Il y a deux mois, en vagabondant de liens en liens, je me suis retrouvée sur la page facebook d’un truc un peu conceptuel: un multimarques camerounais dédié à la Mode Africaine tendance. Sur le moment, je pense tout de suite à “Temple Muse” ou à “L’Espace”, deux concept stores du même genre qui cartonnent à Lagos, et qui ont participé à l’essor de la création locale. Au Nigéria, ça fait sens d’ouvrir un tel espace, mais à Douala ? Je suis un peu sceptique. Ceci dit, je fouine un peu et puis je tombe sur des photos de la fameuse boutique de Douala. Et là, (très) gros choc. C’est tellement raffiné que je me demande si ça existe bien au Cameroun ou si c’est une image de synthèse. Surprise que personne dans mon entourage ne m’ait parlé de l’ouverture d’un tel lieu de vente, j’en parle autour de moi et visiblement, personne n’était au courant (même les gens vivant sur place). C’est décidé, prochain voyage à Douala, j’irai voir le lieu de mes propres yeux tant j’ai du mal à croire.
Une fois à Douala il y a quelques jours de cela, je pars à la recherche du CARM Store. Le chauffeur qui nous accompagne ne sait pas où c’est, on tourne en rond pendant une vingtaine de minutes dans le quartier, et les passants ne nous sont pas d’une grande aide. Ayant d’autres rendez-vous à honorer, on abandonne…. pour revenir le lendemain. La tenacité aidant, on finit enfin par y arriver. Placée au rez-de-chaussée d’un immeuble fraîchement construit, je reconnais tout de suite la vitrine et bondit littéralement hors de la voiture.
Nous sommes accueillies à la porte par une jeune femme avec un t-shirt noir, portant le nom du magasin. Première impression en entrant: c’est grand, c’est épuré et surtout.. c’est CALME ! Oh bon Dieu, qu’est-ce que ça fait du bien de pouvoir entrer dans une boutique et de pouvoir s’y mouvoir sans être assourdie par de la musique trop forte.
Bien sûr, le merchandising du magasin et le sens du service du personnel sont tellement inspirés des codes du luxe à l’Occidentale que l’on a tôt fait de s’imaginer que la propriétaire des lieux est une trentenaire européenne…. Peine perdue. Il s’agit d’une jeune femme d’origine camerounaise, Carm D.P.
Nous avons passé toute l’après-midi à discuter, et j’ai eu l’occasion d’apprendre tout un tas de choses:
- la boutique a ouvert fin 2012
- Carm D.P. est diplômée en Design de chaussures. Elle dessine et supervise la production de sacs à main et chaussures, sous deux marques: MIAW (Made in Africa Wonderland) et Must Hav. Le Cameroun a-t-il trouvé son Christian Louboutin au féminin (ou sa Tamara Mellon, fondatrice de Jimmy Choo) ?
- Les prix pour ses propres créations ne dépassent pas les 65.000 FCFA (soit 100 euros)
- Elle a participé à la campagne Kickstarter de Fashizblack (via sa soeur)
- Elle stocke différents designers camerounais dont Messanga, Koloba Paris ou encore Rodrigue Tchato
- Elle prévoit de cesser de commercialiser MIAW et de se concentrer sur le développement (à l’international) de la ligne “Must Hav” qui, pour moi, a un très grand potentiel
- elle utilise du véritable cuir et tous ses ateliers de fabrication sont au Maroc
Elle m’a présenté (en exclu ! hé hé) les pièces de sa prochaine collection, prévue dans moins de six mois, à voir plus bas:
Pour ce qui est du plus croustillant (comment elle en est arrivée là, son parcours, le profil de sa clientèle etc..), il faudra être un peu patient les amis. J’ai gardé le meilleur pour un des prochains numéros de FASHIZBLACK, dans lequel on rentrera dans les détails. Sachez juste qu’elle a accueilli de nouveaux designers camerounais et africains, et surtout qu’elle a un plan bien défini de ce qu’elle veut faire. J’ai adoré papoter avec elle et son staff, nous avons visiblement à peu près les mêmes références, perceptions et ambitions concernant la mode camerounaise/africaine.
Vous pouvez consulter la page Facebook du magasin en cliquant ici.
C’est donc ici que se termine ma trilogie “Made in Douala“. J’espère que par ces quelques articles, je vous aurais un peu fait sentir cette petite brise de renouveau que j’ai perçu sur place. D’ici là que la brise se transforme en tsunami, on a encore énormément de choses à faire, mais au moins on sait qu’il y a des choses qui se passent… notamment, grâce à une jeune génération qui a souvent le même profil d’ailleurs, qu’elle soit de la diaspora qui rentre au bercail ou non. Je ne sais trop comment ça s’est fait, mais je me retrouve aujourd’hui à être un peu une espèce de “carrefour” de l’information sur les innovations locales. Je ne peux donc pas tout évoquer, mais il y a un nouveau fournisseur internet sur le point de se lancer avec une offre incluant plusieurs services pour les clients, ou encore l’arrivée d’ici un mois du site “Mboa Urban Music“, qui se veut le 1er portail qualitatif sur les musiques urbaines camerounaises (Afropop, Hip Hop, R&B, Soul..) qui regorgent de talents en attente d’être découverts. Il y a également des personnes qui travaillent à des solutions mobiles pour faciliter la vie des habitants…. bref ! J’espère de tout coeur que cette impulsion est là pour durer, la ville de Douala (et le Cameroun en entier) ne pourront qu’en bénéficier.
Comme dirait l’autre, gardez l’oeil ouvert et de préférence, le bon