Après "Un Vrai Bonheur" (1 et 2), "L'Huître" ou encore "La Monnaie de la Pièce", le directeur du Théâtre Michel signe et met en scène dans son établissement une nouvelle comédie intitulée "Un Pavé dans la Cour". Soit un apéritif entre colocataires à l'ambiance plus électrique que festive. De bonnes choses, indéniablement, mais trop de choses. Et un script qui, paradoxalement, pêche par un manque de rythme flagrant. Dommage, car les interprètes dévoilent un jeu excellent.
Dans la cour d'un petit immeuble parisien, Didier Caron réunit donc un couple en passe de rompre, une mère et sa fille aux relations complexes, deux frères que tout oppose, et un concierge portugais (que l'on ne verra jamais). Les sourires de façade ne feront pas longtemps illusion, laissant place aux sempiternelles et incontournables querelles de voisinage, et surtout à l'étalage de conflits ou malaises plus intimes et profonds.
Et c'est là que le bas blesse... Comment évoquer et développer pêle-mêle, en 90 minutes, dans une pièce chorale, avec finesse et légèreté, sans tomber dans la caricature, la confiance en soi, la rupture conjugale, ce que l'on cherche chez l'être aimé, le désir d'enfant, les liens fraternels, les rapports mère-fille, la famille, la réussite professionnelle, la séduction... ? Mission quasi impossible. En tentant de balayer l'ensemble de ces thèmes, l'auteur, aux intentions louables et au style plutôt subtil, peine à trouver le ton juste et le bon rythme des situations qu'il nous propose. Cela va tantôt trop vite, tantôt pas assez, le "sur place" est fréquent, le rire hélas un peu moins (quelques savoureux échanges cependant)... et la mayonnaise ne prend jamais vraiment.
Nous le regrettons d'autant plus que les comédiens sont parfaitement dirigés et défendent efficacement leur partition. Touchants, insupportables, ou les deux. Citons Bruno Paviot en employé de banque pingre et étriqué, dont la composition est assez jouissive, tout comme celle d'Isabelle Tanakil en mère odieuse, rabaissant continuellement sa fille, émouvante Samantha Rénier. Julien Ratel campe avec beaucoup d'humanité un patissier dyslexique amoureux. Gaëlle Lebert offre douceur et force de caractère à son personnage d'épouse s'émancipant d'un mari plus que pénible. Pascal Mottier, enfin, est un carriériste speedé plus vrai que nature...
Hélas, cela ne suffit pas totalement à sauver une pièce aux faiblesses structurelles certaines.
Jusqu'au 31 mai.
Photo : DR / theatre-michel.fr