De façon générale, qu'attendons-nous d'un concert? Tiraillées par l'impression désagréable d'être de grosses connasses qui ne comprennent décidément rien à ce qui se passe, nous avions tout loisir de penser à cette question hier soir. Donc en général, quand on se bouge pour aller voir un groupe sur scène, c'est parce qu'on apprécie sa musique et qu'on aimerait bien le voir en vrai. On aime observer de quelle façon X maîtrise tel instrument, crée tel son, détourne tel bidule... En gros, on aime voir ce pour quoi les artistes sont payés: une démo sincère de leur job. Comme au Salon des Métiers, on décidera sur la base de la prestation si on a vraiment aimé ou pas et basta. Dans le cas du concert de The Knife, ce genre d'appréciation n'avait en fait même pas lieu d'être puisqu'au fond, il n'y a pas vraiment eu de concert. Pas au sens de "je vois les gens sur scène faire ce que j'entends" en tout cas. Grosse déception.
Pourtant, au début du moins, des silhouettes encapuchonnées ont dévoilé des instruments bizarres sur lesquels lesdites silhouettes encapuchonnées n'ont pas tardé à s'acharner (ouverture: "A Cherry On The Top"). Du lourd, du lent, du sombre façon Sunn O))) (avec juste au moins 100dB de moins) - autrement dit, ça semblait bien parti. Et puis non, les 10 millions de personnes présentes sur scène ont fini par enlever leurs capuches et danser, danser, danser, danser, danser, danser, danser, danser, danser,
Ok.
On n'a rien contre les spectacles de danse mais alors vendez-le comme tel! En repartant de Zurich (2h de route quand même) on avait l'impression d'avoir payé pour un Double Whopper alors qu'on nous avait servi un pauvre Cheese. "Le contrat n'a pas été respecté, il y a eu tromperie!" dirait mon prof d'économie. Alors d'accord, la musique électronique n'est pas toujours aisée à incarner sur scène et dans ce cas, le parti pris de danseurs en lieu et place d'un pauvre type qui ne fait rien qu'à presser "play" sur son Mac Book Pro est discutable. Mais l'impression d'avoir été flouées est tenace, surtout de la part d'un groupe avec l'aura de The Knife. Sérieusement, Olof a beau dire qu'"[ils] se sentent plus en sécurité en tribu", on a fini par avoir l'impression qu'aucun des membres du duo n'était véritablement présent sur scène parmi la floppée de guignols dansants. Super les mecs. On atteint des sommets niveau brouillage d'identité - et aussi niveau foutage de gueule. Merci pour rien.
De toute façon dès le moment où c'est devenu évident que tout l'agencement n'était qu'une mise en scène en playback (même quand ils tapaient sur des percus ça ne collait pas) on a décroché. De la part de Beyoncé à l'investiture d'Obama, on s'y attendait un peu. Mais de la part de The Knife, on hurle à la supercherie. D'autant plus que le spectacle a atteint plusieurs pics de ridicule nottamment pendant le chant "en featuring" d'un mec roux projeté sur un écran (façon Battles, tournée Gloss Drop 2011) et pendant l'illustration littérale des paroles de "One Hit" avec des poings levés et tout le tralala. A force, on comprend que des gens du public finissent par mimer la scarification tout en insultant copieusement les suédois. On peut aussi comprendre que ceux qui se sont pris au jeu terminent en extase leur soirée rave/lasers/silhouettes à contre jour. En ce qui nous concerne, on aime toujours la musique de The Knife mais on ne dépensera plus jamais 50 boules pour les voir. Faut pas pousser mémé dans les orties.