Dernièrement, il y a peu de mois le Sénat entamait un débat sur la suppression du délit de raccolage. Le fond du problème étant l’abolition de la prostitution ou son aménagement. De tout ce débat je veux retenir une prise de position que je trouve déplacée de la part d’une femme et qui est un outrage au combat féministe, au combat des droits de l’homme au sens de l’article 18 de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme de juin 1793. L’article 18 en effet stipule :
Tout homme peut engager ses services, son temps ; mais il ne peut se vendre ni être vendu ; sa personne n’est pas une propriété aliénable. La loi ne reconnaît point de domesticité ; il ne peut exister qu’un engagement de soins et de reconnaissance, entre l’homme qui travaille et celui qui l’emploie.
Cette déclaration est l’œuvre des révolutionnaires montagnards, des Robespierre, des Saint-Just, Marat, Jacques Roux, Babeuf,…
Cette prise de position qui m’emplit de rage est celle de la sénatrice E. Benbassa qui à la question de l’hebdomadaire Elle ainsi formulée :
quelle est votre position concernant l’abolition de la prostitution ?
répondait : C’est du prohibitionnisme. Personnellement, je ne suis pas réglementariste. Je pense qu’il faut mener une lutte contre le proxénétisme avec des programmes de prévention, d’éducation et de réinsertion. Mais les personnes qui veulent exercer la prostitution comme métier, c’est leur problème. Je ne suis pas moraliste. La majorité des prostituées dites « traditionnelles » sont françaises et en auto-entreprise.
Des françaises en auto-entreprise ! Vomitive classification et justification du commerce des corps avec les ribambelles de macs qui tournoient comme des mouches sur la bonne viande à étaler ! Je veux répondre comme militant humaniste à notre sénatrice avec cet argumentaire:
Abolir la prostitution, c’est un projet de société progressiste
« Vouloir l’abolition du système prostitueur c’est très simple : c’est demander que la société dans laquelle nous vivons affirme haut et fort qu’il n’y a aucun être humain qui puisse être exclu du droit fondamental de pouvoir dire “non” à un acte sexuel non-désiré. »
C’est prendre en compte des personnes abandonnées par la société depuis des millénaires
« Vouloir l’abolition du système prostitueur, c’est prendre enfin en compte l’existence de personnes en situation de prostitution, abandonnées par la société depuis des millénaires. »
C’est mettre fin à un système marchand violent
« Aujourd’hui, le système prostitueur permet à des hommes maîtres de réseaux de trafics de disposer d’êtres humains, de femmes et d’enfants principalement, d’exercer de la violence sur ces personnes, et de les utiliser comme si elles étaient des marchandises sources de profits sans fin (troisième commerce mondial).
Il permet à des proxénètes qui exploitent et violentent des être humains de s’enrichir.
Enfin, il offre la liberté à des hommes de payer pour acheter le consentement de femmes. Pour dire les choses clairement, il offre à des hommes la possibilité de payer pour acheter l’impunité d’un viol. »
Etre abolitionniste, c’est être opposé aux lois du patriarcat et du marché
« Vouloir abolir ce système entre sans doute en contradiction avec les lois du patriarcat et du marché. Et la prostitution ne disparaîtra pas d’un coup de baguette magique. Ce n’est pas parce que l’on pénalisera le client d’une amende qu’il n’y aura plus de clients (comme criminaliser le viol ne l’a pas fait disparaître, mais est-ce une raison pour ne pas le criminaliser ?).
Mais l’achat d’un acte sexuel reconnu comme un délit, le client ne pourra plus prétendre ne pas savoir qu’il paie pour le consentement d’une femme, donc qu’il le viole.
Il y a un moment où la société, si elle veut que chacun-e de ses citoyen-ne-s ait les mêmes droits, la même liberté, le même accès à la justice, doit dire ce qui est juste, et protéger tous ses membres de la violence. »
La prostitution libre est le fait d’une minorité
« On ne peut envisager de donner la liberté à quelques individu-e-s qui ne représentent nul autre qu’eux mêmes et d’en priver par là-même l’immense majorité de celles et ceux qui sont pris-e-s dans ce système prostitueur, souvent suite à des violences subies depuis l’enfance.
Pour réussir, il faut qu’une loi d’abolition du système prostitueur ne fasse pas dans la demi-mesure : responsabiliser les clients, abolir le délit de racolage, mais encore mettre le paquet sur l’éducation – dès le plus jeune âge – à la véritable liberté sexuelle, dans le respect de la dignité de l’autre.
Il faut enfin mettre des moyens considérables dans une politique d’accompagnement des personnes prostituées qui doivent se voir proposer des alternatives de vie dignes et durables, affirmant leur droit de ne pas subir de violences par nécessité économique. »