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"Still Life", la Chine qui se cherche

Par Critikacid
C'est au rythme lent des balancements du fleuve que Still Life nous fait entrer dans la ville de Fengjie, en compagnie de gens issus de la Chine profonde, éternelle.
Cette ville est peu à peu mise en pièces,  prélude à son engloutissement  annoncé par les eaux du fleuve lors de l'achèvement du pharaonique barrage des "trois gorges".
Still Life signifie "nature morte", et en effet, il règne dans cet endroit un sentiment de décomposition, de pourrissement, sous un ciel oscillant entre le crayeux et le plombé.
Les personnages principaux sont venus ici à la recherche de leur passé, pour en renouer les fils ou bien s'en débarrasser.
Mais l'avertissement claque : "il n'y a pas de place pour les nostalgiques comme nous dans cette société".
Ce n'est en effet pas la seule Fengjie dont Jia Zhang Ke montre la fin inéluctable, annoncée par de multiples signes de mort tracés à même les murs et aux flancs des montagnes qui l'enserrent.
C'est  la Chine d'antan, celle où naquit pourtant le rêve de ce barrage à même de dompter le "fleuve bleu". Elle a fait place à la Chine des managers et escrocs qui vilipendent ses "salauds de pauvres".
On la devine encore pourtant partout. Dans les  bureaux de l'urbanisme où des habitants délogés viennent accuser de corruption un responsable d'un Parti délégitimé. Dans une usine à l'abandon dont le directeur, qui vient pourtant de la revendre à une riche femme d'affaire, met en garde les ouvriers licenciés contre toute "atteinte à la propriété de l'Etat". Surtout, dans les ruines de cette Chine ouvrière où s'activent encore les ouvriers...
Mais, avertit Still Life, il n'auront comme issue que la fuite, vers la côte, vers Shanghaï, fuite qui est la seule issue pour échapper à la mort lente et asphyxiante d'une ville, mais aussi d'une forme d'organisation sociale, dont l'agonie est mise en scène comme un ballet irréel et onirique.

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