Elle s'avança vers lui avec un timide sourire orné de corail. Elle avait choisi les couleurs du printemps, les couleurs à la mode. Ses mollets encore blancs semblaient blessés par la lumière douce d'un soleil de fin d'après-midi.
Dieu, qu'elle est laide ! pensa-t-il, non sans une pointe de culpabilité.
Ses cheveux soyeux étaient relevés en une coiffure élégante, ses mains... ses mains qu'il avait toujours aimé et qui étaient les mêmes ne lui faisait plus rien. Tout au plus un sourire, car il se souvenait que ces mains étaient si particulières parce qu'elle jouait du piano. Les mains de pianiste avaient toujours de quoi faire sourire.
Seuls ses yeux trahissait le calvaire qu'elle avait vécu et quand ils rencontrèrent les siens, à lui, il ne put s'empêcher de se sentir déchiré par la culpabilité. Deux grands trous noirs en guise de pupilles et quelques vaisseaux éclatés, au delà de l'iris. Les longs cils étaient collés par le sel et surtout, surtout, chaque oeil était surligné d'un cerne bleuté, profond, profond comme l'abîme dans lequel elle prétendait avec tout le reste de son corps ne pas tomber.
Il sourit. Ce sourire est faux, il ressemble à une grimace, il ne sait plus comment faire. C'est ainsi, se dit-il fermement. Tu ne l'aimes plus, c'est ainsi.
Intérieurement, il soupira. La conversation qui allait suivre l'ennuyait déjà. Il avait hâte que tout soit fini, de rentrer, de se replonger dans son travail car c'était le seul amant qui le suivrait toute sa vie.