L'amour et l'argent: la poule et l'oeuf.

Publié le 27 avril 2013 par Orlandoderudder
27 avril 2013

L'amour et l'argent: lequel est la métaphore de l'autre? Ils sont indissociables, de même nature. Nécessaires et utiles en tant que faits sociaux. Mais ils montrent aussi deux façons de traiter l'utilité dans une idéologie qui demeure bourgeoise et le fut avant même que la bourgeoisie se constitue comme elle est. Et s'oblige à mépriser ce qui est utile, bas matériel à ses yeux.

L'amour est devenu sentiment pur: on l'a dissocié du désir, de la reproduction. Ca l'a rendu plus décoratif. Car la bourgeosie, ou ce qui en tenait lieu attache une grande importance à la décoration; Laquelle sert souvent à masquer ce qui est utile. Ce qui n'est pas sans inconvénient. Un exemple en est la plomberie.

La plomberie! Jadis, quand des riches ont installé l'eau courante dans leur belles demeures, ils auraient pu laisser les tuyaux apparents, voire en faire un élément de décoration... on a préféré masquer tout ça. du coup, les tuyaux sont souvent difficilement accessibles et en cas de fuite, on est contraint à une gymnastique parfois pénible. Les plombiers, c'est du peuple, c'est fait pour morfler, à eux les courbatures utilitaires. Les riches montent à cheval et leurs courbatures sont chics!

On a aussi caché le sexe. la reproduction. Le confort sexuel du mariage a permis d'aller plus loin, c'est un capital à intérêt variable, mais qui ressemble au matelas bancaire tranquillos: un "placement de père de famille" qui se méfie des coups en bourse avec des danseuses.

 Seulement voilà...  Il y a l'héritage. la pérennité. Le fief du noble allait au fils aîné. Le cadet desdichado, déshérité, devenait chevalier errant, se vendant à un seigneur, au roi pour guerroyer à son service. Ceci pour l'honneur. L'autre fils devenait moine ou saint! charles de Foucault fut à la fois guerrier et saint: continuité aristocratique, le mysticisme étant d'abord un fait de riches nobles avant de devenir une distraction bourgeoise, avec le luxe du jeûne qui crache dans la soupe en imitant la faim des miséreux.  (l'abbé Pierre est d'origine friquée, Mère Teresa aristo...LEs mystiques, les saints ne viennent que rarement du peuple.Ils représentent une fonction économique et sociale que l'on peut dire bourgeoise).

Seulement voilà, au Moyen Age, l'honneur, c'est une femme et un fief. C'est exprimé clairement et le thème principal de la chanson de geste ou du lai est la revendication du chevalier trouvant que le Seigneur ne l'a pas payé, ou pas assez. Comme les dames de haut parages, en ces temps, étaient souvent veuves, parfois avec des enfants, le chevalier fut considéré: Il protégeait la veuve et l'orphelin, ainsi que leur fric devenant le sien. On pensait que l'amour viendrait avec la vie commune, comme ça se fait avec les enfants, se construisant au quotidien, sur la durée, avec complicité,  tendresse, tout ça... Ce que donne généralement le fric...

 Mais on a voulu s'exalter, dépasser l'utile. Le machisme des artistocrate du Sud a inventé l'amour courtois. La sacralisation de la Dame inaccessible et le viol des bergères. Là encore, ce fut célébré par un genre littéraire, la pastourelle. Le chevalier se balade tranquille.sudain, que voit-il?une jolie paysanne. "Vé la pitchoune", dit -il , car il est Occitan. Il commence par draguer. Si ça résiste, le peuple, on discute. ensuite, on rudoie. Si ça résiste encore, on viole. Parfois, dans la pastourelle,, la bergère crie, les villageois accourent et le chevalier doit fuir lamentablement, à moins de reevoir des coups de bâton.

Penaud, il rentre chez lui, retrouver sa bergère. Qui  ne l'est pas... n'est ni maîtresse ni fauteil,mais un peu des deux: confort! il est rare qu'on célèbre l'amour conjugal. Ca arrive cependant. Il se bâtit pierre à pierre, il est supposé s'accroître comme l'épargne au fil du temps. La pratique de la dot a continué tout ça. Mais au XIXes, la danseuse a remplacé la bergère... Et le chevalier ne fut plus une pute guerrière mais un bon bourgeois respectable, bienfaiteur de Terpsichore...

L'"amour fou", exalté, comme le désir soudain, "irrépressible, pimentait ce confort d'un certain risque. Et DSK aurait pu parler comme Ruy Blas:

"Ah ! Tout perdre en un jour. Pour une amourette avec une suivante, une fille de rien. On m’exile ! Et vingt ans d’un labeur difficile, vingt ans d’ambition, de travaux nuit et jour. Mon crédit, mon pouvoir, tout ce que je rêvais… charge, emplois, honneurs, tout en un instant s’écroule. ...Au milieu des éclats de rire de la foule"

Victor Hugo , Ruy Blas ,  I, 1. 

Beau sujet romantique. Le romantisme a rapporté beaucoup d'argent, beaucoup d'amour. Richissime Hugo.

Consubstancialité du fric et de l'amour... N'aime t-on que le fric, n'aime t-on que l'amour?  Car les moyens subvertissent l'objet, on aime plus le fric que son utilité et l'amour que l'être aimé! Ce qu'on découvre à chaque divorce.

Ce système a des effets tenaces; il se fonde sur l'exploitation du désir masculin. Cette exploitation par assignation au pouvoir, par sacrifice humain car l'homme meurt plus vite que sa "moitié" (guerre  ou usure mentale de l'exercice du pouvoir, travail quand le mâle était seul à bosser au dehors, etc...)... L'obligation de puissance, l'assignation au pouvoir détruit l'homme.en cotrepartie, l'asservissement des femmes pouvait équilibrer ce jeu de morts-vivants. Mais là encore, la poule et l'oeuf se présentent: Etce l'assignation au pouvoir  de l'homme qui crée l'asservissement des femmes ou le contraire?

Je vous aime.