C’est l’histoire d’un mec qui s’étonne de remplir la salle de concert française la plus emblématique alors qu’il est l’un des meilleurs rappeurs de l’hexagone. Ce mec c’est Disiz et cette salle de concert c’est l’Olympia. Et on y était.
Le mardi 23 avril restera à jamais une date mémorable dans l’histoire des concerts de rap français. En effet, tout, du début à la fin fut bien maîtrisé. Mais commençons par le commencement. Qui dit concert à L’Olympia dit première partie. En charge de cette lourde tâche, deux jeunes rappeurs : Tito Prince, un proche de Ol Kainry, et 3010 (tiens tiens encore lui). Les deux prestations de chacune un quart d’heure furent excellentes, menant à bien leur objectif : chauffer le public. 3010 y parviendra en reprenant les titres chantés une semaine plus tôt sur la scène gratuite de L’International ( « Mes deuils », « Regarde ma paire », « Pas en club nous » et bien sûr son célèbre « Lamborghini-Twingo »), le tout entrecoupé de multiples « Ici c’est Paris ». Dans le public, des connards – car il y a toujours des connards dans le public – profitent de l’aubaine pour entonner des « Nous c’qu’on veut c’est Victoria Beckham, Victoria Beckham ! ». La soirée était définitivement lancée.
Boxeur, couilles et crocodile
Car un peu après 21h, les « Disiz, Disiz, Disiz » du gros millier de spectateurs accouchèrent de l’arrivée en trombe sur scène de Sérigne. Imposant. Déjà. Il faut dire que le rappeur d’Amiens s’est étoffé physiquement en même temps que musicalement. Le premier titre interprété est logiquement Actarus, car oui Disiz sera bien le personnage central de son concert comme Actarus est le personnage central du manga Goldorak. Le ton est sûr, la voix forte mais bien posée. On comprend dès les premières notes que le show sera bouillant et parfaitement assuré. Après Actarus, ce sont Everything, Cœur gangster et C’est ma tournée, tous issus de son dernier double projet Extra-Lucide qui s’enchaîneront dans la folie ambiante. Le public est extrêmement réceptif et joue à merveille son rôle : il connaît par cœur les paroles de Disiz, et le MC en joue beaucoup. Il laisse une grande place à son public qui back parfaitement bien. Si l’audience participe beaucoup que dire du DJ, homme à tout faire et pote de Disiz, Dave Doe ( « mon gars Veda » dans Life is good ) qui n’hésite pas à prendre le micro et à chauffer le public. Sur scène, on retrouve également les musiciens du rappeur : un batteur, un bassiste et un mec au clavier. La présence d’une batterie et d’une basse va transformer Disiz en Peter Punk. Il y a du rock dans son rap et du rock dans son rap. Et ça, Disiz (ou Peter Punk on ne sait plus) est le seul à savoir le faire. D’ailleurs, il chantera deux titres de son album ‘rock’ Dans le ventre du crocodile, la chanson éponyme et La Luciole. En fait, Disiz fera une revue de tous ses plus gros succès, de l’an 2000 à aujourd’hui. Au programme et dans l’ordre d’interprétation, on retrouve Un frigo, un cœur et des couilles et Bête de bombe 4 de Lucide (2012), Inspecteur Disiz tiré de Les histoires extraordinaires d’un jeune de banlieue (2006), son titre phare et célébrissime J’pète les plombs extrait du Poisson rouge (2000) et bien sûr la plupart de ses tracks d’Extra-Lucide comme Porté disparu, Salaud de pauvres, Vide, Les moyens du bord, Best Day, Mes Bienveillants, Life is good. Mais Disiz offre surtout à son public venu en masse des chansons tirées d’aucun album, juste de son projet « Vendredi c’est Siz-di ». C’est le cas pour Shadow Boxing où pour un souci de mise en scène un boxeur accompagné d’un punching-ball feront leur apparition dans un coin de la scène et pour Auto-dance.
Danse, mer et invités
Revenons à Auto-Dance justement dans la mesure où ce titre est symbolique de l’état d’esprit de Disiz. En effet, nul ne manie l’auto-dérision aussi bien que lui. C’est aussi le cas dans Life
Autre aspect du concert, la facilité déconcertante qu’a eu Disiz à enchaîner les chansons tout en les abordant bien différemment. Du début à la fin, il aura jonglé entre raps à émotions et raps en force et surtout en folie. L’exemple le plus flagrant aura été l’interprétation du Poids d’un gravillon, à cappella et précédé d’un petit laïus dans lequel il déclara avoir écrit ce titre quand il allait « très très mal ». Une interprétation coincée entre le fou furieux de Toussa Toussa et Extra-Lucide forcément frénésique en tant que dernier titre du concert. Cela aussi, Disiz semble être le seul à savoir le faire, lui qui parle beaucoup d’amour. Pour revenir à Toussa Toussa, ce fut la bonne surprise du show étant donné la pléiade d’artistes qui intervint par surprise. Ladéa (qui est en feat avec Disiz sur Elle t’a eu dans l’album) sera la première à chanter un couplet puis vint Fababy, Youssoupha (tiens tiens encore lui), Soprano et Lino. Le tout dans une ambiance survoltée. Encore une fois, le sol de l’Olympia n’a pas failli survivre. Auparavant, en début de concert, c’était Orelsan qui était sorti de nulle part pour Go Go Gadget. Pas vraiment une surprise cette fois-ci. Disiz nous a fait rire, pleurer, nous à fait danser, chanter, transpirer, vibrer, Disiz nous a surpris, enchanté mais il nous a surtout mis dans la confidence. Avant que les lumières ne se rallument définitivement, un immense écran blanc est descendu. Les premières images ne laissèrent pas de doute, c’était bien le nouveau clip de la nouvelle chanson du nouvel album de Disiz. Écrit et réalisé par Disiz himself, le clip raconte une vraie histoire, met en scène un jeune homme entre effets spéciaux, gros plans et émotions (encore une fois). En exclusivité, nous pouvons donc vous dire que cette nouvelle chanson se nomme Transe-Lucide, du nom de son nouveau projet. Alors que Disiz avait déclaré à RapGenius que Transe-Lucide aurait « un côté pop amoindri », le refrain est quelque peu électro. Décidément, Disiz aime bien surprendre son public.
Une soirée extraordinaire : c’est ce qu’aura loupé ceux qui n’avaient pas de places. Mais ils auront pu se consoler avec le concert de Bastian Baker le lendemain. Ou pas.