« Le drame de la création est d’être identifié, le drame de tout créateur, c’est d’avoir fait une œuvre et que cette œuvre identifie un auteur, que cette œuvre désigne une façon de faire, un style, c’est le drame de toute la création, car finalement faire une œuvre c’est mourir, c’est se donner pour mort, avant la mort n’existait pas car il n’y avait pas de créateur identifié, la mort était souterraine, elle était très présente cependant, elle risquait d’envoyer sous terre le créateur avant sa création, car le créateur croyait que s’il ne créait pas il mourrait, c’est pour ça qu’il s’est mis à créer, pour ne pas mourir, alors qu’il aurait pu ne pas croire à ce qu’il ressentait au fond de lui et rester dans l’ombre, il aurait pu éviter ainsi d’être à découvert, car dès que l’œuvre apparait le créateur est désigné et s’en est fini de lui, on dira toujours que cette création est l’œuvre de cet auteur et que cet auteur est finalement reconnaissable, du coup les créateurs se sont mis à faire diversion, à faire autre chose que des créations qui leur permettrait d’être reconnu, mais ce fut pire, car on disait ceci est bien l’œuvre de ce créateur, cette façon de ne pas y toucher, cette manière de faire semblant, ce petit penchant à se diversifier pour se faire oublier, il ne s’est pas oublié, bien au contraire, il est publié, même si cette publication n’est jamais la même, on reconnaîtra le créateur comme celui qui est toujours jamais le même, celui qui veut surprendre son petit monde, mais personne n’est dupe, pas même le petit monde, le petit monde autour du créateur, personne n’est dupe de son petit jeu de dupe, il est identifié, s’en est fini de lui, le créateur est mort. »
Charles Pennequin, source
[choix de Cyril Anton]