Times, donc, pour cette première transformation. David August semble parler énormément de lui dans les 14 titres qui composent cet album. Une production très personnelle, fragile et délicate, proche de la virtuosité d'un Nicolas Jaar qui avait défrayé la chronique quelques années plus tôt, à la personnalité musicale trouble semblable à celle d'un James Blake, moins orientée sur la dimension chantée - même s'il est présente. La surprise, qui n'en est plus vraiment une, c'est la grande maturité avec laquelle celui-ci compose. Une bonne dose d'assurance et de gravité dans le ton. La confiance et la rigueur d'écriture digne des plus expérimentés. Le constat est simple : il est difficile voire impossible de trouver la moindre erreur, faute ou rature sur cet album. Si le travail de production peut être utilisé en cache-misère, avec Times il ne fait que révéler toute les subtilités des compositions. David August trace son chemin sans regarder à ses côtés. Bien loin des effets de modes, son premier album semble en dehors du temps, un peu isolé mais loin d'être sourd face aux évolutions qui agitent la musique.
Si ses débuts se rapprochent plus de la minimale allemande passe-partout, Times s'inscrit dans le cadre d'une house down-tempo léchée. "Help Me Through" a cette particularité de ne pas ouvrir l'album sur un coup de bluff. Un titre un peu désuet, tinté d'amertume, dont les claviers évoquent les standards de library des années 70-80'. Cette sensation - de décalage temporel - revient d'ailleurs tout au long de l'écoute. Un idéalisme rétroactif défraichi et légèrement grandiloquent comme sur "For Eternity" dont on perçoit à peine les paroles marmonnées. Une idée que continue de développer "Phenomena" avec ses accords de guitare et ses cuivres tout droit sortis d'un film avec Patrick Dewaere. La lourdeur des rythmes et les sons pleins sont encore d'autres caractéristiques que l'on retrouve par exemple sur "Anthem" ou encore "Until We Shine" avec la chanteuse Yvy en featuring. Pourtant, ce n'est pas cette pesanteur qui gène l'écoute. Le son, qui intègre de nombreux instruments comme les vents cordes, cuivres et percussions, parait contre toute attente léger et aérien. On peut encore citer "Blossom" et son piano qui donne envie de pousser les enceintes à leurs limites, comme pour accélérer la venue d'un printemps qui tarde à s'installer.
En bref : Loin de se perdre en contractions, David August livre un premier album surprenant de cohérence et de maturité tout en restant très accessible. L'avenir semble assuré pour l'électronique allemande.