Tournée des galeries de Beaubourg et balade dans des lieux abrités du Marais (Paris 3 & Paris 4)

Publié le 19 avril 2013 par Carnetauxpetiteschoses @O_petiteschoses

Si ces prochains jours (et ce, jusqu’à samedi 20/04), vous êtes dans les environs de Beaubourg, voici une petite tournée des galeries intéressante doublée de quelques passages secrets et abrités.

Au départ de la station Hôtel de Ville, voici les étapes de la balade
- La galerie Fait & Cause
- Le passage Molière (ses boutiques et ses guirlandes lumineuses)
- Le passage de l’Ancre (son écrin de verdure et ses façades colorées, dont la boutique de parapluies Pep’s)
- La galerie Isabelle Gounod
- La galerie Daniel Templon
- Le jardin Anne Frank abrité et peu fréquenté
- la rue du Temple et le Centre de danse du Marais


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Commencez par remonter la rue du Renard au sortir du métro, pour prendre la Rue Saint-Merri à votre gauche. Dans ces rues où l’on discerne les plaques de rue d’origine à côté des nouvelles, vous pourrez prendre la deuxième à droite, après avoir vu sur votre gauche la perspective vers la Tour Saint-Jacques, et vous engagez parmi les bars et les boutiques dans la rue Quincampoix, que vous remonterez jusqu’au numéro 58.

L’une et l’autre à la galerie Fait & Cause

Comment après avoir vécu, traversé ou subi une situation difficile ou excluante, se réapproprie-t-on son image de soi ? Quelle image renvoie-t-on quand on a vécu une telle situation ?

En examinant le processus de dislocation de l’image, on s’aperçoit qu’il est lié au fait que la considération de soi est intimement liée dans notre société à la réussite sociale. Il fait alors naître, des sentiments d’exclusion, de culpabilité, d’échec et un éloignement progressif de la communauté humaine.

Donnant l’occasion à 15 femmes qui ont connu ces expériences de vie de s’exprimer, et partant de la question de l’exclusion, cette exposition s’appuie sur le travail minutieux mené depuis début 2012, avec l’association « 100 voix ! » sur une véritable quête de soi.

Elles ont vécu la maladie, la disparition d’un être cher, la trahison, la violence, l’exil ou la détention. Dans ce travail de terrain, de collecte fidèle au ressenti, à la reconstitution de leur images à l’aide de la photo, du collage, de l’écriture et d’une agrégation de souvenirs mêlés aux sentiments, se cache l’émouvante beauté de ces témoignages bruts.

La photographie révèle également son pouvoir de métamorphose notamment dans sa capacité à découper le réel et à matérialiser le résultat d’une introspection.

Pour aborder la question de l’identité, la photographe Sarah Moon a pris le parti de décoller de ces femmes, une image, celle qu’elle percevait. Dans cet atelier intitulé « Rencontres », il a été demandé ensuite aux sujets, de répondre par écrit à la question « Que reconnaissez-vous dans cette photo ? ». Puis, à leur tour chacune de ces femmes a réalisé une photo dans laquelle elles se sont mises en scène dans la perception qu’elles ont d’elles-mêmes. Dans cette dernière étape, le travail de création leur permet de concevoir leur regard sur le monde, de le voir se matérialiser en un objet concret. Elles s’autorisent ainsi à être, et réapprennent peu à peu à se faire confiance, à se traiter de manière égal à autrui. On y discerne le sachet de thé suspendu au dessus de la tasse, qui annonce une noyade imminente pour Stéphanie Foucher ; l’homme sans tête dans un escalator de métro qui reflète la peur de l’homme prédateur de Michelle K. ; ou l’escalier de Marie-Jeanne Sery qui rappelle les craintes de l’enfance et la possibilité de la chute.

Livré comme un gigantesque travail de collage et d’assemblage, le fruit de cet atelier est exposé dans la première pièce qui ressemble à un carnet de voyage. Les photos sont annotées, les impressions sont rendues sans détour. Le fait de lire les mots de l’écriture de chacune, ronde, hésitante, ou parsemée de ratures, touche davantage.

Le second volet de ce travail porte sur la constitution d’un « carnet de route » (pas étonnant donc), présenté sous la forme d’un livre d’une vingtaine de pages. Elles ont été confrontées dans le travail de photographie au questionnement du réel : et particulièrement l’analyse du moment et du lieu comme emplacement d’une éventuelle photo, du message qui serait transmis et de leur implication comme photographe dans le réel. Dans ce travail toujours en cours, certaines parties sont en gestation, car c’est aussi le lieu de blessures, de béances en voie de guérison.

