Interview Jim : "je cours après la simplicité d'une bonne idée"

Par Bande Dessinée Info

Une petite tentation a une histoire vieille de plusieurs années – vous parlez même de véritable « lutte », entre changement de format et d’éditeur… Pourriez-vous revenir sur cette histoire, et votre collaboration avec Grelin ?

JIM : Grelin, c’est un éditeur (Soleil) qui nous a fait nous rencontrer. Et il a eu du nez, puisqu’effectivement je crois qu’il se passe quelque chose, entre son dessin et mes histoires. Tout ça prend vie. Du coup, nouveau couple fraîchement marié, nous avons fait un premier tome, Le Sourire de la baby-sitter (prévu en deux tomes). À la sortie du tome 1, notre marieur nous a appris que non, nous ne ferions pas le tome 2. C’est une histoire courante dans l’univers de la bd, et elle est à chaque fois aussi révoltante, cruelle et violente. Nous tenions à finir cette histoire, du coup il a fallu batailler pour récupérer les droits, et après… allez proposer à un éditeur de reprendre un premier tome d’une série qui a mal démarré commercialement !? C’est juste impossible.
Heureusement, nous avons réussi à passer outre cette impossibilité.

Qu’apportent les dessins de Grelin que les vôtres n’auraient pas pu apporter ?

JIM : Plus de légèreté peut-être, quelque chose d’apparemment léger… Une couche comme ça, qui n’a pas l’air de nous atteindre, et il me plaisait de travailler les sous-couches en même temps, plus noires, plus tordues... Et puis, on lui parle de son dessin, mais c’est une bête en couleur, l’animal !

Comme pour Une nuit à Rome, l’intrigue d’Une petite tentation tient sur un fil et se déclenche très rapidement, presque brutalement. Pour le premier, une simple promesse ; pour le second, un simple pari. D’où vous viennent ces idées, sont-elles tirées d’anecdotes de votre quotidien ?

JIM : Ah, la grâce des idées qui nous tombent dessus, et qu’il suffit d’attraper au vol !… Elles sont rares, celles-là, mais quand elles apparaissent, je ne leur laisse pas trois secondes avant de les noter. Sur Une nuit à Rome, j’avais fait dix pages sans connaître le scénario, et ce n’est qu’au bout de dix pages que j’ai raccordé avec cette petite note que j’avais dans un coin. Je note sans arrêt, je cogite dans mon lit, et oui, je cours après la simplicité d’une bonne idée. J’ai un fichier qui s’appelle "idée ciné" (et non "idée bd", d’ailleurs…), et je le consulte régulièrement…

Une petite tentation est un album surprenant, à plus d’un titre, et l’on ne sait jamais si l’on se situe au seuil de la vérité ou à celui d’un nouveau mensonge. Les cases elles-mêmes mentent et proposent des dessins biaisés qui laissent libre cours à toute forme d’interprétation… Et il semble que vous ayez réussi l’exploit de tromper le lecteur autant que les personnages se trompent entre eux ! Est-ce un jeu, finalement, une tentative de mettre en scène une illusion comique ?

JIM : La tentation réelle de cet album était de surprendre, de pousser l’idée, et j’adore être surpris au cinéma. Je trouve la cruauté très photogénique, du coup je ne me prive pas d’en assaisonner les personnages.
Que la fin surprenne est un vrai plaisir. Je me méfie des fins, elles viennent souvent de façon programmée et ont toutes les chances de nous décevoir. Et en même temps, elles doivent boucler le récit et le parcours des personnages, il faut à la fois donner un peu de ce qu’attend le lecteur, mais surtout lui offrir beaucoup plus… Parfois on réussit, parfois moins. Je suis très heureux si vous avez l’impression que cette fois-ci, ça a fonctionné !

La place des citations et références (Wilde, bien sûr, tout au long de l’album, mais aussi Anouilh, en exergue) semble très importante. Comment ont-elles structuré votre scénario ?

JIM : Elles ne l’ont pas réellement structuré, je crois même que c’est un peu retors de ma part : je vole de l’intelligence aux autres pour me l’approprier (rires). Mais surtout, elles soulignent les thèmes sous-jacents au récit, qui eux m’intéressent vraiment.
Ainsi, la lecture anecdotique qui doit offrir un vrai plaisir immédiat, peut être enrichit de quelques réflexions sur le comportement humain. C’est en ce sens qu’elles m’importent.

À la lecture, on ne peut s’empêcher de penser que le scénario pourrait être adapté au cinéma… Est-ce le cas ?

Une nuit à Rome

JIM : Il le pourrait, assurément.
Amis producteurs, ne vous privez pas de me joindre, je n’attends que vous pour développer l’écriture de l’adaptation (que j’ai commencée, soit dit en passant…) !

Justement, où en sont vos différents projets cinématographiques ?

JIM : L’Invitation, adaptation de la bd par Michael Cohen est sur les starting blocks, ainsi qu’Une nuit à Rome réalisé par Jacques Malaterre. Mais tant que rien n’est tourné, je me garderai bien de faire le malin...
Je travaille en parallèle sur trois autres scénarios originaux que j’espère bien mener à terme.

Vous écrivez et dessinez beaucoup notre belle capitale… Quand mettrez-vous enfin Montpellier, votre ville natale, dans vos cases ?

JIM : C’est une question qui tombe à point : notre prochain projet avec Grelin doit se dérouler à Montpellier ! Sur les plages et en ville… Vous avez vu juste… Bravo !

Propos recueillis par Cathia Engelbach