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Le lutin du Picotin est finalement parti ce jeudi 10 janvier, rejoindre un paradis qui souhaitons-le, ressemble conformément à son souhait, au film Hellzapoppin.Capitaine du Montreux Jazz festival depuis sa création en 1967, Claude Nobs a porté un rêve d’éclectisme musical qui sut rassembler la fine fleur des musiciens de la deuxième partie du 20e siècle.Les souvenirs reviennent, du plus récent au plus lointain.Cet été encore, alors que j’essayais de faire découvrir à ma petite famille les charmes pédestres des alpages, je croisais Claude pas loin du Picotin, dans sa vénérable Saab 900 jaune canari, arborant comme il les aimait tant, une chemise Missoni. Pince sans rire, il remarqua l’agrandissement de ma famille et chacun repris son chemin.J’ai découvert le Festival de Montreux en 1985, à l’âge de 15 ans, à l’occasion d’un concert de Keith Jarrett en trio au Casino. Le jazz n’était pas encore une passion et je fus surtout frappé par le retard du concert suite à des problèmes de piano (l’exigence de Jarrett en la matière est à la hauteur de son implication musicale).Le second souvenir musical de Montreux fut un concert de George Clinton, toujours au Casino, qui débuta à 01H00 du matin et dut finir vers 04H00. Au-delà de la musique, je fus bluffé par l’efficacité des techniciens qui transformaient la scène d’une configuration à l’autre, dans un ballet bien réglé.Ce fut un déclic, il fallait que je découvre les coulisses de cette machine à rêves !En 1993, après plusieurs candidatures infructueuses, la réponse positive tombe : je fus chargé, au sein du staff, de placer les chaises pour les concerts au Miles Davis Hall… Le festival venait alors de quitter le Casino pour déménager le Centre des Congrès, un vaste bâtiment de sept niveaux qui accueille trois salles.Un peu dépité, je tombe sur un responsable à qui j’explique que j’aimerais m’investir un peu autrement qu’en plaçant des chaises ! Régisseur de scène, celui-ci me propose alors de m’occuper de l’installation des lumières du Montreux Jazz Café, qui accueille les jams d’after-show. Je n’y connais rien mais accepte bien évidemment.Et c’est ainsi qu’année après année et jusqu’en 2000, chaque été, je rejoignais Montreux pour travailler au sein du Festival. Finissant par intégrer le sein de sein, l’équipe anglaise en charge de la scène principale du Stravinski Hall, en tant que stage crew.Huit années source de tant d’émotions musicales et anecdotes de backstage, que je pourrais y consacrer un blog dédié !Bref, Nobs est mort et pêle-mêle reviennent les souvenirs des fêtes de fin de festival au Picotin ; les archives regardés avec délice, affalé dans l’un des sièges d’avion de sa salle de cinéma ; les courses effrénées dans les coulisses pour apporter à Claude le bon harmonica à l’occasion d’une jam ; les histoires pas toujours flatteuses d’artistes - qu’il vaut mieux garder pour soi ; le concert de Paolo Conte à l’Olympia il y a une dizaine d’années, où ayant eu la chance de croiser Claude par hasard dans Paris, il m’avait invité.Pour conclure, je m’efface devant les paroles de Quincy Jones : "There are no words to express the deep sorrow and hollowness in my heart that comes with news of Claude Nobs' passing. Claude was a valued and trusted friend and brother to me for close to forty years, but he was a valued and trusted friend to jazz and the artists who create it for his entire lifetime. It would be that love and appreciation for our music and the musicians that created it that would lead him to take over the Montreux Jazz Festival, and build it into what I consider to be the Rolls Royce of music festivals.
There is a universal bond that exists between musicians, a short-hand that allows us to communicate with each other on a very unique and spiritual level no matter what the language or background, and Claude Nobs knew all the chords. He was such a devout fan of the music and knowledgeable about it, not to mention a great harmonica player in his own right, that he felt it on the same spiritual plane.
Sinatra once told Basie and me...'live everyday like it's your last and one day you'll be right'. Claude and I lived that to the max. I have a million great memories of spending time with Claude in Montreux at the festival, from co-producing it with him, to conducting Miles Davis’ last concert, to the amazing gatherings of musicians that he has hosted at his chalet, to most recently partnering with him to expand the festival's brand internationally; it will be difficult to imagine him not being there. Our decades long friendship was born of a mutual love of music and life, filled with endless hours of laughter and suitcases of Balik Salmon, and I will miss him like the brother that he was to me. If God created a better friend than Claude Nobs, he or she must have kept them for him/herself." - Quincy Jones, January 10, 2013