Des artistes font le choix de l’ouverture et du Partage. Sur internet on ne paye et l’on ne payera plus pour consommer, mais l’on paye pour la qualité et l’appréciation que l’on en a eu.
Analyse : quel est ce nouveau concept
Liberté, Communauté, plaisir
L’idée centrale est de permettre à ceux qui le souhaitent de féliciter et de soutenir le travail d’auteurs de contenus qu’ils apprécient en faisant don d’une partie d’une « cagnotte », dont le montant est déterminé par chaque utilisateur. Le principe est donc simple: grâce à un bouton intégré sur le site, l’internaute manifeste sa volonté de remercier l’auteur en cliquant dessus. Chaque membre de Flattr signale ainsi les contenus qu’il a appréciés, et la somme qu’il a injectée dans sa cagnotte se répartit automatiquement et équitablement entre eux.
Flattr se rémunère quant à lui en prenant une commission de 10 % sur les versements.
Toujours dans un esprit communautaire
L’internaute devient un maillon essentiel de leur processus, pour la première fois il n’est pas pris uniquement pour un consommateur, il fait parti intégrante de la communauté.
L’intéressant dans cette démarche, c’est que pour recevoir des dons, il faut tout d’abord créditer un compte afin de donner et participer à la communauté. Cela s’inscrit bien dans une stratégie gagnant–gagnant à développer sur la toile pour favoriser les liens sur internet.
Discussion avec Peter Sunde, l’initiateur de Flattr, ancien porte parole de Pirate Bay
ITW de peter sunde tiré de l'article du 11 février 2011 de Leo Mirani (traduction Thomas Seymat)
Source : OWNI
Ancien porte-parole de Pirate Bay, le Suédois Peter Sunde a décidé de changer de braquet. L’année dernière, il a fondé Flattr, un innovant service de micropaiement à destination des blogs. Il justifie ce choix de la monétisation.
Lorsque le cofondateur d’un des moteurs de recherche de torrents les plus connus du monde parle de la nécessite pour les personnes d’être rémunérées pour leurs créations, c’est d’abord le scepticisme qui s’installe. Pourtant, Peter Sunde, ancien porte-parole de The Pirate Bay, est convaincu que non seulement les gens devraient payer pour ce qu’ils consomment en ligne mais qu’en plus les internautes le veulent aussi.
Flattr, créé par Sunde et Linus Olsson en mars 2010, ouvre la voie. Similaire au bouton “like” de Facebook, Flattr permets à ses utilisateurs de donner une somme d’argent de leur choix aux sites web qui sont membres. Chaque mois, les utilisateurs paient Flattr un minimum de 2€. Ils peuvent “flatter” autant de sites Internet qu’ils le souhaitent et en fin de mois, les 2€ (ou 20€ ou 50€…) sont divisés entre les sites qui ont été cliqués, auxquels on sosutrait 10% de frais. Les utilisateurs peuvent aussi ajouter le bouton Flattr sur leur site.
Le processus est simple, ne requiert qu’un minimum de connaissances techniques et empêche les abonnés de dépenser plus que la somme qu’ils ont prévue. Owni.fr a rencontré Peter Sunde à Bombay, où il assistait à une conférence sur l’archivage, pour lui parler des ses derniers projets et de ses expériences passées.
Qu’est ce qui rend Flattr différent des autres systèmes de micropaiements ?L’idée avec Flattr, c’est de créer un système simple d’utilisation pour que les gens puissent partager de l’argent sur Internet, dans un contexte d’abondance de l’information. On ne peut pas vraiment payer pour tout et ce serait même trop pénible de devoir payer pour tout. Flattr est un système particulier. Nous ne croyons pas que ce soit le système adéquat pour payer pour tout – on a besoin de plusieurs systèmes.
Existe-t-il un nombre suffisant de personnes prêt à payer pour quelque chose qu’ils pourraient avoir gratuitement ?Prenez la Croix Rouge. C’est l’une des plus grandes organisations dans le monde. Ils ont des milliers et des milliers d’employés et ils reçoivent de l’argent. Pour nous, il est clair que les gens sont prêt à donner, c’est juste difficile et compliqué pour eux de le faire.
Mais il existe une différence entre une organisation caritative et un blog.Les gens ont aussi besoin de culture. La culture est un élément tellement important dans la vie de tout les jours que les gens sont vraiment partant pour payer. Ou pour filer un coup de main plutôt que simplement payer. Ils veulent rémunérer les gens pour ce qu’ils créent.
Combien d’utilisateurs sur Flattr ? Et où le service est-il le plus populaire ?Nous avons 70.000 utilisateurs, dont 30% sont des créateurs qui veulent se faire “flatter”. Mais ils doivent aussi dépenser de l’argent. C’est un système égalitaire dans lequel tout le monde doit s’engager et s’investir. Beaucoup de nos membres sont allemands. Les blogs politiques, les podcasts et les médias sont ceux qui se font le plus d’argent. Nous nous sommes rendu compte un jour que deux journaux allemands s’étaient inscrit sur Flattr à juste un jour d’intervalle. Mais ce n’est pas qu’une question d’argent. Il s’agit aussi pour eux de diffuser leurs articles parce Flattr, qui est un mélange de StumbleUpon, du bouton “like” de Facebook et de PayPal, permet de découvrir des nouvelles choses.
