A l’entrée de l’exposition, un panneau explicatif nous rappelle que le peintre et architecte italien Giorgio Vasari (1511-1574) connu pour les biographies qu'il a consacrées aux plus grands artistes de la Renaissance italienne disait du dessin qu’il « est le père de nos trois arts, l’architecture, la sculpture et la peinture ».
On apprend tout d’abord que le mot « artiste » dans sa signification moderne n’existait pas dans la langue des anciens égyptiens. De même que la notion « d’art pour l’art » leur était étrangère. En effet, c’est seulement à partir de la Renaissance que la figure de l’artiste telle que nous la connaissons prend forme. A partir de cette époque les artistes commencent à signer leurs œuvres ce que ne faisaient pas les artisans des époques antérieures.
S’il n’y a pas « d’artistes » dans l’Egypte ancienne, les textes hiéroglyphiques mentionnent les « hommes de l’art ». Les dessinateurs, ceux qui écrivaient les hiéroglyphes, les peintres et les sculpteurs étaient reconnus pour leurs compétences. Les peintres et les dessinateurs étaient appelés « scribes des contours » ce qui s’écrit ainsi en hiéroglyphes
(j’espère que mon collègue « EgyptoMusée » qui est bien plus calé que moi, ne trouveras rien à redire à cette reproduction de hiéroglyphes à partir d’une copie faite sur place). En effet les Egyptiens utilisaient le même mot pour exprimer les actions d’écrire, de peindre ou de dessiner, ce qui est très bien exprimé dans cette image de l’album « Astérix et Cléopâtre ».
Sur les scribes, beaucoup d’informations nous viennent des fouilles réalisées à Deir el-Médineh, un village d’artisans et d’ouvriers qui, entre 1.500 et 1.050 avant notre ère, étaient chargés du creusement et de la décoration des tombes de la Vallée des rois et de la Vallée des reines. La découverte la plus importante a été celle du « grand puits » une sorte de décharge où ont été jetés des milliers de tessons de poterie et d’éclats de calcaire qui servaient à consigner tous les faits de la vie quotidienne. Les chercheurs ont ainsi reconstitué des « dynasties » de scribes qui se transmettaient le métier de générations en génération comme la famille des Pay. Leur matériel « calames » (pinceaux), palettes et colorants en pigments nous renseigne sur leurs conditions de travail. On découvre aussi que presque tous les supports étaient utilisés, papyrus, cuir, bois, pierre…
Toutes les représentations officielles étaient soumises à des règles très strictes. Ainsi la représentation du corps humain se faisait à partir d’une grille de 18 carreaux. Quand il y avait un personnage important (le dieu ou le roi) il était toujours représenté plus grand que les autres. Enfin comme la perspective n’était pas inventée, dans une foule alignée, les personnages les plus élevés étaient censés représenter les plus éloignés. Malgré ces canons très stricts les artistes pouvaient faire preuve de créativité, en témoigne une coupe en faïence bleue ou trois poissons se rejoignent au centre et partagent la même tête ou encore ce dessin préparatoire de la tête de Néfertiti.
Plus loin on découvre que les dessinateurs savaient aussi s’échapper des contraintes officielles avec des représentations de face ou encore des personnages difformes ou mal rasés. Il y a aussi ces images érotiques, voire pornographiques comme le « papyrus de Turin ». La pièce exposée est une copie réalisée par Rosellini, un égyptologue ami de Champollion, l’original étant très dégradé. C’est une sorte de bande dessinée avec des scènes satiriques mettant en scène des animaux, puis des scènes pornographiques et satiriques car les hommes ont des sexes démesurés et les positions sont pour le moins acrobatiques. Dans le même registre un éclat de calcaire représente un homme et une femme en train de faire l’amour avec cette légende à propos de la femme « Heureuse est Ineh » !
L’exposition se termine sur des scènes de genre, paysage du Nil et aussi cet éclat de calcaire saisissant de réalisme et représentant une hyène attaquée par trois chiens.
L’exposition « L’art du contour - Le dessin dans l’Égypte ancienne » se déroule jusqu’au 22 Juillet 2013 à l’entresol de l’Aile Richelieu.