Voici un article intéressant du Figaro , traitant de la rencontre historique qui a eu lieu samedi 12 Avril , entre le president chinois Hu Jintao et le vice president taiwanais Vicent Siew .
LE FIGARO , 14/04/2008 -- Article de Julie Desné
Les palmiers, la brise marine et 28 °C à l'ombre : le décor était planté pour faire fondre la glace entre Taïwan et la République populaire. Mais pour une rencontre sans précédent entre le président chinois, Hu Jintao, et Vincent Siew, vice-président fraîchement élu par les insulaires, la mise en scène est restée plutôt discrète.
Les deux dirigeants se sont parlé samedi pendant vingt minutes, en petit comité, en marge du Forum économique asiatique qui se
tenait sur l'île tropicale de Hainan, au sud de la Chine. Au total, treize délégués taïwanais, issus des milieux d'affaires, ont été conviés à rencontrer autant de Chinois, dont le numéro un du
Parti communiste.
La discussion a roulé sur l'économie. «Aujourd'hui, les échanges et la coopération entre les deux rives du détroit se trouvent à
un moment crucial, a dit Hu Jintao au terme de l'entretien. Elles exigent que les deux côtés travaillent ensemble.» Côté taïwanais, le rendez-vous a été jugé «historique, franc, amical et
harmonieux».
La question qui fâche, celle de la souveraineté que le continent entend exercer sur l'île, a été soigneusement éludée.
L'élection, le mois dernier, de Ma Ying-jeou à la présidence taïwanaise est une chance pour Hu Jintao : après douze ans d'un vis-à-vis antagonique, Pékin retrouve à Taïpeh un interlocuteur
mieux disposé. Elle offre aussi au régime chinois, à l'approche des Jeux olympiques de Pékin, l'occasion d'envoyer à la communauté internationale, sur le détroit de Taïwan, un message
d'apaisement qui contraste avec les vives tensions politiques au sujet du Tibet.
«La situation ne va pas changer en une nuit, expliquait samedi Su Chi, membre de la délégation taïwanaise et conseiller
diplomatique du président élu. Nous partons d'un froid si glacial, d'une glace épaisse de huit ans, que nous essayons d'abord de briser cette glace, de la faire fondre. Mais le message est fort
et le moment passionnant : nous partons sur de nouvelles bases, en plaçant le pragmatisme au-dessus de l'idéologie.»
Le président Ma n'est, pas plus que ses deux prédécesseurs, disposé à faire de l'île un vassal de la République populaire. Il prône au contraire la poursuite du statu quo ni indépendance déclarée ni réunification forcée éventuellement consacré par un traité de paix. Il ne veut pas heurter des électeurs taïwanais attachés à leur démocratie et refuse avec constance de se rendre à Pékin. Il souhaite aussi un réchauffement avec Washington.
Le calendrier de la rencontre de Boao ménageait ces susceptibilités. Ma Ying-jeou et son vice-président, élus le 22 mars,
ne prendront leurs fonctions officielles que le 20 mai. «C'est une période très spéciale, pendant laquelle Hu Jintao peut rencontrer Vincent Siew sans que cela soit une rencontre d'État à
État», explique Wang Mingyi, journaliste du quotidien taïwanais China Times.
Durant sa campagne, Ma Ying-jeou a promis l'établissement de lignes aériennes directes avant la fin de l'année, plutôt que le
long détour par Hongkong toujours imposé aux centaines de milliers d'hommes d'affaires taïwanais qui font la navette entre l'île et le continent. Samedi, selon la presse de Pékin, le président
chinois a souhaité l'instauration «dès que possible» de vols charters directs, ainsi que l'ouverture de Taïwan au tourisme chinois.