Claude Guéant: ex-ministre payé en espèces non déclarées.

Publié le 01 mai 2013 par Juan

On sait qu'il a tente quelques commerces avec des Etats africains depuis sa retraite politique forcée après les échecs présidentiel (avec Nicolas Sarkozy) puis législatif (à Boulogne Billancourt). Mais là, Guéant avait d'autres explications à fournir quand la police le prit la main dans le sac.
Les policiers ont mis la main sur la trace de quelque 500.000 euros virés de l'étranger dans les comptes de Claude Guéant, ainsi que de substantiels paiements en espèces.
Claude Guéant est un élément clé de l'ancien dispositif du clan sarkozyste. Préfet, il débuta directeur de cabinet de Nicolas Sarkozy quand ce dernier devint ministre de l'intérieur en 2002. Puis il fut secrétaire général de l'Elysée, avant de reprendre lui-même le ministère de l'intérieur.
Du temps de Sarkofrance, il fut cité dans de nombreux documents publiés par la presse d'investigation, dont Mediapart et Le Monde, attestant de son rôle décisif dans les négociations intervenues entre le ministère de l'intérieur français et les autorités libyennes entre 2005 et 2007. C'est dans cette affaire, et dans celle de l'arbitrage Tapie-Crédit lyonnais, que Guéant est actuellement "dans le viseur" de la justice .  En Libye, Guéant a oeuvré pour négocier la libération des infirmières bulgares, mais aussi et surtout vendre des équipements de surveillance à la dictature du colonel Kadhafi.
Dans son édition du 1er mai, dans les kiosques la veille, le Canard Enchaîné balance une sacrée bombinette. Deux perquisitions ont permis deux révélations de taille, "d'une part, un versement sur son compte de 500 000 euros, d'autre part des traces de paiement de factures en liquide pour des montants importants." (Le Monde).
Les explications du ministre sont aussi formidables que sa situation improbable. Et il les a décliné avec une froide détermination sur toutes les ondes (RMC, RTL, Europe 1), toutes les antennes (LCI, Canal+, France 2) et tous les tons.
La première des explications concerne les tableaux,
"Cet argent n'a strictement rien à voir avec un financement libyen. Je répète que je n'ai jamais vu trace de financement libyen soit vers une campagne électorale, soit vers quiconque en France et je n'en ai même jamais entendu parler. Cet argent tient d'une transaction banale d'œuvre d'art. C'est juste le produit de cette vente. J'ai vendu ces tableaux à un avocat étranger. J'ai tous les justificatifs. Tout cela est une affaire privée et banale."
On s'étrangle en lisant l'appréciation - vendre pour 500.000 euros deux tableaux d'un peintre mal coté - serait une affaire "banale". La banalité des pontes de Sarkofrance a quelque chose de formidable. Assez vite, on s'interroge: d'après les experts du marché de l'art, les tableaux du peintre flamand Van Eertvelt se vendent pour largement moins cher.
S'ajoute la seconde pierre, plus troublante et grave, des preuves de paiement en espèces. Les explications de l'ex-premier flic de France sont à nouveau confondantes:
"Les factures en liquide portent sur des montants modestes. Cela vient de primes payées en liquide. Elles n'ont pas été déclarées car ce n'était pas l'usage. A posteriori, on se dit que c'était anormal. D'ailleurs, ça a été modifié."
Notez l'argument: "ce n'était pas l'usage" de déclarer une rémunération ministérielle versée en liquide, une pratique théoriquement interdite depuis 2001. Fichtre ... Et le ministre s'enfonce quand il se justifie au Monde: "Quand je suis arrivé au ministère de l'intérieur, il y avait plus de 400 personnes concernées par ces primes dont le régime fiscal n'était pas défini. J'ai d'ailleurs remis le système à plat pour mettre fin à ces pratiques en 2006." Outre l'origine des fonds, le plus surprenant reste leur non-déclaration au fisc...

Claude Guéant a un très large carnet d'adresses. L'ancien préfet a profité de ses années auprès de Nicolas Sarkozy pour développer ses connaissances et relations dans le monde interlope de la diplomatie et des ventes d'armes. Il a appris à connaître nombre d'autocrates et dictateurs du Moyen Orient ou d'Afrique.  Outre le colonel Kadhafi et quelques-uns de ses proches - dont Bashir Saleh rapidement exfiltré de France quelques heures avant l'alternance du 6 mai 2012 - on peut citer Teodoro Obiang Nguema (Guinée Equatoriale), Ali Bongo (Gabon), Alassane Ouattara (Côte d’Ivoire), Macky Sall (Sénégal) Denis Sassou Nguesso (Congo), Bachar el Assad (Syrie). Il connaît, fréquente et apprécie également les intermédiaires. Ziad Takkiedine était un proche, avant d'être lâché. Alexandre Djhouri est toujours un proche. En septembre 2011, l'homme nous déclarait main sur le coeur que Djhouri, Takkiedine et Bourgi, trois des intermédiaires discrets de nos diplomaties parallèles, étaient "des honnêtes hommes". En avril précédent, le même expliquait qu'Alexandre Djhouri était "utile à la France". On n'en doutait pas.
Des explications peu convaincantes, un milieu interlope, un ancien ministre... n'en jetez plus.
Ami sarkozyste, reviens.
Nicolas Sarkozy pouvait-il ne pas savoir que son directeur de cabinet était payé en liquide ? 

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