Je demeure

Publié le 23 avril 2013 par Paulo Lobo
Tu t'es construit une sacrée belle maison.
J'étais enclin à ne pas vous croire.
Je ne sais pas. Un pressentiment.
Que me disent les pierres? Qu'elles sont sûres de ce qu'elles disent, qu'elles portent le témoignage des siècles, le râle des chevaliers d'antan, le souffle des belles endormies.
Je m'en vais, vous restez, je vous passe le relais. Un jour, vous ferez pareil. Quelle langue est la mienne? Quelle force opposer au mouvement de la vie, au roulement du monde?
Quelle tristesse brandir? Quel cri immensément lyrique? La beauté est une valeur à défendre. Un trésor enfoui qu'on déterre encore et encore. J'ai ce voile dans ma tête qui cache mes soupirs ancrés au port.
Et rien ne coule plus de source.
Alors que l'on nous somme de prendre position. Pour ou contre. Il n'y a pas de neutralité. En ce temps-là, l'Europe plongeait dans la guerre, dans ses années les plus sombres. Les assassinats étaient courants, la vermine écumait les terres, les yeux ne dormaient jamais.
Un jour, je me tus. Je n'avais plus de famille, plus d'amis, plus de compagnons. Mon chemin était pétri de souffrance. Je ne savais pas si je devais avancer, un pas après l'autre, ou me trancher la gorge. Mais la sève qui était en moi était plus forte. Chétivement, je demeurais. Je faisais face, dignement.