Depuis le succès de Slumdog Millionaire, Danny Boyle a fini par devenir l'égal britannique d'un Tarantino, atteignant un statut bien mérité de réalisateur dont tout le monde connait le nom. Preuve en est la bande-annonce de Trance, qui annonce fièrement " le nouveau film de Danny Boyle " et non plus " le nouveau film du réalisateur de Slumdog Millionaire ". Mais bien évidemment, avec une telle renommée, le réalisateur de 28 Jours plus tard est forcément attendu au tournant par plus de monde...
Fidele à ses habitudes, Boyle s'est lance avec Trance dans un genre totalement différent de celui de son dernier film. Après le survival en quasi huis-clos 127 Heures, Trance s'attaque au genre assez galvaudé du thriller à tiroirs. Un genre casse-gueule, qui peut aussi bien donner de très bons films ( Usual Suspects, The Game, Layer Cake) que des " films de petits malins " reposant entièrement sur leur twist final et ne supportant pas un second visionnage ( Sucker Punch ou l'imbitable Revolver). Mais Danny Boyle a depuis longtemps démontré qu'il n'était pas juste un petit malin, et Trance lui permet de s'imposer une fois de plus comme un grand réalisateur.
Trance suit les traces de Simon (James McAvoy), un jeune employé d'une compagnie de vente aux enchères de peintures, qui organise le vol d'un des tableaux en question et tente de doubler ses associés. Malheureusement pour lui, il se prend un coup sur la tête qui lui fait oublier ce qu'il a fait du tableau dérobe. Et comme ses associés ont très envie de récupérer ledit tableau, ils font appel à une jolie hypno-thérapeute (Rosario Dawson) pour tenter d'extirper les souvenirs du crâne de Simon. Mais ce faisant, tous vont découvrir de bien troublants secrets sur Simon. Avec Trance, Danny Boyle va braconner sur les terres du David Cronenberg d' EXistenZ (dont il reprend certains débordements gores) ou du Christopher Nolan d' Inception, en proposant une intrigue à tiroirs où le rêve, les fantasmes du héros et la réalité ne tardent pas à se mêler pour perdre le spectateur, envouté par une réalisation et une bande originale aux petits oignons. Mais contrairement aux deux réalisateurs sus-cités, le but de Boyle n'est pas de questionner notre rapport au réel et au virtuel, mais bien d'explorer la psyché de son " apparent " héros. Pas de fin ouverte ici, donc, tout sera expliqué logiquement par une série de twists bien pensés et pour une fois assez imprévisibles, même pour le spectateur averti. On se laisse balader avec plaisir dans ce jeu pervers où les apparences sont trompeuses et où gentils et vilains ne sont pas toujours ceux que l'on pense.
C'est d'ailleurs une des grandes forces du métrage que de constamment changer de personnage principal, donnant de la consistance au trio de tête l'un après l'autre et changeant constamment notre perception de ceux-ci, sans que cela ne paraisse artificiel ou ne nuise à l'identification. En excellent directeur d'acteurs, Boyle tire le meilleur de MacAvoy, Cassel et Dawson. Mais c'est surtout cette dernière qui remporte le morceau, son personnage devenant petit à petit le pivot central de l'intrigue, jusqu'à un excellent twist n'étant pas sans rappeler dans sa force émotionnelle le final de Sixième Sens (non, il n'est pas question de fantômes ici). Féministe en diable, Trance prône avec finesse et intelligence l'égalité des sexes et met les hommes face à leurs responsabilités sans pour autant être moralisateur.
Nouveau coup de maitre pour Danny Boyle, thriller malin avec un cœur, Trance est une des excellentes surprises de printemps, et enfonce avec aisance la concurrence bourrine et bruyante se bousculant sur les écrans...
Note : 8/10Royaume-Uni, 2013
Réalisation : Danny Boyle
Scénario : Joe Ahearne, John Hodge
Avec: James McAvoy, Rosario Dawson, Vincent Cassel, Danny Sapani