Certaines de ces femmes ont aussi participé à l’atelier proposé par la photographe Flore-Aël Surun (Tendance Floue), sur le principe de l’animal totem, c’est-à-dire la représentation de soi en animal. C’est donc grâce au photomontage que le résultat est rendu possible.

Le travail individuel de cinq femmes soit résidant à la Maison Cœur de Femmes, ouverte aux femmes isolées en situation d’exclusion et de précarité, soit au Centre Suzanne Kepès qui héberge des femmes victimes de violences, soit au centre l’Olivier ouvert à des hommes et des femmes sans domicile. Les messages forts traduisent les efforts de femmes en fin de vie (Henriette Watat), les portraits d’hommes résidant dans un centre de stabilisation (Sahondra Raveleoris), des images de Vera Boissinot, l’émerveillement de L.Aile pour sa fille, ou le travail de Ouardia B. qui essaie de répondre pour sa fille et par l’image au mal qui la ronge.

Enfin, les clichés réalisés par deux des participantes à l’atelier « 100 Voix ! », Lyliie Berry et Magali Faucheux, lors d’un cours séjour de certaines résidentes de la maison Cœur de Femmes au Mont Saint-Michel. La consigne est de ne pas faire des images clichés, anecdotiques, mais de travailler sur la lumière et sur le rapport du corps au paysage.

Une fois encore une exposition forte, qui prend au ventre, et émeut.

L’une et l’autre
à la Galerie Fait & Cause

58 rue Quincampoix
75004 Paris

Le passage Molière

Continuez ensuite la rue Quincampoix jusqu’à croiser la rue Rambuteau. Traverser et poursuivez jusqu’au 82. vous verrez s’ouvrir sur votre droite un petit passage, originairement percé lors de la création du théâtre Molière dont l’entrée des artistes se trouvait dans cette étroite ruelle. Créé par Jean-François Boursault dit Boursault-Malherbe, qui était un homme de théâtre, d’affaires et révolutionnaire français, il pris place dans le passage des Nourrices qui pris ensuite le nom du théâtre.


Désormais en lieu et place de l’entrée des artistes, on découvre la Maison de la Poésie. En y pénétrant pour y découvrir sa programmation, il est possible de prendre la mesure des vestiges de ce qu’il fut. Le lieu conserve une atmosphère idéale pour l’écoute, notamment dans la salle Pierre-Seghers  qui peut contenir 180 personnes  ; et aux caves voutées qui contiennent la salle Lautréamont (qui peut accueillir 30 personnes à l’architecture et à l’acoustique typique du 19ème siècle.
Renseignez-vous pour y passer un moment ! Dans le reste du passage, les restaurants et boutiques charment et offrent un moment en marge de l’agitation.

Le passage de l’Ancre

Rejoignez la rue Saint-Martin en coupant successivement la rue Etienne Marcel et la rue de Montmorency, pour rejoindre la porte cochère bleue du numéro 221. Ici dans l’intimité de ce porche sombre, se cache un écrin de verdure et des façades de boutiques colorées. Il a pris le nom de l’enseigne d’une auberge située à une des extrémités du passage, considéré comme l’un des plus anciens de Paris. Originairement consacré au commerce des parapluies, il abrite la boutique Pep’s, tenue par un spécialiste de l’objet, commerçant et réparateur de pépins !

Vous pourrez ensuite revenir sur vos pas, sortir du passage, et vous engager dans la rue Chapon (et entrer dans les différentes galeries) pour atteindre le numéro 13. Parmi les grossistes en maroquinerie, vous verrez la porte et le digicode menant à la galerie Isabelle Gounod.

L’hypothèse des halos non lumineux, Aurore Pallet à la galerie Isabelle Gounod

Un titre énigmatique et des critiques étonnantes pour cette première exposition de l’artiste. Curieux de découvrir et son propos et ses productions, on pousse la porte de la galerie Isabelle Gounod située dans une petite cour abritée.

Disposés en mosaïque, c’est par les dessins de l’artiste que l’on commence. Des dessins crayonnés simplement, en tous petits formats. On s’approche. On peut les lire comme une immense planche. On note le travail des matières et de leur rendu (celui d’un rond dans l’eau, d’une foule, d’un paysage) et celui du jeu de la lumière obtenu simplement par un appui plus fort de la mine sur le papier. Des instants contemplatifs, parfois un peu surréalistes, qui mettent en présence une foule, un personnage seul, des animaux démesurés. On discerne aussi de manière récurrente la représentation des ombres et leur découpage sur le réel qui introduit l’espace négatif. C’est ce dernier qu’Aurore explore, jusqu’à nous plonger dans les profondeurs des abysses, de routes obscures ou de nos peurs les plus enfouies. C’est là dans la représentation de ces sujets sombres que naît une beauté inattendue. On plisse les yeux, on modifie notre angle de vue en se déplaçant face à l’œuvre pour en percevoir toute la teneur, tous les reflets, pour déceler ce que cela évoque en nous. Les formats sont multiples et les techniques différentes mais restent produites à la peinture dans la salle principale. On aborde l’intimité de pièces habitées, aussi bien que les falaises, les routes sombres et les animaux qui peuplent les abysses.

