, consacrer sa vie à élever ses enfants, ou à l’étude de la Torah, et faire du cinéma.

C’est ce que prouve la réalisatrice israélienne Rama Burshtein, dont le premier long métrage sélectionné à la dernière Mostra de Venise vient de sortir sur les écrans français.

Le Cœur a ses raisons nous fait pénétrer dans l’intimité d’une communauté fermée, loin des stéréotypes.

Un film sur la communauté juive israélienne ultra-orthodoxe, c’est assez rare. Mais un film pour le grand public réalisé par une femme hassidique, c’est exceptionnel. C’est le cas de Rama Burshtein, devenue très religieuse à 25 ans, après ses études de cinéma, et qui montre dans Le Cœur a ses raisons le fonctionnement et les rites de sa communauté.

Je suis quelqu’un qui raconte des histoires et mon but n’était pas de montrer le monde des juifs hassidiques, mais de montrer mon monde, explique la réalisatrice.

C’est le monde dans lequel je vis, c’est le monde d’où je viens. C’est un monde très humain. Peut-être vu de l’extérieur, il n’a pas l’air aussi humain qu’il est. Donc je voulais montrer mon monde qui est fait d’humanité et surtout de sentiments. Je voulais raconter une histoire de sentiments, parce que, à la base, c’est ça que je suis, quelqu’un qui raconte des histoires.

Entre le cœur et la raison

L’intrigue aurait pu inspirer une tragédie de Racine ou, sur un mode plus léger, une pièce de Marivaux : la jeune Shira, 18 ans, doit se marier bientôt. Mais quand sa sœur aînée meurt en couches, leur mère a une idée : arranger un mariage entre Shira et son beau-frère éploré. La jeune fille va devoir choisir entre le cœur et la raison.

Ce n’est pas arranger un mariage, c’est trouver pour un être humain un autre être humain avec qui être heureux, avec qui avoir des enfants, avec qui passer une vie d’amour et de respect, déclare Rama Burshtein. Donc c’est l’amour qu’elle essaie de trouver, ce n’est pas arranger un mariage. C’est trouver la bonne chaussure à son pied, mais dans un sens sentimental, d’amour.

Le cœur du film est le cœur de Shira. Alors je ne sais pas comment mettre en scène son cœur, comment montrer son cœur. Mais le lieu où ça se passe, c’est son cœur, remarque la cinéaste. Donc on s’est dit quand on est dans un espace clôt sur un écran immense, comment fait-on ?

Mon travail était d’emmener les acteurs, de leur donner de l’air, de leur donner de l’espace. Et lui, au contraire, cherchait à les enfermer dans des pièces sombres en fermant les portes et les fenêtres. Donc on était tous les deux chacun poussé de l’autre côté. Moi, j’ouvrais et lui fermait. Ensuite, franchement, ce n’est pas comme si je n’avais jamais vu de films dans ma vie, d’un seul coup je fais ce film. Je regarde énormément de films, le cinéma me passionne. Donc je savais aussi quelle ambiance je voulais créer, quelle esthétique je voulais pour le film. Je voulais qu’on ressente de l’émotion et que la photo nous la transmette.

Ce premier long métrage, sélectionné en compétition au dernier festival de Venise, a remporté le prix d’interprétation féminine pour Hadas Yaron, la jeune actrice qui joue Shira. Et il a conquis le plus grand public, puisque, avec 182 000 entrées l’an dernier dans son pays, ce film a battu un record de fréquentation pour un film israélien, en Israël.


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