Aimé Césaire vient de mourir, mais pas sa poésie, toujours debout, toujours puissante pour peu qu'on prenne le temps de la lire - ou plutôt : de l'écouter (Césaire disait que sa poésie était "plus obscure pour le lettré antillais que pour l'illettré africain").
Petit extrait du Cahier d'un retour au pays natal:
Partir.Comme il y a des hommes-hyènes et des hommes-
panthères, je serais un homme-juif
un homme-cafre
un homme-hindou-de-Calcutta
un homme-de-Harlem-qui-ne-vote-pas
l'homme-famine, l'homme-insulte, l'homme-torture
on pouvait à n'importe quel moment le saisir le rouer
de coups, le tuer - parfaitement le tuer - sans avoir
de compte à rendre à personne sans avoir d'excuses à présenter à personne
un homme-juif
un homme-pogrom
un chiot
un mendigot
mais est-ce qu'on tue le Remords, beau comme la
face de stupeur d'une dame anglaise qui trouverait
dans sa soupière un crâne de Hottentot?