Dans son processus de création, Aurore Pallet collecte des images sur le web, elle procède par association pour faire émerger une situation, un rapport incongru qui interroge. Dans son rapport intuitif aux représentations, elle poétise le quotidien, et met en scène une sensation étrange (entre l’émerveillement et le malaise).

A découvrir !

L’hypothèse des halos non lumineux
Aurore Pallet
A la galerie Isabelle Gounod
13 rue Chapon
75003 Paris

Revenez sur vos pas et tournez à gauche dans la rue Beaubourg. Vous trouverez l’entrée de la galerie Daniel Templon et ses deux emplacements de part et d’autre de la rue (au numéro 30).

Gisants, Jan Fabre à la galerie Daniel Templon

En pénétrant dans la galerie, cette fois l’ambiance a changé. Les murs lumineux ont fait place à une obscurité travaillée. Jan Fabre a transformé les lieux pour qu’ils soient propices à accueillir sa mise en scène de la mort. Il rend ainsi hommage à Elizabeth Caroline Crosby, neuro-anatomiste américaine et Konrad Zacharias Lorenz, biologiste et zoologiste autrichien, et il fait référence à son travail sur les neurosciences.

Partant d’une réflexion sur la notion de nature, il met en parallèle l’acception de la Nature comme extériorité et comme réalité fertile, et la notion de nature humaine, de nature individuelle. Au-delà des symboliques classiques et évidentes de vanité de l’existence ou de fuite du temps, il traduit le rapport intime de l’homme à son cerveau, compris comme siège de contrôle, de créativité et d’intelligence. Il place ses sculptures sur un piedestal, puis un socle. Les cerveaux sont ainsi ornementés d’éléments issus de la flore et de la faune, qui matérialisent, la vie, la créativité, la survivance de l’esprit. Les feuilles, fleurs et insectes bourgeonnent en surmontant avec esthétisme le cerveau brut. Ils remplacent les animaux placés sur les sépultures royales (lions, chiens etc…) qui indiquent la résurrection. Ils sont aussi présents sur les gisants, placés au cœur des pièces de la galerie. Le travail de la matière est saisissant, le rendu du drapé magnifique. L’artiste a en effet travaillé pendant plus de deux ans avec deux marbriers des Studi d’Arte Cave Michelangelo, un atelier qui conserve la mémoire de la maîtrise des techniques traditionnelle de la sculpture du marbre blanc.

Un recueillement et une vision qui valent le coup d’œil.

Gisants
Jan Fabre
A la galerie Daniel Templon
30 rue Beaubourg
75003 Paris

Le jardin Anne Frank

Au sortir de la galerie, poursuivez dans la rue Beaubourg, sur le trottoir de gauche, jusqu’à apercevoir l’entrée de l’Impasse Berthaud. Cette voie sans issue, n’est pas aussi courte qu’elle le laisse paraître. En effet, en arrivant au bout, vous vous apercevez que le chemin continue sur la gauche, laissant entrevoir le Musée de la Poupée et l’entrée du jardin Anne Frank qui offre un peu de calme et la possibilité de s’abstraire de l’animation de la rue de Rivoli, et du Centre Pompidou tous proches.  On y trouve le greffon du marronnier que l’écrivain admirait de sa fenêtre, et l’ancien jardin de l’Hôtel de Saint-Aignan (17ème siècle), aujourd’hui Musée d’Art et d’Histoire du Judaïsme.

La rue du Temple, le Centre du Marais

Pour terminer, vous pouvez prendre tout de suite à gauche dans la rue Rambuteau, puis à droite dans la rue du Temple. Continuez jusqu’au 41, emplacement du Centre de danse du Marais et du Café de la Gare, pour profiter de l’ambiance animée des lieux, entrevoir les cours de danse, et pour terminer votre balade en vous désaltérant au restaurant The Studio, dont l’ambiance intérieure vous dépayse et en été la terrasse vous permet de profiter du charme de la cour pavée.

Vous êtes ensuite proches des stations de métro : Rambuteau, Hôtel de Ville ou même en marchant un peu plus Châtelet-les-Halles.

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