Sans doute l'ignorez-vous mais j'affectionne tout particulièrement les macarons (surtout s'ils sont à la vanille ou à la pistache). Alors naturellement, quand j'ai constaté que The place beyond the pines et Mystery, qui me faisaient de l'œil depuis longtemps ainsi que Warm Bodies, que l'on m'avait fortement recommandé, sortaient tous trois le 20 mars, journée officielle du macaron, j'y ai vu un signe.
D'ailleurs, tous trois traitent d'Amour (et parfois, aussi, d'amûûûr) (oui, il y a une nuance entre les deux) : amour filial pour le film de Derek Cianfrance, amour déçu pour celui de Lou Ye et amour zombinopiné (pardon pour ce néologisme ridicule dont paradoxalement je suis très fière) pour le long-métrage de Jonathan Levine. Une semaine que j'espérais délicieuse donc mais qui, sans pour autant occasionner une vilaine indigestion, fut bien en deçà de mes attentes 5 étoiles (ou en l’occurrence ici, 10 étoiles) soit simplement "à croquer" (ce qui est déjà pas mal, vous me direz).
- The place beyond the pines (Derek Cianfrance)La brillante mais nocive ascension d'un cascadeur qui braque des banques pour assurer l'avenir de son enfant et d'un rookie de la police locale qui, lui, pour des raisons que je ne peux révéler ici, rejette sa paternité. The place beyond the pines aborde donc la question de la filiation et plus spécifiquement de l'héritage père/fils mais pas que. En effet, un choix décisif va changer la vie de ces deux hommes et les lier à jamais. Le film questionne donc également le déterminisme. Si ces pistes de réflexion sont sublimées par le thème hypnotique de Mike Patton et la photographie exaltée, quasi fétichiste (notamment lorsqu'il s'agit de filmer Ryan Gosling qui, on le sait, est la muse de Derek Cianfrance), la généalogie du récit les rudoie. Le scénario s'avère en effet excessivement inégal, prévisible voire même parfois redondant – le personnage de Ryan Gosling rappelle inévitablement celui de Drive– et tire uniquement sa force des acteurs (mention spéciale pour Dane DeHaan qui était déjà brillant dans Des hommes sans loi et Ben Mendelsohn) à l'exception d'Eva Mendes qui semble condamnée aux rôles mélodramatiques de femme pauvre et éplorée. En résumé, une triptyque familiale inspirée quimanque toutefois cruellement de fluidité et de rythme.
En deux mots : torturé et long.Le petit plus : The place beyond the pines se situe dans le comté de Schenectady dont Ben Coccio, l'un des scénaristes dudit film est originaire. Dans la langue des Mohawks, Schenectady signifie d'ailleurs "près des pins" – d'où, vous l'aurez compris, le titre du film. N'hésitez pas si :
- vous aimez les drames psychologiques ;
- vous aimez Ryan Gosling et/ou Bradley Cooper (bien que leur personnage respectif soit quelque peu stéréotypé, l'interprétation est impeccable) ;
- votre concentration a ses limites (le film dure 2h20 et est parcouru de nombreuses longueurs) ;
- vous attendez une claque aussi puissante que celle que vous avez eu devant Blue Valentine (moi aussi mais cessons, c'est vain) ;
- Mystery (Lou Ye)Un pamphlet cinématographique qui aurait pu être brillant s'il avait reposé sur une intrigue moins classique. Lou Ye mêle en effet deux histoires éculées– les difficultés d'un couple dont le mari mène une double vie et le meurtre d'une jeune femme – histoires qui semblent a priori distinctes mais qui sont en réalité contiguës. Au gré de flash-back, le spectateur s'empêtre malheureusement dans ce polar médiocre et filandreux – d'où le nom du film ?