La rencontre d’Aimé Césaire est, à coup sûr, encore moins du goût des autorités. Deux ans plus tôt, le poète de la négritude a publié Cahier d’un retour au pays natal, superbe chant de protestation contre la domination culturelle et politique blanche que Breton qualifiera plus tard de ” plus grand monument lyrique de ce temps “. Césaire, alors âgé de vingt-huit ans, professeur au lycée de Fort-de-France, vient de fonder la revue littéraire Tropiques, et c’est ce magazine qui retient un matin l’attention de Breton dans une boutique de la ville. “Je n’en crus pas mes yeux, écrira-t-il : mais ce qui était dit là, c’était ce qu’il fallait dire !” La commerçante, qui connaît Césaire, accepte de lui porter un message et le lendemain Breton a son premier entretien avec le jeune poète. Il passera ses derniers jours à la Martinique à parler avec lui de la littérature et des traditions antillaises et à découvrir la flore de l’île en sa compagnie. Son guide dira que cette époque fut pour lui “tout à fait cruciale, déterminente”. “Si je suis ce que je suis, je crois que c’est en grande partie à cause de Breton (…) une sorte d’immense raccourci pour me trouver moi-même.”
Extrait de la Biographie d’André Breton par Mark Polizzotti (Gallimard).
Cette rencontre a lieu en 1941, lors d’un voyage qui doit mener Breton vers New York, quittant la France et le régime de Vichy. Breton embarqué sur le Capitaine-Paul-Lemerle fait escale à Fort de France.
La photo ? Elle fut prise chez Pierre Matisse à New York, toujours extraite du même livre.
Un petit jeu : donner leurs noms ! Pour Césaire, c’est facile. Et les autres ?