Peu importe finalement… l'origine de la frite n'a que peu d'intérêt. Le sujet le plus intéressant réside dans la manière dont le plat a été "adopté" des deux côtés de la frontière. En France, il se décline généralement comme une garniture, en accompagnement d'une viande, alors qu'en Belgique, il se déguste le plus souvent seul. "Les Belges ont fait de la frite un produit noble, pas un simple légume" estime Albert Verdeyen, cuisinier et co-auteur de l'ouvrage Carrément frites. "Et surtout, nous maîtrisons mieux que quiconque l'art de la double cuisson, afin qu'elles soient dorées et croustillantes."
Ainsi, en France, le bâtonnet de pomme de terre se mange-t-il piqué sur une fourchette dans une assiette, à l'heure des repas, alors que chez nos voisins, il est consommé avec les doigts dans un cornet à n'importe quelle heure de la journée. Sur les places, le long des boulevards ou devant les gares de Wallonie, comme de Flandre, un réseau dense de fritkoten, ou baraques à frites a fleuri. Cinq mille friteries et plus de 90% des Belges y vont au moins une fois par an. Oui, aller à la friterie, c'est le comble de la belgitude. Vous pouvez rencontrer en même temps la petite vieille du quartier qui s'arrête en promenant son toutou, l'étudiant affamé ou le ministre qui habite dans le coin. Mais, à l'intérieur des baraques, les choses changent : les frituriers d'origine étrangère sont de plus en plus nombreux : en témoigne l'entrée du mot frietchinees (friturier chinois) dans le dictionnaire de référence de la langue néerlandaise en Belgique...Fabrice Gil