Vous préférez ne pas qualifier Flattr de système de paiement. Pourquoi ?Payer nécessite avoir de l’argent ou prendre un crédit. Utiliser Flattr, c’est plus un acte volontaire. C’est davantage un encouragement, ou éventuellement un don. Ca montre aussi une certaine forme de soutien social. Si vous avez 400 “like” sur Facebook, cela veut seulement dire que 400 personnes ont cliqué sur un bouton. Mais avoir 400 “flatteurs” signifie que 400 personnes ont tellement aimé quelque chose qu’ils sont prêt à le soutenir financièrement, ce qui est une grosse différence.
Vous dites aussi que vous ne voulez pas savoir qui donne de l’argent à qui.Si vous en savez trop sur les gens, la gestion devient un problème. Nous ne voulons pas construire un système où nous connaissons tout sur tout le monde. Quand on utilise Facebook, ils savent tout ce que vous faîtes, nous voulons être un contre-poids à cela. En plus, nous n’avons pas besoin de savoir, donc pourquoi devrions-nous essayer ?
Quel futur voyez-vous pour Flattr ?D’abord, on a besoin de devenir très gros en termes de taille. Je veux que les gens soient capables d’en rémunérer d’autres. Un million d’utilisateurs à la fin de cette année (2011) est l’objectif minimal, même si j’espère que le chiffre sera plus proche de 5 millions. Ensuite, je veux introduire un système de paiement direct pour rendre possible l’achat de choses en utilisant Flattr.
Ne pensez-vous pas que ces discours sur la rémunération venant d’un des cofondateurs de The Pirate Bay puissent surprendre pas mal de gens?L’idée de The Pirate Bay n’a jamais été de dire que les choses ne devaient pas avoir de coût. Il s’agissait de faire en sorte que les gens soient capable de partager de l’information, sans se soucier de ce qui était échangé. Sans censure ni filtre, ainsi nous n’introduisons pas de valeurs éthiques ou de moral dans votre vision du monde. C’est simplement une plateforme, rien de plus. Un moyen de transport pour l’information. Et cela ne devrait rien être d’autre. De la même manière qu’un FAI ne devrait pas décider quel site vous pouvez ou ne pouvez pas accéder.
Mais le nom lui-même suggérait le piratage.Un pirate, c’est quoi? La définition vient d’une industrie qui appelle tout ceux qui ne font pas ce qu’elle veut des pirates. Nous avions envie de nous réapproprier ce mot, le rendre cool. Il était plus question de subvertir socialement ce que le mot signifie que de dire: “nous allons voler toutes vos affaires”.
Est-ce que vous pensez que Flattr attirerait autant l’attention si vous n’aviez pas été impliqué dans The Pirate Bay ?Il est clair que non. Et bien sûr, nous en tirons en quelque sorte partie. Ca nous fait économiser en marketing. Je vais dans des conférence, j’y parle de Flattr et on me paie pour ça. Mais je ne considère pas Flattr comme une entreprise comme les autres. Le but n’est pas de se faire de l’argent, l’objectif est de changer les choses. Ce n’est pas une entreprise “non-profit” stricto sensu, mais je la voie plutôt comme une une façon de financer d’autres projets similaires.
Comment vous êtes-vous retrouvé à participer à The Pirate Bay?Au début, j’étais engagé dans Piratbyrån (“le bureau piratage”). En Suède, il y avait l’Antipiratbyrån (le bureau anti-piratage) qui était principalement un groupe de lobbyistes d’Hollywood œuvrant en Suède. Donc des artistes, des hackers, tout ceux qui étaient engagés et intéressés par Internet ont lancé Piratbyrån, qui était alors un projet pour rigoler. Au début, il y avait peut-être 40 personnes qui y travaillaient sur de nombreux projets, l’un d’eux étant Pirate Bay. A l’époque, tout le monde utilisait des connexions directes pour le partage de fichiers, ce qui n’était pas terrible d’un point de vue légal et c’était surtout très lent. BitTorrent était largement supérieur et nous voulions nous assurer que les utilisateurs pouvaient comprendre son fonctionnement et qu’il soit en suédois. En fin de compte, il a pris beaucoup d’importance et est devenu un projet indépendant, séparé du reste.
The Pirate Bay a souvent été menacé d’actions en justice par quelques unes des entreprises les plus puissantes du monde. En tant que leur porte-parole, comment est-ce que vous avez réagi ?On a commencé par faire pas mal de recherches au niveau légal. Et nous avions l’aide de Mikael Viborg, qui est probablement l’une des personnes les plus talentueuses en Suède dans le domaine de la propriété intellectuelle. Nous avons aussi compris qu’une firme américaine ne peut pas venir et citer des textes de droits étasuniens dans une cour de justice en Suède. Nous leur envoyions des cartes montrant où est la Suède et disant « nous ne sommes pas encore partie intégrante des Etats-Unis ». Nous leur envoyions aussi des photos d’ours polaires qui disaient “Vous avez peut-être des problèmes de droit d’auteur mais ici nous avons des problèmes avec des ours polaires qui essaient de nous manger”. Et les entreprises ne savaient pas quoi répondre.
Vous êtes célèbre pour avoir dit que vous préféreriez détruire par le feu tout ce que vous possédez plutôt que de payer l’amende de 3,6 millions d’euros exigé par le verdict de la cour en Suède.Je ne pense pas être coupable de quoi que ce soit. Je n’ai rien fait de mal.
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Crédits photo: Flattr