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Un testament littéraire de Stefan Zweig

Par Savatier

Un testament littéraire de Stefan ZweigPeut-on considérer les textes écrits dans les ultimes années de la vie d’un auteur comme un testament littéraire ? C’est la question que l’on peut se poser en lisant Derniers messages (Bartillat, 253 pages, 21€), qui réunit les conférences que Stefan Zweig (1881-1942) prononça dans sa dernière décennie. Et, dans ce cas précis, la réponse est : oui.

Zweig, écrivain aux multiples talents, était à la fois romancier, historien et biographe. Il était aussi un intellectuel qui portait sur le monde un regard lucide, humaniste et parfois idéaliste – d’un idéalisme sans illusion, toutefois, comme le suggère sa vision d’une Europe unie alors qu’il ne lui avait pas échappé que, sur le Vieux continent des années 1930, les bruits de botte couvraient le souffle discret des utopies pacifistes et des lâchetés munichoises.

Cette conception de l’Europe se trouve définie dans L’Histoire de demain, texte qui pose les jalons d’un enseignement historique éloigné des propagandes nationalistes axées sur les guerres ; un enseignement qui mettrait l’accent sur le progrès, à travers l’histoire culturelle et ses apports à l’humanité, comme une porte ouverte sur une collaboration universelle, loin des conflits larvés et des haines entretenues.

Un testament littéraire de Stefan Zweig
Sa vision se précise avec La pensée européenne dans son développement historique où, prenant en exemple le mythe biblique de la tour Babel, il souligne combien « tout est possible à l’humanité, même les choses les plus hautes, quand elle est unie ». Cette union, l’auteur, pur fruit de la Mitteleuropa, la trouve dans La Vienne d’hier, ville ouverte, tolérante dont il dévoile le secret : « accueillir, adopter, lier au moyen de la conciliation spirituelle et résoudre les dissonances en harmonie. » En d’autres termes, tout le contraire de ce que deviendra la capitale de l’Autriche après l’Anschluss.

On découvrira encore dans ce recueil un texte tout à fait fondamental intitulé Le Secret de la création artistique que devrait lire tout amateur d’art. Zweig, très en avance sur son temps, y pose les premières pierres de ce que l’on appellera plus tard la « critique génétique », si utile aux historiens de l’art et de la littérature pour mieux comprendre une œuvre. Parmi les autres chapitres, figurent une étude sur Tolstoï penseur religieux et social qui met en lumière un aspect peu connu du grand public de l’écrivain russe, une autre consacrée à Béatrice Cenci, un texte sur Byron et un autre, très sensible, où l’auteur compare la mère de Nietzsche à une mater dolorosa. Tout cela écrit dans une langue pure à laquelle nous ne sommes plus guère habitués.

Illustration : Stefan Zweig, photographie.


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