Il y a dix-sept ans, ce face à face ecclesiastique musclé imaginé par Bill C. Davis permit à Jean Piat et Francis Lalanne de triompher plus de 700 représentations durant, à Paris et en tournée. De retour au Rive Gauche depuis le week end dernier dans une mise en scène punchy et moderne de Steve Suissa, il révèle cette fois-ci l'évidente et intense complicité du duo Francis Huster-Davy Sardou qui pourrait bien ne pas quitter les planches de sitôt. Alléluia !
Quand un jeune séminariste ayant vécu l'enfer, passé notamment par la prostitution, croise le chemin d'un prêtre plus âgé, installé, fortement porté sur la boisson, ce sont deux façons d'envisager la religion, l'Eglise, la société et la vie qui s'affrontent. D'abord violemment, avant d'opérer un bouleversant rapprochement. Pourquoi refuser aux femmes le droit de sacerdoce ? Et aux prêtres le mariage ? Quid de la position de l'Eglise sur l'homosexualité ? Comment vivre dans le mensonge ? Dans l'acceptation de règles parfois dépassées , dans la soumission à une hierarchie sourde aux maux et à la réalité du monde ? En ayant laissé s'enfuir la foi qui nous guidait ? Et puis a-t-on le droit de renoncer à nos aspirations ? Doit-on prendre le risque de tout foutre en l'air afin de les atteindre ?
Quête de soi ou perte de foi... Tim Farley et Mark Dolson auront besoin l'un de l'autre pour retrouver leur voie. Ce qui ne manquera pas d'arriver au fil de neuf tableaux dialogués avec soin, enlevés, amusants, piquants, prenants, percutants, touchants, et transpirant d'humanité, dévoilant des êtres attachants, aux blessures profondes, renvoyant le spectateur à ses propres choix de vie.
Au sein d'une église contemporaine élégamment designée par Stéphanie Jarre (béton ciré et vitraux rétro-éclairés par des leds), Steve Suissa dirige d'une main de maître ses comédiens. Parvient à contenir le jeu d'un Francis Huster généreux, passionné et donc (parfois) excessif. Ici l'ancien pensionnaire du Français fait montre de sobriété, de nuance, prend son temps pour nous laisser pénétrer l'âme torturée de son personnage. Regards profonds. Silences nourris. Gestuelle des plus précises. Il partage par ailleurs le plateau sans jamais tirer la couverture, et offre à son partenaire une écoute irréprochable. De son côté, jouant les chiens fous en liberté (très surveillée), Davy Sardou épate par l'apparente facilité avec laquelle il déroule un jeu d'une incroyable richesse, se renouvelant à chaque réplique, est force de proposition permanente pour son interlocuteur. "L'Affrontement" de ces deux-là tourne rapidement à la communion théâtrale la plus parfaite. Pour notre plus grand bonheur.
En résumé, un excellent moment de théâtre, aussi fort que divertissant, monté avec rythme et fluidité, porté un bande son ultra présente, et surtout par deux formidables interprètes.
A voir donc...
Au moins jusqu'à l'été.
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L'affrontement from Théâtre Rive Gauche on Vimeo.