Hänsel et Gretel au répertoire

Publié le 20 avril 2013 par Popov

 Dans Hänsel et Gretel, le compositeur allemand Engelbert Humperdinck, disciple de Wagner, transpose un conte des frères Grimm écrit dans la tradition allemande de la fin du XIXe siècle avec vaste pupitre de bois, cuivres imposants, cordes et ribambelle de percussions.

L'œuvre aimée de Richard Strauss même si elle est moins prisée des wagnériens adhésifs.

Pour se défaire de l'influence du maître, nombre de disciples se sont ainsi réfugiés dans le genre "conte théâtral" (Märchenspiel) mais aux âmes bien nées... Dans Hänsel und Gretel, le timbre tient une place primordiale pour servir les différentes ambiances du récit, une forêt terrifiante, fantômes et cauchemars, leitmotiv œdipiens et patchwork folkloriques se mettent au service de l'enfantine terreur.


Le conte -chacun le sait depuis Bruno Bettleheim ou Marthe Robert- est un récit initiatique qui permet à l'enfant de penser sur mode symbolique ce qui déraille dans le comportement parfois opaque des pulsions parentales que l'on ait un papa et une maman, voire les deux. Comme quoi...

Que l'on soit la progéniture d'un père trop possessif type Peau d'Âne ou de quelque castratrice ogresse, une de ces marâtres (ces voleuses d'amour paternel) le conte souligne les dérapages adultes et permet à l'enfant par l'imaginaire de penser ce qui serait autrement trop violent sur le plan de la réalité. Et comme l'inconscient est "structuré comme un langage" il a eu de tout temps un certain succès.

Hänsel et Gretel, donné chaque Noël germanique aussi sûrement que Petit Papa en France en est un exemple frappant. Sur ce canevas bien connu, répété, relu maintes et maintes fois dans les chambres d'enfant, Marianne Clément a tissé une mise en scène habile qui superpose enfance et imaginaire, conscient et inconscient.


Le décor de Julia Hansen éclairé sur un mode ou sur l'autre enferme la forêt (qui pourrait être le lieu de tous les fantasmes d'abandon) au sein même de l'espace privé -le danger est mitoyen- lieu de vie d'une sorcière qui ressemble à s'y méprendre à la mère même si elle habite un gâteau en pain d'épices surmonté de smarties pour faire venir à elle les petites enfants et les passer au four de ses cannibales pulsions.

Dieu merci, elle sera bien punie (le conte doit toujours être cruel aux méchants).

Hänsel et Gretel, seul grand succès d'Humperdinck a une version de référence. Celle de Karajan dans les années cinquante. Mais le passé est le passé et la direction musicale de Claus Peter Flor pour cette œuvre qui rentre au répertoire de l'Opéra de Paris est bien délicate.

Le duo de solistes est assuré. Daniela Sindram, mezzo allemande présente un solide Hänsel et Anne-Catherine Gillet à la voix si limpide une Gretel qui joue très bien l'enfance. Jochen Scmeckenbecher pousse la chanson populaire (un Rallala tout à fait entraînant) avec alacrité aux côtés d'une fée-clochette adorable et d'un marchand de sable qui vous replongent illico dans les angoisses suaves de l'enfance...

La grande wagnérienne Anja Silva incarne la sorcière maléfique avec l'assurance des voix chères qu'on n'oubliera jamais.