traduit de l'espagnol par E. Dupas
Chair transie, opaque baie vitrée de tristesse,
eau qui fuit du ciel en perpétuel frisson;
vase qui ne sut pas se remplir de pureté
ni s'ouvrir grand aux noirs torrents de l'horreur.
Yeux qui ne servirent de rien pour regarder la mort,
bouche qui ne concéda pas son grand baiser d'amour !
Mains comme deux ailes blessées : celle de droite, inerte,
qui ne parvient pas à s'élever aux zones de l'éclat !
Plante du pied erratique et incertaine, couarde devant le chardon,
rétive au dur voyage, esquivant le culte fidèle;
genoux que le plaisir ne fit pas ployer devant son rouge autel,
et que le remords n'a pas plus réussi à vaincre !
Gorge peureuse du profond et intime cri
de la douleur ultime qui déshabille la chair :
langue qui est comme pierre à la dolence infinie
de la vérité dernière endormie dans la passion !
Visage d'inutiles roses, qui se fane dans l'ombre
puits occulte qui jamais n'abreuva une grande soif;
prairie qui ne put se soumettre en tapis
morceau de la mort, qui ne sait pas se voir !