– qui révèle peu à peu les manipulations que peuvent engendrer une trahison amoureuse. Mystery dévoile alors seulement son sens profond : brosser un portrait au vitriol d'une société chinoise régie par le mensonge et le sexisme. L'esthétisme dûment oppressant (torrents de pluie qui obscurcissent l'horizon, espaces confinés etc) allié à la bande originale volontairement ironique – en témoigne la reprise de l’Ode à la joie de Beethoven qui traverse symboliquement le long-métrage – confèrent au film une intelligence rare et participent directement à l'écriture de cette chronique sociale éminemment acerbe. En résumé, une indubitable beauté visuelle mais aussi et surtout une piquante critique sociale qui aurait gagné en qualité si elle s'était abstraite des genres que sont le polar ou encore le thriller, inutiles ici.En deux mots : beau et grinçant.Le petit plus : confronté à la censure depuis ses débuts (la dernière en date étant une interdiction de tourner en Chine pendant cinq ans suite au tournage d'Une jeunesse chinoise), Lou Ye a enfin pu tourner librement et légalement dans son pays avec Mystery (seules 3 secondes ont été coupées). N'hésitez pas si :
- vous désirez en savoir plus sur la Chine et, ici plus spécifiquement, sur ses mœurs ;
- vous n'avez encore jamais vu de films de Lou Ye (c'était mon cas et je ne le regrette pas) ;
- comme moi, vous apprenez le chinois (c'est un formidable entraînement !) ;
- l'hyperesthétisation vous agace ;
- vous recherchez un polar haletant ;
- Warm Bodies (Jonathan Levine)Une romcom décalée, au format intelligent (un peu plus d'1h30, alléluia !*) qui relate l'histoire d'amour naissante et improbable entre un zombie (R) et une rescapée humaine (Julia). Le point fort du film réside en fait dans son point de vue pour le moins singulier, celui d'R, un zombie qui aime écouter des vinyles entre deux dégustations de cerveaux et dont on perçoit les pensées. Cette introspection, assez proche de celle qu'Anne Rice avait opéré chez les vampires, donne lieu à une apothéose d'autodérision absolument jouissive. L'écriture soignée des dialogues permet quant à elle de compenser l'intrigue post-apocalyptique, quelque peu banale, en se plaçant sans arrêt sous l'égide du sarcasme. Sans jamais se prendre au sérieux – c'est là la deuxième réussite du film selon moi –, Warm Bodies revisite donc Roméo et Juliette mais aussi La Belle et la Bête avec humour et intelligence. Dominée par des couleurs froides au départ, l'image se réchauffe par exemple à mesure qu'R aime et se sent aimé, détail symbolique que j'ai personnellement trouvé remarquable. Si la morale du film peut enfin sembler simplette, elle fait toutefois significativement écho aux problématiques actuelles (le rejet d'un peuple différent). En résumé, un film mignon sans être convenu, drôle sans être lourd qui mêle à merveille romcom et film d'horreur, bref, un mariage a priori contre-nature mais monstrueusement bien réussi ! En deux mots : sarcastique et original.Le petit plus : Warm Bodies est tiré du roman éponyme d'Isaac Marion que vous trouverez sous le nom de Vivants en France, lui-même librement inspiré de Roméo et Juliette, comme en témoigne les noms des personnages dans le film : Julia pour Juliette, R. pour Roméo, Marcus pour Mercutio etc.N'hésitez pas si :
- vous aimez les romances décalées ;
- l'univers des zombies ne vous a jamais séduit (moi non plus, ce qui ne m'a pas empêchée d'adorer, je crois même que nous les anti-zombies sommes les plus à même d'apprécier) ;
- vous êtes amoureux/se de Nicholas Hoult depuis Skins (ce film devrait entériner votre sentiment) ;
- vous attendez une intrigue post-apocalyptique travaillée (aucune originalité de ce point de vue là) ;
- vous ne supportez pas Teresa Palmer (auquel cas, vous ne pourrez pas survivre à ces 100 minutes) ;
À vous de voir !